mercredi 13 janvier 2021

L'ire du parti de l'âne

gravure de l'âne à la peau de lion
L'Âne vêtu d'une peau de lion de Jean de La Fontaine

Sommé de déclencher l'article 25 pour que le président Trump soit déclaré hospitalisable en urgence, Mike Pence a répondu non à Nancy Pelosi avec une hauteur de vue qui commençait à manquer dans le marais politicien de Washington : « La semaine dernière, je n'ai pas cédé à la pression pour exercer mon pouvoir au-delà de mon autorité constitutionnelle afin de déterminer le résultat de l'élection, et je ne céderai pas maintenant à la tentative de la Chambre des représentants de jouer à des jeux politiques à un moment si grave. Je vous exhorte, ainsi que tous les membres du Congrès, à éviter toute action qui diviserait plus profondément. Œuvrez avec nous pour calmer les esprits et rassembler notre pays tandis que nous nous préparons à investir Joe Biden comme le prochain président des États-Unis le 20 janvier. »

Cela n'empêchera pas le Parti démocrate d'ouvrir aujourd'hui une procédure de destitution à six jours de la fin du mandat présidentiel. On a déjà compris qu'il ne s'agissait pas tant de hâter la sortie du vieux clown, que de l'humilier publiquement et lui retirer tout avenir politique ensuite, malgré son âge canonique. Mais comme souvent avec la caste progressiste, la courte vue est de rigueur et les excités de la chambre basse ne voient pas les conséquences d'une succession d'avanies contre un homme politique finissant sur un score de 74223744 voix !! La carte des résultats par comtés ci-dessous nous montre que le cœur du réacteur républicain est au centre du pays, rejetant sur les côtes les masses "démocrates". En cas de crise grave à tendance séditieuse, le territoire des Etats-Unis n'est pas vraiment gérable sans passer en force et encore.

carte des élections 2020 aux USA
Pourquoi dès lors jeter de l'huile sur le feu de la fraude gigantesque* que les électeurs du GOP ont majoritairement intégré dans leur schéma mental ? Sans doute est-ce la soif de justice au débit d'autrui, l'adversaire, l'ennemi, qui gouverne les pulsions politiques du parti de la revanche. L'élimination d'Hillary Clinton par un personnage aussi grossier dans ses manières et son bagage intellectuel que Donald Trump ne fut pas digérée dans le camp démocrate qui voyait s'enfuir les juteuses positions promises par les sondeurs. Qu'Hillary soit une personne non recommendable, avec un tempérament de sous-maîtresse de maison, experte en magouilles et relations sulfureuses, ne pouvait justifier son élimination ! Mais que ce salaud de Trump ait eu l'audace de réussir son programme, pas tout à fait sur le Rio Grande certes, mais généralement en économie et dans les affaires étrangères les plus indémerdables, faisait pâlir de honte les professionnels de l'atermoiement ! Ce succès était furonculaire parce qu'issu d'un non-initié ! Les Démocrates veulent maintenant aller au bout de leur revanche, écraser l'intrus, quitte à mettre certains Etats à feu et à sang puisque ce sera toujours de la faute de l'autre !
* ayant déclenché une batterie de soupçons dans les Etats-clés, qui n'ont pas été convertis en preuves irréfutables


Quand Donald Trump fut élu en 2016, j'avais fait part de ma surprise à un ami plus versé que moi dans la politique américaine. Il m'avait répondu que Trump venait de casser le consensus politicien de Washington et que cela ne lui serait jamais pardonné. J'ignorais alors comment, je vois aujourd'hui l'accomplissement de la prédiction. Les deux camps se forment et bien malin qui sait de quel côté vont se ranger les pouvoirs publics des Etats rouges en cas d'insurrection. Que font les agences fédérales actuellement pour aider à contenir la colère des Républicains ? La procédure démocrate d'humiliation du champion battu ne va pas les aider à y voir clair, encore moins à obtenir "sans reproches ni murmures" le concours des polices locales à maintenir l'ordre et protéger les "gagnants".
Reste à discuter le droit extravagant des plateformes numériques à faire taire qui leur déplaît. Mais de cela, nul au pouvoir nulle part ne se plaindra ! Du bout des lèvres un peu, pour les archives !

