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Jeu de Roi

jeu de l'oie ancienCe jeu de l'oie n'a que cinq cases utiles et tant d'autres qui ne servent à rien. Pour une fois, nous jouerons sur les cases qui s'ouvrent vers l'avenir pour imaginer un royaume revenu.
Un royaume ? Ni grand, ni petit, c'est d'abord un prince en famille et son projet, un pays et ses landes, ses montagnes, ses rivières à mouche, ses vignes, ses prés où des vaches languissent des trains, ses blés qui ondulent, un peuple apaisé qui s'occupe de ses propres affaires, la glycine en terrasse, et tout au bord, la mer et ses mouettes pour rêver d'ailleurs. Un royaume ? C'est une patrie tranquille, « cette quantité de terre où l’on peut parler une langue, où peuvent régner des mœurs, un esprit, une âme, un culte. C’est une portion de Terre où l’âme peut respirer » (Charles Péguy) ...

Quitte à mourir sous les pierres, nous avons brisé le tabou pour jouer au roi (de pique) et déroulons ci-dessous pour meubler un long après-midi férié une proposition institutionnelle qui ne se prend pas pour une solution, car au bout du bout il n'y en a sans doute pas dans l'environnement actuel et les circonstances probables qui le suivront.
Que les chapelains me pardonnent, je cours au tronc et ne le ferai plus ...

Première case : UN PRINCE, UNE IDEE
penseur fusainD'expérience, la cohérence d'un projet politique ou industriel est acquise plus sûrement s'il est mouliné par une seule personne qui au long de son élaboration s'oblige à garder une distance critique (?!), remisant l'ouvrage au tiroir s'il en doute, pour reprendre plus tard ses travaux de broderie, sans exclure bien sûr des consultations.
Un prince est formé dès son plus jeune âge à l'approfondissement du projet monarchique dont il va hériter. Si la convergence d'esprits différents y atteint parfois, elle n'aura jamais la cohérence instinctive d'un projet individuel. L'autre intérêt d'un projet "autocéphale" est d'éviter, s'il est besoin de le publier, d'aboutir à une somme d'épaisseurs impossible à vendre au commun des mortels pour le salut de leur intelligence.
Dans monarchie, il y a "mono" : il n'est pas bon que le prince s'en remette tout entier à ses conseils, car vient un moment, un instant où il devra trancher sans se tromper et vite. Autant dire qu'en l'état du paysage politique royaliste, j'ai des doutes sur la préparation et ne puis les lever par absence d'un projet public à jour, le dernier, fruit des réflexions du défunt comte de Paris, date de 1949. En attendant la mise à jour, parce que nul chef d'Etat ne peut faire l'impasse d'un programme politique au XXI° siècle, nous constatons deux graves imperfections du régime actuel.

Deuxième case : DEUX ATTENDUS...
(1) Une "organisation" démocratique n'existant pas dans la nature sauf chez les lemmings, notre démocratie représentative est tordue dans ces procédures de telle façon qu'elle privilégie la victoire d'un camp aux fins de gouverner l'autre, sans entraves ni souci de représenter le pays réel. Les élus du système électoral ne représentent jamais plus des deux tiers des citoyens et pas la moitié des résidents. Ainsi 40 à 50% de la population n'est pas "tenue" d'obtempérer aux conseils ou injonctions d'un système qui les ignore. Si la crise s'aggrave, nous verrons ce que cela veut dire, après les défilés unitaires de la semaine passée.

accordéon(2) La social-démocratie du bonheur national illimité a ouvert sous nos pieds le gouffre des déficits dans lesquels vont se ruiner les générations montantes. Si l'on comprend que ce n'est pas une question de choix politiques successifs mais plutôt l'aboutissement d'une dérive démagogique intrinsèque à la démocratie qui récompense les catégories ayant porté le vainqueur au pouvoir au détriment des vaincus et dont l'alternance n'annule jamais les avantages distribués, le régime n'est pas réparable. Il est fondamentalement pervers.
Ces deux gros défauts étant postulés, au milieu de quelques autres, trois principes peuvent être précisé pour y remédier.

