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Il est minuit Docteur Tsaï !


Le camp de la liberté a gagné les élections de Taiwan avec une meilleure mobilisation de la jeunesse épouvantée par la répression communiste à Hong Kong et celle moins connue des minorités aborigènes de l'île outrées du sort fait aux Ouighours du Turkestan chinois. Le gauleiter du Guomintang Han Kuo-yu va-t-il retourner à sa mairie de Kaoshiung après une sévère perte de face ? C'est la question que le peuple en liesse ne se pose pas.

Tsai Ing-wen (c'est la Wikipedia qui en parle le mieux) avait subi l'érosion de tous les dirigeants démocratiques, assaillis d'intérêts particuliers qu'ils ne peuvent satisfaire tous. Les Taïwanais vivaient leur démocratie à l'occidentale, demandant toujours plus et une juteuse embellie économique inter-chinoise. Ce qui laissait croire que le Guomintang, toujours le parti de la réunification - retrouvait des couleurs et devait facilement gagner. Jusqu'à ce que les gens s'aperçoivent que les libertés acquises étaient précarisées par la doxa continentale et que la démocratie dont on ne voyait pas les effets positifs, pouvait tout simplement mourir dans un rapprochement avec le Parti communiste chinois. D'où la réaction.

Le mot qui résume tout dans les émissions post-électorales ce soir est celui de "démocratie" parce qu'il est blasphématoire en Chine populaire. La présidente réélue tend la main au pouvoir chinois pour apaiser les tensions dans le Détroit, expression qui couvre toutes les dissensions politiques et économiques entre la petite Chine nationaliste et l'énorme Chine communiste. Xi Jinping entendra-t-il raison ? Rien n'est moins sûr.
Dans son hubris despotique, l'empereur revenu - il ne lui manque en réalité que le titre - ne pourra accepter aucune déviation de la sacro-sainte ligne politique, même pour de mutuels bénéfices, alors que ses prédécesseurs avaient mis beaucoup d'eau dans leur vin pour faciliter les échanges entre les deux provinces sœurs que sont le Foukien et Formose, les deux parlant la même langue, le hokkien. La vie était devenue normale pour les uns et les autres et un flux continu de touristes continentaux ne cessait de croître, la curiosité à l'égard de la Chine ancienne l'emportant sur toute autre considération patriotique. Pékin a coupé le flux des voyages individuels en 2016 pour punir le cabrage de la présidente de l'île rebelle, n'autorisant plus que les voyages organisés (par le Parti). Le motif secondaire était la masse d'éloges rapportés du voyage par des centaines de milliers de Chinois originaires des cinquante villes délivrant des visas pour Taïwan. Assez impressionnés par le calme au quotidien, la gentillesse naturelle des gens et les libertés publiques, ces voyageurs diffusaient des idées malsaines à leur retour à la maison. Depuis cette attaque économique sous la ceinture, Taïwan a fait plus largement la promotion touristique du pays en Asie et en Océanie ; sa fréquentation a atteint des records, compensant le recul chinois.

Les bisounours de la diplomatie consensuelle s'attendent à un apaisement pragmatique sur le Détroit, ce qui indirectement détendrait les crispations en Mer de Chine méridionale où les riverains commencent à s'agacer de la morgue chinoise. Mais une analyse plus fine, tenant compte des défis intérieurs, conduit à anticiper un renforcement de l'hostilité communiste, les principes marxistes-léninistes ne pouvant plier devant les réalités mercantiles, et pis encore, devant cette horreur occidentale qu'est le simple bon sens !

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