jeudi 22 novembre 2018

Une Bataille de clowns



Confortée par le succès apparent de sa résistance aux supplications anglaises dans l'affaire du Brexit, la Commission européenne tient tête aux dérives budgétaires italiennes, ce qui en touche une sans faire bouger l'autre au Palais Chigi.

Chacun a bien compris que l'inflexibilité des services de M. Moscovici s'adressait plus aux dirigeants des partis populistes au pouvoir qu'à Giovanni Tria, Ministre de l'économie et des finances, sans étiquette. La France fait pire mais on accepte à Bruxelles l'enfumage de Bercy pour ne pas déplaire au jeune Napoléon Macron qui va sauver la gamelle en mai 2019.

L'affaire ne fait que commencer et on pourrait s'étonner du peu d'anticipation de ces messieurs de la Technocratie alogorithmique qui ne voient pas le génie maléfique dans la lampe à Matteo. La procédure de contrainte va s'enclencher par une punition qui pourrait atteindre 2‰ du produit intérieur brut émergé, ce qui est énorme et n'arrangerait pas les comptes publics. Peut-être énivrés par la mise au pas de l'Espagne, de la Grèce et du Portugal, ces messieurs de l'orthodoxie financière pensent faire plier les "Horrorclowns*" du gouvernement italien mais rien ne sera moins simple. Si Paris a pris sans vergogne fait et cause pour la "punition", deux autres acteurs sont attendus sur ce dossier qui pourrait gonfler dangereusement pour les institutions de Bruxelles, les marchés avec la BCE et le Groupe de Visegrad.
* Der Horrorclown comme le Spiegel appelle Salvini
Les marchés sont complètement froids quant aux motifs des uns et des autres, ils constatent le rapport de forces au moment, ajusté des notes de confiance données par les agences. Le spread entre les bons du Trésor italiens et allemands sera plus efficace pour calmer le jeu que les cris d'orfraie bruxellois.
La Banque centrale européenne quant à elle, détient une montagne de bons italiens par le quantitive easing de Mario Draghi et doit maintenir leur valeur au bilan. Il est donc probable que des facilités seront accordées. A noter que jusqu'ici l'Italie transfère chaque année un solde de contribution européenne de cinq milliards d'euros qui pourrait lui servir si éclate la guerre des bons, au seul motif un peu capillotracté, que c'est Bruxelles qui a énervé les marchés en s'immisçant dans la trajectoire de relance économique de la péninsule.

Le groupe de Visegrad qui (sauf Bratislava) n'est pas dans l'Eurozone, considère la crise d'un œil intéressé, attendant d'en saisir son avantage contre Bruxelles. L'Autriche quitte la présidence tournante à la Noël et va peut-être les rejoindre.

Au vu des certitudes de l'Europe sérieuse et profitant du renfort de la reine des Gitans (c'est nous) la Commission va se draper dans les textes d'autorité et se cabrer, jusqu'à ce que ses éternels débiteurs rallient le gouvernement italien dans son combat du faible au fort. L'affaire sortira alors de l'Eurozone pour ouvrir une crise entre le centre et sa périphérie, exactement comme en France. Arriveront à la fin de la "guerre" les élections européennes pour soumettre la querelle aux souverains princes, les peuples européens.
En l'état des positions actuelles on imagine déjà les résultats dans six mois : raz-de-marée illibéral ! En France, second grand corps malade de l'Eurozone, la ruée des mécontents va exploser le compteur des partis nationalistes. Si tout se passe aussi mal que le génie maléfique de Salvini l'aura décidé, c'est une fronde majoritaire au parlement européen qui va s'agglomérer autour et contre le bloc germanique pour rendre la vie impossible à la Commission. Une carte montre mieux de quoi on parle : les peuples rétifs formeraient un continuum de Gdansk à Vienne et Milan et sans doute rejoints par ceux de la France du Nord et de l'Est.



Sortir de cette crise fondamentale, que l'on ne pourra pas nier plus de six mois, ne peut s'envisager que par une consultation générale des populations sur l'avenir souhaité pour l'Union européenne. En fait, revenir au référendum de 2005 ! Et (c'est une marotte de Royal-Artillerie) poser la vraie question qui guidera tout le reste :
Fédération ou Confédération ?

Pour finir sur un radotage à la Caton-le-Vieux : les pays ayant choisi la fédération fusionneront dans le style de la République fédérale d'Allemagne et rejoindront tous les autres dans la Confédération européenne. C'est trop simple !

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