Troisième case : TROIS PRINCIPES
La monarchie n'est pas l'ennemie de la démocratie, elle a l'ambition de ne pas leurrer les citoyens en les embringant dans des disputes fabriquées d'avance par la caste au pouvoir, mais de les faire décider dans leur cercle d'intérêts.

(1) Le citoyen (ou le résident) doit avoir son mot à dire sur les politiques publiques à l'intérieur de son périmètre de conscience politique. Si chacun a le sien, qui peut varier dans le temps, on peut trouver une circonscription médiane raisonnable à équidistance des capacités individuelles de tous. Les anciens "états" ne sont pas si loin de la vérité. A l'époque moderne, la conscience dans l'espace de l'arrondissement départemental est un fait vérifiable.

(2) Le gouvernement des hommes doit favoriser la croissance du bien commun dans la réalisation des ambitions légitimes de chacun selon ses talents. Son environnement doit l'y prédisposer : la mise en sécurité, la police des moeurs, la facilitation des échanges participent de cet objectif.

(3) La permanence du cœur essentiel du pays est la condition de base pour que ses habitants gardent leurs repères importants et agissent en sûreté. Le paramètre chronologique de la monarchie permanente donne naturellement un rajeunissement périodique d'un gouvernement pérenne, tout en garantissant une amélioration de cet héritage qui passe de roi en roi. Du moins indique-t-il une forte propension d'y parvenir.

Quatrième case : QUATRE POUVOIRS
L'essentiel des fonctions d'un Etat est rassemblé dans ce que l'on appelle encore aujourd'hui en République ses "pouvoirs régaliens". Ils sont au nombre de quatre, et doivent être protégés des disputes partisanes nées du débat démocratique, a fortiori de sa dérive endémique, la démagogie :

la Justice(1) UNE JUSTICE UNIVERSELLE
C'est le fondement de l'Etat. Aucune justice de classe comme aujourd'hui n'est acceptable longtemps parce qu'elle provoque un jour la révolution et le déchaînement de la barbarie qui va avec. Nous avons déjà donné.

(2) LA POLICE DES MOEURS
La paix civile est une condition incontournable du Principe n°2. D'où que proviennent ses effectifs, la police doit être efficace, réglée et impartiale. C'est une fonction essentielle de l'Etat, son visage quotidien, qu'il faut se garder de décentraliser, à la merci de satrapes territoriaux.

(3) UNE DIPLOMATIE
L'imbrication transnationale des économies et des intérêts oblige à réunir au-dessus de la mêlée le faisceau des axes majeurs et déterminants de la politique étrangère du pays entre des mains expertes, et donc les retirer de celles du pouvoir éphémère issu du parlement qui agit trop souvent selon l'effet médiatique attendu (ex. Turquie, Thibet, Palestine, Sri Lanka!). Les grandes diplomaties persistent sur des axes majeurs nationaux. La France a une grande tradition qu'il serait sot de diluer dans des intérêts communautaires flous.

(4) LA GUERRE
C'est l'ultima ratio de l'Etat. Dans nos sociétés modernes, la guerre n'est engagée qu'en cas de péril avéré. Ce n'est pas au moment où celui-ci se dévoile qu'il est permis de s'y préparer. La capacité d'une défense est proportionnelle à la puissance de son attaque. Ces choses se construisent avec du temps, au-dessus des affaires partisanes, et la conception doit être concentrée sur le succès brutal d'une guerre ouverte. Dissuader l'ennemi s'obtient plus vite par le vecteur de la peur. L'état actuel de nos forces armées et les complications insensées de leur projection, font toute la démonstration de la pertinence de notre propos qui rejoint l'inquiétude d'observateurs bien mieux placés. Le président et la nation sont à découvert.

