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Du mille-feuille territorial

M. BalladurEdouard Balladur boucle sa réforme territoriale en vingt points. Le document des Echos est accessible ici. Dans le désordre et en gros, il est question de ramener le nombre de régions métropolitaines à quinze, de recréer l'ancien département de la Seine (75) en agglomérant la Petite Couronne à Paris, de développer huit à dix métropoles autonomes de taille internationale en province, de supprimer les cantons et de réformer les scrutins en réduisant d'un tiers les exécutifs locaux.
La Gauche braille comme à l'époque des charcutages pasquaïens, sauf in petto ceux des caciques locaux qui bénéficieront de plus d'autonomie. Et bien évidemment, la réforme des scrutins dérangent les combines d'entre-deux-tours de tout le monde. Des imbéciles heureux qui n'ont pas lu le billet précédent, convoquent déjà un référendum pour torpiller la réforme, puisque le peuple assemblé est par principe intelligent et contre le petit reître !

Royal-Artillerie évoque deux points : l'agrandissement de la région, la démocratie de proximité sur empreinte communale.
Comme je l'écrivais à Jean-Philippe Chauvin, les régions ne sont utiles que si elles sont autonomes dans leurs domaines de compétence et assez puissantes pour n'avoir pas la tentation de congruer en parlement national informel et rebelle¹ afin de peser sur l'exécutif parisien inaccessible depuis la province.

carte régions
Le premier danger de cette autonomie puissante est la création de satrapies. La parade aux emballements somptuaires est de leur faire lever les contributions directes qui les financent, si l'on veut bien convenir d'avance que tout un chacun doit subvenir aux besoins de l'Etat par ses impôts aussi modestes soient-ils. Pour le moment, moins d'un Français sur deux subit les trois piqures annuelles des tiers de l'IRPP², ce qui n'est vraiment pas "égalitaire".
L'autre danger est la sécession, surtout si passe le train du traité de Lisbonne dont un wagon prévoit de se pencher sur les "nations sans état". Dans sa tête, l'Alsace est presque prête à la fusion avec le Bade, sauf les hommes politiques français qui risqueraient bien sûr leur place. Le politicien déteste la novation, tant la prébende est difficile à gagner.
SavoieLe Roussillon qui refuse cette désignation sauf pour le pinard, se verrait bien dans une grande Catalogne à cause du mépris affiché par Montpellier et Toulouse à son égard. Le Pays basque pareil.
La Haute Savoie et la Franche Comté pourraient bien devenir le 27° canton suisse. Un mouvement y travaille ouvertement. On les comprend un peu :)
Ceci étant, le vieux mille-feuille politico-administratif français n'est pas performant quand il n'est pas carrément banqueroutier.

Dans un pays moyen sur-administré comme la France, la redistribution des pouvoirs convoque le principe des vases communicants et l'Etat central y perd en pouvoir et complexité. Le refus de ce principe hydraulique par redondance des services ministériels à mesure que montaient en puissance les services régionaux, est à l'origine du bordel administratif chiraquien que l'on veut réduire. Normal que se soit Balladur qui s'y colle.

Si au stade régional mieux vaut bâtir de grands ensembles capables de dégager des capacités budgétaires conséquentes et des coopérations transnationales avec leurs homologues de taille équivalente, au niveau du citoyen, il n'est pas bon de saquer la démocratie directe de proximité, la seule qui soit saine. Mêmes si les compétences doivent passer à l'échelon, si les directions des services et travaux sont optimisées en élargissant l'assiette d'interventions, on ne doit pas y mélanger le débat démocratique.

Mme GuigouLe meilleur cénacle politique du citoyen est le conseil municipal si toute la commune y est représentée, ce qui n'est pas le cas, par le dispositif de prime au premier venu, visant à dégager une majorité de gestion. Or on voit bien que l'autonomie de gestion des communes est un leurre, surtout depuis que leur endettement, contractés dans les années glorieuses, la plombe terriblement. A ce stade, l'intercommunalité (ou carrément la fusion de communes) est une réponse pertinente au niveau exécutif, mais on doit la compenser par la revalorisation des conseils municipaux existants recomposés à la proportionnelle intégrale (non bricolée).
Ce conseil municipal - photo fidèle de la circonscription électorale de base - devrait pourvoir aux sièges du conseil régional, sans assemblée intermédiaire, à partir d'un mode de scrutin propre à la région, voire même choisi par elle. Ce serait une vraie simplification et au moins l'édifice politique de ce pays serait alors érigé sur une vraie légitimité de base.

Pour le reste, je ne vois rien d'offusquant, encore moins au spectacle affligeant d'Elizabeth Guigou condamnant « des soi-disant réformes régressives qui dissimulent beaucoup d'arrière-pensées et de manœuvres électoralistes ». De l'autre bord, l'accusation de jacobinisme proférée à l'endroit du projet Balladur par de M. de Villiers, président du Conseil général de Vendée (44), est à m'expliquer avec des mots simples. L'âge venant, je n'ai pas capté le diable (de Tasmanie) dans le détail.
La remise du rapport final à l'Elysée est imminente.


Note (1): voir les refus des socialistes en région d'appliquer les lois votées à Paris par la majorité qui leur est hostile
Note (2): Impôt sur le revenu des personnes physiques




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