Idriss Déby, maréchal-président du Tchad, a été mortellement touché hier lors d'un accrochage de son armée avec les rebelles du FACT, Front pour l’alternance et la concorde, à Nokou (300km nord de N'Djamena). La fiche Wikipedia cerne le personnage hors du commun, et les officines spécialisées nous donneront le RETEX demain. Charité bien ordonnée nous invite à évaluer l'impact sur l'efficacité de l'opération Barkhane au Sahel et Le Télégramme propose un raccourci où il y a tout : « Contestée au Sahel, la présence militaire (de la France) risque, comme, en 2019, après le bombardement des Mirage, de l’être ouvertement au Tchad, maintenant que Déby est mort. Un de ses fils, général 4-étoiles à 37 ans, commandant la Garde présidentielle, a été désigné chef d’État par intérim par un conseil militaire qui a promulgué une "charte de transition", dissout le gouvernement et l’Assemblée nationale en annonçant des élections dans dix-huit mois. Barkhane et son état-major établi à N’Djamena se retrouvent du jour au lendemain, allié d’une junte sur la défensive, qui n’a pas la légitimité du président défunt, qui était déjà très contesté, sinon haï, sans que le gouvernement français en tienne compte. Du coup, les autorités françaises risquent d’être accusées par la population de soutenir la dynastie Déby et les militaires tchadiens désormais au pouvoir, plus enclins à renforcer leurs effectifs pour le garder en cas d‘émeutes, plutôt que disperser ses troupes à l’extérieur du pays pour mener une guerre contre le terrorisme qui n’est peut-être plus leur priorité ».
L'armée tchadienne d'Idriss Déby a été jusqu'ici le meilleur soutien de la force Barkhane parce qu'elle se bat depuis assez longtemps pour avoir accumulé expérience et résilience, et parce qu'elle a été formée pour l'attaque. Le niveau de ses cadres est assez élevé comme le moral de ses soldats. Feu son chef, qui, dit en passant, avait fait l'Ecole de Guerre de Paris, était plus controversé dans le domaine politique pour être dans le top ten des autocrates africains. Difficile de juger le soldat-président Déby sur un clavier tout-confort. Il était réputé pour sa poigne de fer, mais quand on sait de quoi est constitué ce pays, immense et pauvre, peuplé de tribus guerrières jalouses, qui en ont toujours moins que ce qu'elles voient chez le voisin, on peut aussi comprendre la méthode.
Le FACT est une milice gorane de la valeur d'un régiment qui fut engagée dans les combats de Misrata en Libye à côté du groupe Wagner et qui casernait au Fezzan avant de décider de renverser le président, candidat à sa réélection pour un sixième mandat après trente ans de pouvoir ! Ses unités qui ont connu le feu, sont armées sur les stocks libyens et réputées bien équipées. C'est au jour de la proclamation de sa victoire électorale qu'Idriss Déby a perdu la vie. Chef de guerre depuis qu'il reçut jadis de Hissène Habré le commandement des forces armées du Nord, il est resté un homme de l'avant. Très peu de chef d'Etat s'exposent physiquement comme il le faisait, et pour ce qui nous concerne, le dernier des nôtres fut sans doute Napoléon III à Sedan. Depuis lors, nos chefs préservent la fonction, ce qui n'empêche pas certains de crier d'un voix de fausset à leur chef d'état-major pas content : « Ze suis votre Sef !». Il en va de même de grosses pointures capables de battre un ours bourré à mains nues pour la caméra ou même de jouer à la horde sauvage sur la route de Sotchi, mais que l'on ne voit jamais sur le front. Samedi dernier nous évoquions le prince Philip dans son album de marine qui fut, lors de la seconde guerre mondiale, de ceux qui ne firent pas semblant ! Idriss Déby ne faisait pas semblant, un homme vrai mais un grand fauve aussi.
(ma dernière pucelle) |
Comme le suggère l'article du Télégramme, si le pilier tchadien de Barkhane s'effondre, c'est tout le dispositif G5-Sahel qui le suit. Macron se mordra les doigts d'avoir refusé d'attaquer la colonne des FACT parce que le pays était en campagne électorale et qu'il ne voulait pas entrer dans le processus "démocratique" ! Bravo, il a le coup d'Etat du fils Déby qui prend l'intérim à la place du président de l'Assemblée nationale et le chaos est annoncé.
RépondreSupprimerRené (d'Anduze)
Merci de votre commentaire avisé. La France, le cul entre deux chaises comme souvent lorsque son président a la mentalité d'un "civil".
SupprimerLes premiers retours infirment le communiqué officiel de l'état-major tchadien sans pour autant en contredire le verbatim. On consultera avec profit Wassim Nsar ou sinon sur le fond de l'affaire, Bernard Lugan.
RépondreSupprimer