lundi 26 novembre 2018

In absentia

[Billet spécial pour initiés sans images ni lien 2.0]

L'histoire du premier quart de ce siècle nous jugera par contumace. On saura plus tard que cette période fut décisive dans le grand bouleversement du monde assis sur une planète en voie de réinitialisation quand furent détruits les paradigmes anciens derrière le dérèglement climatique et le naufrage des démocraties de Westminster.
Des chercheurs à loupes bioniques trouveront de minuscules fossiles dans les strates politiques éteintes qui parviendront jusqu'à eux, et seront surpris de les savoir si jeunes finalement. Au début du XXI° siècle, des fourmis demandaient un roi.
Le monde et le promontoire finistérien de la péninsule européenne qu'on appelait la France aura changé sans nous, sans les royalistes. Bien malin qui pourrait décrire le monde nouveau en cette fin de l'année 2018, mais redire que nous n'existons pas vraiment est fondé sur une réalité constatable dès lors qu'on prend le drone pour survoler le roycoland. Nombreux ont été - et bien avant ce petit blogue grognon - les cassandres qui prévoyaient de grands désordres sociaux rebattant les cartes. Quelques-uns demandaient même que les chapelles et leurs réseaux soient techniquement prêts à pousser les intérêts du roi le moment voulu dans une nation en effervescence, après bien sûr y avoir infusé l'idée de la restauration d'une monarchie moderne. Les chapelains restèrent sourds et sont presque tous partis depuis.

Le mouvement des Gilets Jaunes qui est l'expression d'un mécontentement de synthèse fermentant dans les couches laborieuses et démocratiques (disait Marchais) peut se retourner de lui-même ou presque en sédition populaire. La jacquerie fiscale est exaltée par le superbe mépris des fondés de pouvoir de l'oligarchie qui au lieu de désamorcer les mesures d'injustice flagrante, se prennent le chou à vouloir expliquer aux manants longuement et dans le détail pourquoi et combien ils ont tellement raison de décider à leur place tant ils sont cons. C'est la mission du Haut Conseil au Climat ou à la transition écologique ou énergétique, enfin, un machin pour noyer le grincheux, qui va être instauré demain depuis l'Olympe élyséen. N'importe quel échotier de sous-préfecture prévoit déjà un formidable frisson de refus et de haine à travers tous les territoires. La haute bourgeoisie blindée de thunes et la caste politique qu'elle entretient à grands frais vont-elles se réveiller avec les sectionnaires qui sonnent à la porte à cinq heures du matin, comme en 93, dis ?

Alors ? Alors ? Alors ? Avons-nous ensemencé l'opinion à l'idée d'une alternative à la République des oligarques ? Le grain lèvera-t-il enfin ? Et sommes-nous prêts pour la moisson et la mise au moulin ? QUE DALLES ! Nous n'apparaissons pas (m'a-t-on dit) dans le spectre politique actif sur le corps électoral, même si des spécialistes payés au mois nous mentionneront toujours dans une archéologie politique des droites en France. Mais quid du présent ?

Nous en sommes au même point qu'en 1952 (mort du Martégal). Nous n'avons pas beaucoup avancé ! Si l'on met à part les cellules de dégrisement au vin de messe avec ou sans camisoles - chacun les reconnaîtra - il ne reste, comme structure royaliste ayant l'intention de marquer d'une quelconque empreinte la vie politique de ce pays, que trois chapelles : la Restauration nationale réunie, la Nouvelle Action royaliste et l'Alliance royaliste. Elles n'ont en commun que leur impécuniosité et la faiblesse de leur propagande qui en découle. Aucune n'a jamais suscité l'intérêt d'un mécène, réuni un tour de table voire convoqué des assises royalistes pour organiser le financement d'une diffusion nationale du programme de restauration monarchique, un texte bien fondé et compréhensible en deux pages écrit gros. Ce n'est pas l'envie qui leur manque, ni le talent, mais les moyens de convaincre. Mais faudrait-il encore l'avoir ce programme.

Une seule chapelle en a publié un, l'Alliance royale. Il a un défaut rédhibitoire, c'est un programme à étudier dans une école de sciences politiques mais qui est invendable à l'opinion parce que trop compliqué. Usine à gaz classique où l'on compense un désavantage par un désavantage contraire. Je n'ai pas encore saisi le fonctionnement des collèges électoraux, peut-être par anti-parlementarisme primaire ni l'empilage des ministres d'Etat et Premier.

