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Macron se chiraquise

Dans notre billet précédent consacré au G7 de Biarritz, nous avions conclu sur l'inutilité de l'exercice, ce en quoi nous étions court ! Si l'exercice ne provoquera aucun changement de cap, n'adoucira aucun conflit - trop d'acteurs étaient absents - il redonnera en revanche du lustre au président de la République dans son agenda diplomatique. A la Chirac, on le trouvera abracadantesque à l'intérieur mais de belle stature à l'extérieur. A nul effet aussi, comme le modèle !

On accordera néanmoins au chef de l'Etat d'avoir conduit le show avec talent, en oubliant qu'il eut très tôt un professeur de théâtre doué. Nous avons tout vu dans cette pièce remarquable, la chaleur en cajolant Donald Trump, la vindicte en insultant Jair Bolsonaro par contumace, la surprise en remettant en selle Vladimir Poutine dans le format "Normandie" et le coup de théâtre avec l'irruption de Mohammad Javad Zarif bénie par Trump à la fin. Pas de gros couacs dans la salle, Hendaye et Bayonne étaient contenues, Biarritz vitrifiée. Difficile de faire mieux. Soyons beaux joueurs. D'autant que ça ne va pas durer.

Déjà Donald Trump a apporté tout son soutien au président brésilien et à son fils dont il agrée les lettres de créances pour l'ambassade de Washington ; Vladimir Poutine, de retour de Brégançon, n'a pas mis d'eau dans son vin pour la Crimée et traite la crise au Donbass en direct avec le jeune président ukrainien ; on sait que Mohammad Javad Zarif n'a aucune influence en Iran sur les questions de fonds qui motivent la course à la bombe atomique, et on doit se préparer à un nouvel incident provoqué par les gardiens de la Révolution dans le Détroit d'Ormuz pour marquer leur périmètre de pouvoir en Iran même. Entretemps le taux d'enrichissement de l'uranium monte (selon AIEA).

S'il peut se réjouir de l'éviction provisoire de Matteo Salvini de la sphère politique italienne, Emmanuel Macron comprendra vite que tout commentaire, conseil ou reproche de sa part déclenchera un revers cinglant, la Casta ayant appris à nous détester ! Restent l'Europe et le Brexit. Angela Merkel est en soins palliatifs et son premier souci (en a-t-elle deux ?) est de protéger l'économie allemande ; aussi est-elle prête à tout accommodement avec les Etats-Unis et la Grande-Bretagne pour la prospérité de la Deutschland AG. Boris Johnson l'a compris qui, s'il est intelligent, va placer le coin entre Paris et Berlin lors de la renégociation de l'accord de divorce à 35-39 milliards de livres sterling !

A l'intérieur, on prépare la "rentrée" avec tous les marronniers de circonstance, et je viens d'apprendre que le cirque des retraites Delevoye va sillonner la France des grands débats pendant un an. Pour meubler, on va relancer les disputes sociétales (PMA+) et écologiques. On tiendra bien jusqu'aux élections municipales qui seront le grand défi de LaREM. Le parti présidentiel va-t-il s'ancrer au sol ou non ? Les propagandistes de l'Elysée sont à la manœuvre partout en France mais surtout dans les municipalités tenues par le parti des Républicains en liquéfaction rapide. Il faut ramasser les noyés et brusquer les sortants indécis : avec nous, c'est la vie, contre nous, c'est l'EHPAD ! Peut-être qu'à la fin, de reculades en apaisements et compensations, la seule chose qui restera du (premier?) quinquennat Macron sera la pulvérisation du paysage politique français, non pas tant dans l'incinération des vieilles biques que dans sa recomposition sur des logiciels revus et pilotés par le pouvoir central. Une sorte de contrôle social hégémonique de la strate élue. Très fort le stagiaire ! Restera à construire une idéologie compréhensible par le souverain peuple. Vu le niveau politique atterrant du souverain, ce n'est pas gagné !

Après Biarritz, la comédie du pouvoir continue donc. On est en "démocratie".