bataille de Kosovo

Cinquième case : CINQ VERTUS
Le combat monarchiste de Royal-Artillerie est quelque part décalé par rapport au combat royaliste en ce qu'il ne convoque pas les "valeurs sociétales" au débat, ce qui lui vaut des bordées d'insultes parfois mais plus souvent un certain ostracisme. Glissons ! Dans ce combat cybernétique, on se contente d'imaginer "pour de rire" une organisation de l'essentiel afin de pousser dans ce pays le cadre institutionnel capable de libérer le peuple d'une pseudo-responsabilité qu'il ne peut assumer, pour le laisser organiser librement ses propres moeurs selon les étages de pertinence que l'on retiendrait ; législation nationale, coutumes locales, droits catégoriels, privilèges.
Le combat royaliste en revanche est fait autant sur les valeurs que sur le principe du prince.
De nos jours, on associe les royalistes au "pouvoir fort", à la xénophobie, au folklore provincial, à l'intégrisme catholique, au combat pro-vie, au loden, aux privilèges désuets et au scoutisme traditionnel. Rien de vraiment répréhensible, mais quand même bien plus hégémonique que notre modeste épure.

4 vertus en statues
Il n'en demeure pas moins que le système monarchique convoque aussi certaines valeurs d'exécution. La morale qui devrait conduire l'exercice d'un pouvoir monarchique non invasif peut se décliner en cinq "valeurs" : les quatre vertus pythagoriciennes et une cinquième souvent dévoyée en solidarité clientéliste par les pouvoirs : la charité.

(1) La prudence convoque la réflexion, le jugement et in fine l'action. C'est une méthode tactique qui se méfie de beaucoup de miroirs et d'abord des sondages.
(2) La justice applique les droits élémentaires de la personne humaine ; règle le devoir de contribution à la vie commune en proportion des capacités de chacun ; oblige à l'établissement des lois du Bien commun qui seront acceptées par les justiciables au motif de vivre ensemble. La citoyenneté commence à l'acceptation de cette "dévolution" personnelle.
(3) La force requiert la volonté, la résilience et la persévérance ; elle se modère par la magnanimité et la patience qui sans elle ne sont rien.
(4) La tempérance s'exprime par la sobriété des moeurs princières, la modestie devant le projet vivant de la monarchie qui roule, et une certaine pureté intellectuelle et morale pour baliser le jugement.
(5) La charité cherche à aimer son prochain par l'esprit d'indulgence et de miséricorde dans une fraternité d'espèce. Après la justice, elle est le second support de l'être.

bannière lys
Une monarchie indépendante des factions démocratiques (presque absolue), recentrée sur ses quatre pouvoirs régaliens durcis, stricts, et exercés selon la loi des cinq vertus, remplirait-elle le contrat ? Sera-t-elle facilement compréhensible des non-initiés majoritaires dans l'Opinion ?
La question est ouverte si l'on veut convaincre plus largement qu'aujourd'hui.

Frédéric 2



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Commentaires

  1. Je trouve le sujet du jeu du roi original. Je l'ai lu plusieurs fois, il est clair, net.

    Très convainquant.

    Méro.

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  2. lucien lacour8 mai 2009 à 22:00

    Il est assez drôle de vous voir faire la critique du royaliste raciste, xénophobe, en loden, alors que, vous même, dans l'article précédent, demandiez un peu d'indulgence ou de compassion pour les SS français de la Division Charlemagne (indulgence et compassion qu'ils n'ont pas eu pour leurs victimes). Tout ne serait-il chez vous que posture et snobisme? Je comprends mieux maintenant votre complaisance pour un certain "légitimisme". Première cause, d'ailleurs parfaitement imbécile et artificielle, de la division des royalistes.

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  3. Toujours à re-écrire dans le sens de votre offuscation le billet du 7 mai, à ce que je vois. C'est un procédé que l'on enseignait autrefois à l'Ecole des cadres du Parti !
    En fûtes-vous, Lucien Lacour ?
    Votre ire est puérile ! Vos échauffements n'apportent rien au débat.

