dimanche 8 février 2009

Bien banal

KonopnickiKonopnicki m'agace. Voila qu'il se met à balancer des pierres de lune dans mon jardin national : « Les Français et les étrangers qui vivent sur le sol national ne sont pas menacés par on ne sait quelle uniformisation des moeurs que leur imposerait la république jacobine. Ils sont au contraire agressés par les exigences de groupes et de sous-groupes qui opposent leurs spécificités à notre bien commun ».
Comme lui, l'âge venu, toutes ces milices d'autodéfense culturelle me gonflent, que ce soit les intégrismes religieux ou chromatiques qui s'impliquent dans le travail législatif à leur avantage, ou les idéologues constipés qui voudraient bien faire tuer ceux qui leur résistent, en mettant en cause leur doctrine historique par exemple.

A l'origine de ce coup de gueule, je détecte la cuisson à feu doux de l'antisémitisme et de l'holocauste sur les fourneaux juifs, l'irruption de la compétition religieuse dans l'espace public (au sens étatique) et la liquidation de la laïcité grise au bénéfice d'une laïcité positive qui sert aux derniers venus une session de rattrapage des lois de séparation de 1905 qu'ils ont zappées. Konopnicki refuse les étoiles et autres "signes distinctifs" qu'on nous fait porter et qui classent toutes les catégories de français. L'Insee est du complot. La prétendue diversité s'oppose au principe de banalité citoyenne, qui ne connaît que des individus libres formant ensemble un peuple libre. L'exaltation des différences, nouveau dada médiatique, masque la marche en avant des cultes qui veulent découper et sanctuariser leur territoire dans la république et entendent imposer le respect au peuple le plus irrespectueux qui soit à l'ouest de l'Himalaya.

L'ordre classique, mis à mal par l'exagération des droits les plus échevelés et par l'existentialisme le plus égoïste que l'on ait vu depuis les libertins du 18° siècle, cède lentement mais sûrement devant la marée des barbaries et leurs contraintes importées. La notion de bien commun - celle d'être bien ensemble - disparaît dans le bazar cosmopolite des identités ethniques et religieuses, plus ou moins fumantes d'ailleurs.

le bouquin de KikiReste à définir le bien commun. L'expression est faite de deux mots. Le "Bien": qu'il soit éthique, politique ou religieux, chacun le voit très distinctement à sa porte à midi pile. "Commun" - voulez-vous dire commun à vraiment tout le monde ? - c'est déjà la dispute. Le "bien commun" appartient par définition à tous ceux qui sont reconnus "capables" dans un espace donné. Il ne se divise pas, ils ne se partage pas en portions. Il est un, le trésor et l'aboutissement de la multitude. Les grands esprits le projettent sur le monde entier. En attendant nous-même de grandir, laissons-le en France. Mais peut-être l'inventeur du concept, saint Thomas, a-t-il déjà tout dit :
« On doit apprécier la fin de toute la multitude de la même façon que celle de l'individu. Si donc la fin de l'homme était un bien quelconque résidant en lui et que, semblablement, la fin ultime de la multitude à gouverner fut qu'elle acquit un tel bien et le conserve; et si, en outre, cette fin dernière de l'homme ou de la multitude était de nature corporelle, ainsi que le sont la vie et la santé, on n'aurait besoin que du médecin. Si cette fin ultime était l'abondance des richesses, il suffirait d'être économe pour remplir la fonction de roi. Si la connaissance de la vérité était un bien tel que la multitude puisse y atteindre, le roi n'aurait plus que la fonction de docteur. Mais il est évident que la fin d'une multitude formée en société est de vivre selon la vertu. En effet, les hommes se réunissent pour mener une vie bonne, but que ne peut atteindre l'homme isolé. Or une vie bonne est une vie selon la vertu. Vivre selon la vertu, telle est donc la fin du rassemblement des hommes en société ».

Le "bien commun" est l'objectif (la fin) que permet d'atteindre la réunion des énergies et capacités individuelles tendues vers le bonheur matériel et moral des individus la composant. Il exclut l'ermite, comme l'alien.
Aussi peut-on dire que ceux qui ne se satisfont pas de l'objectif de bonheur commun à cette société-ci, tel qu'il s'est défini au cours de nombreux siècles civilisateurs qui nous ont précédé, dégagent.

Pour être clair, doivent passer à l'agence de voyages sans tarder, ceux dont les pratiques suivent dans le désordre :
- cheptélisation de la gent féminine
- séquestration mentale par condamnation de l'apostasie
- esclavagisme
- justice clanique
- mutilation des organes génitaux et piercings péniens
- contrefaçon exotique des traditions pérennes
- barrage à l'éducation complète des enfants
- assassinat des espérances démographiques
(à compléter par les lecteurs en commentaires)

Vous allez voir qu'on retrouvera de la place dans le RER !
En attendant de s'asseoir, et même si vous débinez Voltaire, lisez "La Banalité du bien" de Guy Konopnicki, communiste juif excédé par les particularismes arrogants qui pullulent : 172p. chez Balland, 15€. Le titre détourne la " banalité du mal " d'Hannah Arendt.
Au fait, qui a dit non au communautarisme catholique dans Les Epées ?



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