La NAr propose de réviser simplement la constitution gaullienne de 1958 pour pérenniser le chef d'Etat titulaire, ce qui est une approche pragmatique mais parfaitement confidentielle, personne en France de moins de 70 ans ne connaît ces gens. Reste la grosse chapelle.

La Restauration nationale réunie. Pas plus riche que les deux autres, elle arrive quand même à faire vivre des cellules locales dont certaines sont très visibles en souvenir des camelots du roi. La chapelle AF, qui gagnerait en efficacité à muter en vrai parti politique, publie désormais un mensuel de belle facture dans lequel on peut lire en page 39 son manifeste-programme : le voici, il tient en une ligne : « Défendre en toutes circonstances l'intérêt national et instaurer la monarchie ».
Le plaidoyer pour la monarchie et l'appel au rassemblement pour la réinstaurer est impeccable et se termine par une projection dans le futur où chaque mot compte. Le manifeste complet est en pied de billet. Voici déjà la conclusion :
Parce que le Roi incarne le lien entre l'héritage du pays et son avenir, seule la monarchie décentralisée et représentative garantira le juste exercice d'une puissance durable en répondant naturellement aux besoins d'autorité, de libertés et de représentation du pays réel et en permettant à la France de faire face aux enjeux du monde actuel.
Rien à dire. Mais qui le sait ? Tout le problème est là. Dans les analyses de physique sociale (comme Maurras désignait la politique) l'Action française a toujours eu raison et, après la mort de Maurras, a su se transformer pour coller justement au pays réel, mais plombée par les séquelles de la guerre et subissant la conspiration calomnieuse de ses ennemis elle a disparu des radars populaires ; et je ne veux pas blesser les anciens combattants de la Génération Maurras ou d'autres après eux, mais l'agit'prop de la régie centrale n'a jamais percuté.

Un mot sur le Groupe d'Action royaliste qui a fédéré des militants déçus par l'endogamie des chapelles : Le G.A.R. n’est pas un mouvement politique ni un parti, mais une structure militante tranversale de communication, d’actions et de formation politique, dérivée de l’Action Sociale Corporative qui investissait le champ du compromis social sur les bases historiques derrière René de La Tour du Pin, Albert de Mun ou encore Frédéric Le Play. Elle colle à la tradition du livre et de la trique des Camelots du Roi mais reste critique à l'endroit des capacités de commandement de Charles Maurras qui reste un maître à défaut d'avoir été un chef.


Voilà ! Aujourd'hui les classes laborieuses sont en plein désarroi. Nous avons des réponses qui peuvent les intéresser si nous bannissons le jargon de l'entre-soi et parlons vrai. Réorganiser l'Etat devient une évidence, au moins pour stopper le coulage des impôts et taxes dont nous sommes champions hors-catégorie.
Recentrer l'Etat sur le régalien et le visible, dégraisser à l'os tout le reste, décentraliser la collecte fiscale pour faire monter au front les collectivités locales insatiables de grandeur pour la gloire de satrapes de division 2, cesser la guerre quinquennale qui jette une moitié de la France sur l'autre moitié et condamne les vaincus à subir le gavage des vainqueurs, réfléchir au roi... etc.

Mais comment atteindre ces gens, sans argent, sans parti structuré, sans programme lisible par le plus grand nombre ? Expliquez-moi, je suis tout ouïe. Inutile de m'opposer la supercherie démocratique qui dispenserait de tout effort ou la lieutenance du Christ sur terre. Restons sérieux et raccord avec notre environnement socio-économique actuel.

In cauda, reste la question de personnifier l'offre politique. Nul ne pourra vendre la monarchie avec la famille en attente qui est complètement grillée dans l'imaginaire collectif, et Médiapart ou le Canard enchaîné ne s'en sont pas encore occupé ; pas plus qu'avec le beau franquiste de Madrid que j'aurais choisi en préférant l'athlète au bedeau. A l'impossible nul n'est tenu. Inutile de charger du lest dans un ballon qui n'a pas encore décollé. Paradoxalement les Lois fondamentales qui ferment l'angle sur ces choix imposés, sont le dernier rempart de la République. Il faut repenser le truc. « L’art de la guerre est un art simple et tout d’exécution ; il n’y a rien de vague, tout y est de bon sens, rien n’y est idéologie » disait Napoléon Ier dans le Manuel du chef. Cessons de mâchonner les grands principes, soyons pratiques, modestes, efficaces.