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  4. Demandez le programme !
    J'attends toujours que Catoneo nous explique le mode d'accès à cette monarchie absolue "frédéricienne".
    Séduisant.
    Gérard

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  5. lucien lacour9 mai 2009 à 12:33

    En quoi avons nous besoin d'exemples boches pour imaginer le projet monarchiste ? Mille ans de monarchie française ne suffisent donc t'ils pas ? Et toujours cette référence à l'Allemagne ! Agaçant à la fin ! Pourquoi ne pas rappeler plus simplement les apports positifs de la fin du XVIIIe et du XIXe siècle : la constitution de 1790 (pour son fédéralisme), les chartes de la Restauration (qui ont introduit en France la démocratie parlementaire, car c'est la monarchie et non pas la République qui a fondé en France le régime parlementaire, pourquoi ne pas le rappeler?), les idées du Comte de Chambord et celles plus novatrices encore du Comte de Paris (dans Essai pour le gouvernement de demain, par exemple), sans parler, sur un plan plus théorique encore, des écrits de Boutang et du groupe de la Nation française (Ecrits pour une renaissance, Reprendre le Pouvoir) qui permettent au surplus de construire un lien entre vision monarchique et vision gaullienne du pouvoir. Bref, nous disposons d'une masse d'idées considérables pour dessiner les contours d'une "monarchie moderne, sévère à toute vieillerie" comme aurait dit Boutang. Alors pourquoi aller chercher chez les Prussiens nos exemples ? Encore des postures et du snobisme !

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  6. Oublions l'insulte "boche" de cet imbécile qui a pris un pseudo trop grand pour lui.

    12345 !
    Pas mal, mais une question entre 10 :
    Que faites-vous, Catoneo, si le prince accédant n'est pas dans ce programme n°12345 ? Il ne vous a pas échappé (puisque vous l'avez dit!) que la République débarrassée de l'aléa électoral au poste suprême pourrait tout à fait convenir à un prince de notre temps, comme on le voit dans les monarchies européennes.
    Faudra-t-il s'en détourner parce qu'il ne remplira pas le contrat passé avec les Royalistes ?
    Sous une autre forme : quand Henri d'Orléans lève les yeux au ciel en guise de réponse à Thierry Ardisson qui lui demandait son avis sur les "royalistes", est-ce qu'il ne trahit pas une aversion contenue pour tout projet politique imposé par les chapelles royalistes que par ailleurs il fédérait moralement dans son discours des Baux de Provence ?
    En savez-vous plus sur les intentions politiques du comte de Paris ?

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  7. A dire vrai, je connais son approche assez ésotérique du monde - basculement des pôles - , son goût prononcé pour la gnose comme il l'expliquait à Occulture et quelques déclarations apolitiques de circonstances bien senties souvent, mais hors du sujet qui nous concerne (ou nous inquiète).
    J'ai un idée, mais non étayée je la garde pour moi. Vous comprendrez.

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  8. On peut aussi connaître les "opinions" du comte de Paris sur son ancien site qui par bonheur est toujours libre d'accès.
    CLIC !

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  9. Mon autre question entre 10 : quelle est la fonction de l'Eglise catholique dans cette belle utopie ?

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  10. @ Gérard,
    Un essai d'étapes en séquence va paraître bientôt qui répondra à votre interrogation. Mais il y en a au moins pour dix ans ... en ramant ferme !

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  11. D'ici-là, les choses auxquelles sont fermés vos esprits incrédules seront connues depuis longtemps !

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  12. @Cassan,
    Les providentialistes gagent que Dieu s'en occupera en temps voulu, les autres évitent la question tant le bas-clergé est hostile à toute remise en cause de la démocratie. En fait c'est la revanche du Sillon !

    Personnellement, je ne pense pas que que le pilier catholique porte plus que sa fonction de religion du prince. Resterait à promouvoir la doctrine sociale de l'Eglise qui n'est exactement un renfort pour une monarchie.

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  13. @ R-C, l'impatience me ronge. Serai-je toujours sous le soleil quand arrivera l'oracle ?

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