« Stand Tall ! »
L'injonction a paru dans tous les journaux du Sud-Est asiatique. Il restera un slogan fameux appartenant à l'histoire de la normalisation de Hong Kong dans les fers de la République populaire de Chine. Depuis sa prison de Laïhong, le tycoon de presse Jimmy Lai (Giordano, Next Digital, Apple Daily) envoie une lettre d'encouragement et de prudence aux journalistes de sa rédaction, lettre écrite à la main en chinois. Enfermé depuis le 10 août 2020 dans l'attente de sa comparution pour des chefs d'accusation offerts au pouvoir par la loi scélérate de sécurité nationale (qui permet d'arrêter n'importe qui pour n'importe quoi), Li Zhiying, son nom judiciaire en mandarin, a formulé ses dernières recommandations qui s'adressent plus largement au parti jaune* de Hong Kong, celui qui résiste à l'imperium continental au seul cri de "On est chez nous !". Les pétainistes sont les Bleus.
« Hong Kong's situation is increasingly chilling, but precisely because of that, we need to love and cherish ourselves more... The era is falling apart before us and it is time for us to stand tall and keep our heads high... As long as we are not blinded by unjust temptations, as long as we do not let the evil get its way through us, we are fulfilling our responsibility...»
Jimmy Lai (ou Lai Chee-Ying) naquit le 8 décembre 1947 à Canton en République de Chine (ROC) dans une famille aisée qui subit la prise de pouvoir des communistes en 1949, sa mère ayant été déportée dans un camp de travail. Porteur de bagages à la gare dès l'âge de 9 ans pour pouvoir manger, il choisit de s'enfuir à 12 ans par le fleuve vers Hong Kong où il travailla clandestinement chez un confectionneur de gants de laine pour une poignée de dollars. Infatigable et intelligent, il accéda à la direction de l'usine à l'âge de 20 ans. Puis il misa ses économies en bourse et réinvestit ses gains dans l'achat d'une usine en faillite, la Comitex. Il lança sa propre affaire de sweatshirts à 26 ans à destination de revendeurs américains. Puis vint la création de la marque Giordano etc etc... jusqu'au Apple Daily, le tabloïd impertinent en langue cantonaise. Le cardinal Joseph Zen, présentement évêque émérite de Hong Kong, le baptisa dans la religion catholique en 1997, l'année où la colonie britannique fut rendue à la Chine. Il a aujourd'hui 73 ans.
Ce billet n'a pas la prétention d'expliquer les déboires (clic) de Jimmy Lai causés par sa résistance opiniâtre contre la mise au pas communiste d'un pays libre qui lui a tout donné. C'est d'ailleurs le motif qu'il a opposé à ceux qui lui demandaient de s'exiler au Royaume-Uni ou ailleurs dans le Commonwealth pour sauver sa liberté : "je suis un va-nu-pied qui est passé de l'enfer au paradis par une nuit sans lune pour réaliser mes talents au pays des libertés. Tout ce que j'ai, amis compris, est ici. Je reste !"
La résistance active et passive des Hongkongais est admirable et peu relatée par nos médiats mainstream, mais ça va changer un peu avec l'oppression chinoise des Ouighours qui salit la réputation des hauts fonctionnaires chinois. Jusqu'ici l'influence des politiciens laqués comme un JP Raffarin, crispé sur ses intérêts personnels - JPR est administrateur de l'équipementier Plastic Omium en Chine populaire - freinait les rédactions qui "comprenaient" que l'ordre revenu à Hong Kong était meilleur pour les affaires et que la répression des insoumis avait le soutien de la "majorité silencieuse".
C'est faux bien sûr, manifestations monstres et élections locales l'ont démontré. Plus d'un million de mécontents de tous âges draînés par le mouvement Pro-democracy dans les parcs et avenues de la ville ont fait de belles images et réchauffèrent les cœurs, mais c'est la résistance passive qui est la plus admirable. Au moindre soupçon de collusion avec le parti jaune*, l'arrestation de commerçants à tout motif punissable comme des délits mineurs d'étiquettage ou de paperasse comptable, par ce qu'on pourrait appeler maintenant une Gestapo omniprésente, déclenche chaque fois une ruée d'acheteurs dans la boutique ou chez les enseignes visées, à tel point qu'on a vu sur Nathan Road des queues d'une heure sur le trottoir de gens ayant fait leurs emplettes, ressortant avec leur panier de courses et prendre la file pour passer en caisse !!! C'est pareil pour tout restaurateur dénoncé par un bleu* pour non-conformité de quelque chose tant dans ses affaires que dans ses propos séditieux ; aussitôt arrêté, la ruée vers sa boutique se déclenche pour noyer de dollars la caisse-enregistreuse. Civique et libre dans sa tête depuis l'époque anglaise, le peuple hongkongais lutte avec tous ses moyens et ne semble pas disposé à laisser sa place aux familles continentales qui attendent leur tour pour goûter aux libertés résiduelles qui n'existent plus en Chine populaire. D'ailleurs, au moindre soupçon, les comptes bancaires sont bloqués, les tranferts inopérants, les cartes de paiement en panne. Il faut toute l'ingéniosité génétique de ces gens pour sortir quand même du territoire à la barbe des autorités communistes qui ont tout infiltré.
Le seul impact positif de l'oppression chinoise à Hong Kong est le contrôle des neufs triades majeures (clic), depuis que les gangs affiliés au Parti ont repris les affaires. Dans un port de l'importance de Hong Kong, qui tient les docks tient tout. On y verra bientôt des limousines "conduite à gauche" chariant de "gros pardessus" !
* Les pro-democracy sont les Jaunes, les pro-Pékin sont les Bleus.
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