Merci d'être arrivés jusqu'ici.






MANIFESTE




L’Action française est animée par une double préoccupation : elle entend préparer la restauration de la monarchie et, dans l’attente du retour du roi, œuvrer pour la défense de l’intérêt national.

La restauration de la monarchie


C’est en jugeant les institutions selon leur capacité de faire vivre la nation française ou de la conduire à la décadence que les fondateurs de l’Action française ont conclu à la nécessité de restaurer la monarchie. Le nationalisme conduit logiquement au royalisme. La France est le fruit de la politique capétienne, poursuivie durant plus de huit siècles. Aujourd’hui, la monarchie conférerait à l’État des qualités bénéfiques :

L’unité, sans laquelle il ne saurait y avoir d’autorité véritable et qui est indispensable pour garantir l’indépendance nationale. Au contraire, la démocratie divise les français et entretient un état de guerre civile larvée. Les intérêts supérieurs du pays sont sacrifiés aux luttes partisanes.

La continuité et les successions paisibles, conséquences de l’hérédité du pouvoir. Ainsi des objectifs à long terme peuvent-ils être atteints. La continuité du pouvoir monarchique durant huit cents ans contraste avec l’instabilité institutionnelle des deux derniers siècles.

L’indépendance. Elle est la qualité d’un régime qui ne repose pas sur l’élection, laquelle lie le pouvoir à l’opinion publique, l’obligeant à pratiquer une démagogie éhontée pour recueillir des suffrages. Le régime électif est ainsi obligé de centraliser l’administration du pays. Il détruit les libertés locales, municipales, régionales, professionnelles, toutes ces petites républiques à qui le Roi permettait de vivre et de s’organiser librement. Dégagé des soucis électoraux, il serait en situation d’être un arbitre.

La responsabilité. Les intérêts dynastiques et personnels du Roi se confondent avec les intérêts nationaux, tandis que le pouvoir démocratique dilue la responsabilité dans des majorités et des scrutins.

La légitimité. C’est-à-dire un pouvoir s’exerçant en vue du seul bien commun, indépendant des groupes d’intérêts et des puissances d’argent. L’État royal puise sa légitimité dans l’histoire et les services qu’il a rendus au pays au cours des siècles. Il n’y a pas de légitimité en démocratie puisque le pouvoir est le fruit des compétitions électorales et que les partis l’exercent selon les caprices de l’opinion.

Ces vérités politiques, que la réflexion découvre, sont confirmées par l’histoire. La monarchie traditionnelle, chrétienne, héréditaire, décentralisée et représentative a fait la France et l’a conduite à son apogée.

Le bilan des régimes démocratiques, Républiques ou Empires, est autrement lourd : nombreuses invasions depuis 1792, instabilité constitutionnelle, luttes intestines et révolutions, affaiblissement général de la France.

L’Action française travaille donc à changer les institutions politiques. Ayant condamné le régime républicain, elle s’emploie à en débarrasser la nation. Ayant reconnu dans la monarchie la vérité historique de la France, elle s’efforce de la restaurer en la personne du Chef de la Maison de France.

La défense de l’intérêt national


Royalistes parce que nationalistes, les adhérents de l’Action française s’appliquent à défendre l’héritage en l’absence de l’héritier. Ils essaient de limiter les méfaits républicains en les dénonçant par la propagande et en les combattant par l’action.

Ils pratiquent à l’occasion le « compromis nationaliste », c’est-à-dire l’entente avec tous les patriotes pour mener telle ou telle campagne d’intérêt public.

Parce que la nation constitue le plus vaste des cercles communautaires qui soit, au temporel, solide et complet, l’Action française défend la France et ses prolongements outre-mer contre toutes les agressions intérieures et extérieures.

En conclusion, l’Action française convie tous les français à se rassembler sur le seul terrain politique afin de sauvegarder la nation française et lui rendre les institutions qui garantiront sa pérennité. Seule la monarchie répond aux besoins d’autorité, de libertés et de représentation du pays réel et peut permettre à la France de faire face aux enjeux du monde moderne.


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