4 commentaires:

  1. Si les tweets de Donald Trump incitant à l'assaut ne sont plus accessibles en ligne, l'adresse aux partisans, qui fut décisive pour sa destitution, a été prononcée devant la Maison Blanche le matin du 6 janvier avant le sac du Capitole, et dans les colonnes du Canard Enchaîné David Fontaine nous en passe traduction :

    "Nous allons marcher vers le Capitole [...] parce que vous ne reprendrez jamais votre pays en étant faibles, vous devez montrer votre force [...]! Vous allez avoir un président illégitime, nous ne pouvons pas laisser cela se produire [...]. Alors descendons Pennsylvania Avenue !"

    Il n'aurait dit que ça, c'était bien suffisant et il a dit bien plus à ce que j'ai vu en live. Curieusement, il ne semble pas préoccupé par le procès annoncé au Sénat mais bien plus par les moyens nécessaires à renouer le fil numérique avec ses nombreux partisans par tout réseau alternatif depuis que Twitter et Cie l'ont banni. Le clavier incendiaire du smartphone lui manque. Se rend-il compte de sa situation ? Le doute est permis.
    Quel naufrage !

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  2. PPS:
    Je m'étais précipité sur les bonnes feuilles du bouquin de John Bolton sur son passage à la Maison Blanche puis avais fait le refus d'obstacle à la commande de l'ouvrage quand j'avais compris que ce n'était qu'un plaidoyer pro domo à la gloire d'un grand "incompris". Mais avec Rex Tillerson, c'est autre chose. Bien que Bolton l'ait débiné au simple motif qu'il ne descendait pas assez souvent dans les étages sous le sien au Département d'Etat, l'expérience du patron d'Exxon-Mobil, mis au service d'un grand imprécateur de la téléréalité, ne pouvait que me plaire, sauf que Tillerson n'a pas écrit de bouquin ; en fait, il n'en a pas besoin pour se faire des amis.
    Mais il a accordé un entretien à Foreign Policy que je vous engage à lire (ce n'est pas long) en cliquant ici. Il n'est pas méchant, il ne lui en veut pas, c'est factuel. L'incapacité de concentration et d'analyse de Donald Trump qui ne réagissait qu'aux images, son absolue confiance en son jugement primaire (infantile ?) vis à vis de la Corée du Nord, de la Chine, de la Russie et de ses "alliés", augurait une catastrophe lors d'un second mandat. Mais dois-je rappeler que sous le mandat de Bush Junior, les observateurs se moquaient déjà de son incapacité à finir un dossier de... 2 (deux) pages ! Passons, c'est l'Amérique - "la barbarie éclairée au gaz", disait le jeune Winston Churchill au retour d'un voyage ! Ce qui est intéressant (pour moi) c'est cette triple conviction de Rex Tillerson à propos du Parti communiste chinois :
    (1) Les Etats-unis et la Chine populaire sont sur une route de collision qui déclenchera la guerre (sa conviction remonte à ses fonctions chez Exxon)
    (2) Les stratèges chinois misent tout sur l'écoeurement démocratique américain aux premiers morts de la "collision". Taïwan méritera-t-elle autant de vies de nos boys ?
    (3) La page d'histoire écrite par Xi Jinping comprend le rattachement de Taïwan à la République populaire de Chine quoiqu'il en coûte.

    Reste à lire une description inédite du caractère de Vladimir Poutine que je partage aussi.

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    1. Rex Tillerson ne comprend pas pourquoi Trump dénigrait ses alliés? En ce qui concerne la France, son diagnostique sur Macron était parfaitement exact: "Tout ce qu'il touche devient de la merde". Pas si con le Donald. On est quand même quelques millions ici à lui donner raison sur ce point. Et le "Vous ne reprendrez jamais votre pays en restant faibles" ne s'adresse pas qu'aux américain. Trump confine à l'universel, c'est pour ça qu'on l'aime :-)

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    2. Je crois que Trump a cultivé un rôle de "biznessman" avec ses alliés, réduisant la relation à leurs seules contributions aux dépenses d'armement de l'Alliance atlantique qu'il estime insuffisantes. Il a raison, sauf à considérer que les Alliés paient aussi à travers les commandes d'armes au complexe militaro-industriel américain.
      Que la France et l'Allemagne développent un char commun (Le RU va les rejoindre) et un système de combat aérien du futur qui concurrencera le F35 n'a pu que lui déplaire. L'équipe Biden ne changera pas grand chose au fait que l'industrie européenne d'armement monte en puissance et en gamme. Qui aurait cru il y a 10 ans que l'Espagne construirait un porte-avions turc ?

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