lundi 17 mai 2021

La bataille de Gaza

Tour Jala Gaza

Le monde a eu le souffle coupé par la déconstruction sur les écrans télé de la Tour Jala abritant l'Associated Press et la chaîne qatari al-Jézira à Gaza. Le motif de l'occupation des sous-sols par les activistes du Hamas n'est pas douteux, ces gens étant depuis toujours adeptes du bouclier humain. On monte les roquettes sous les écoles, les mosquées, les dispensaires. Tsahal a eu l'élégance de prévenir par téléphone que le site allait être rasé dans l'heure. Dont acte.

Savoir qui a commencé cette bataille, c'est perdre son temps ! Vers la fin de cette décennie la guerre fêtera ses cent ans puisque le pogrom d'Hébron fut perpétré en 1929 sous le mandat britannique.

Mais, comme il en fut au cours de "notre" guerre de Cent Ans, il peut y avoir des respirations, en musique on dirait un soupir, en météo des intervalles (quand le soleil brille), et ces moments ne devraient pas être gâchés par le harcèlement permanent des Palestiniens établis sur un mauvais cadastre ottoman par les colons iraéliens radicaux, comme on l'a vu une fois encore dans le quartier de Sheikh Jarrah à Jérusalem-Est au début de ce mois.
Mais est-ce encore utile de s'en préoccuper ?

La coexistence, et la collaboration économique qu'elle induisait entre citoyens israéliens arabes et juifs, est en phase terminale. La peur d'autrui est entrée dans les villes mixtes, et comme dans nos banlieues françaises, l'exode des uns va croiser l'exode des autres, une manière d'épuration ethnique contre laquelle aucune proclamation ne tient !

L'autre conséquence du désordre actuel est l'enterrement du projet à deux Etats. La Cisjordanie, qui est une prise de guerre du Fatah qui s'en repaît, ne peut être gouvernée par un Etat indépendant contre le vœu du voisin tout-puissant. Le Likoud soutenu par une majorité de citoyens juifs refusent les accords d'Oslo et la "solution". Mais en réalité, l'OLP ne peut pas gérer un territoire enclavé, mité par la colonisation juive et dont la ressource hydrique lui échappe en totalité. Le seul territoire palestinien capable de s'en sortir en étant indépendant, c'est la bande de Gaza qui a tous les atouts pour former une principauté philistine développée et prospère, après incinération complète du Hamas et du Djihad islamique, s'entend ! C'est en cours. Et peut-être que sur le Golfe persique, les sheikhs observent avec intérêt cette destruction d'un furocle iranien en terre sunnite, qui ouvrirait l'espace à de juteux investissements sur la dernière "échelle" du Levant.

Ceci ne résoud pas le dilemme cisjordanien. Le territoire occupé ne peut être annexé pour une raison démographique, ne peut être rendu au roi de Jordanie qui n'en veut pas, ne peut être décolonisé sauf à la marge, ne peut continuer longtemps comme un bantoustan... Dans un prochain numéro, nous soumettrons aux Nations Unies l'interdiction générale des religions et le pinard obligatoire.




La minute stratégique


Si le Hamas ressort vivant de la séquence, même diminué, il aura remporté trois victoires :
1.- Par tout le Moyen Orient, la Rue arabe, chauffée par les chaînes islamiques, va détester la normalisation offerte par les Accords d'Abraham au détriment de l'Autorité palestinienne impotente et bafouée ;
2.- Le consensus démocratique contraint entre Arabes et Juifs israéliens, qui avait abouti à l'entrée d'un parti arabe à la Knesset, aura volé en éclat au niveau de la rue ;
3.- Le silence de Mahmoud Abbas donne aux Palestiniens radicaux l'argument d'une pétainisation de l'Autorité palestinienne avant les élections générales.

Si le Hamas succombe et disparaît des écrans, il aura remporté une quatrième victoire confortant les trois autres : il entrera dans le martyrologue islamique.

Netanyahou n'a pas anticipé les conséquences directes de l'affrontement, sinon il aurait apaisé les points de friction après les Accords d'Abraham, surtout dans le domaine de la colonisation des territoires occupés, en faisant rapporter les lois israéliennes de captation du foncier vacant. Au lieu de quoi il a paradé comme s'il avait remporté la victoire finale et laissé la bride sur le cou des enragés. C'est un politicien du niveau du Sentier !

8 commentaires:

  1. Netanyahou est un con,
    ce qui n'empêche pas d'être élu !
    René

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  2. L'ermite du gave21 mai 2021 à 21:30

    Soyons circonspects dans nos jugements: un "con" qui est réélu sans arrêt depuis 2009 (après une période de "rodage" de 1996 à 1999) dans un pays qui pratique la proportionnelle intégrale, n'est peut-être pas si bête. Quant à sa politique, elle ne nous convient pas à nous, ici, je suis d'accord. Mais qu'en serait-il si nous vivions là-bas? Quand je constate le degré d'acceptation des mesures prises ici pour protéger la population contre les attaques du Covid-19, je comprends le plébiscite en faveur de Netanyahou, qui doit gérer le Covid-19 ET les roquettes du Hamas.
    Par ailleurs, il faut se souvenir que celui-ci est considéré comme une organisation terroriste par bon nombre de pays et par l'Europe des 27. Lorsqu'il renoncera officiellement à la destruction de l'état d'Israël et au terrorisme, peut-être que la politique israélienne évoluera. Pour ma part, j'espère que les accords d'Abraham vont donner des résultats dans la région: pétrodollars du Golfe plus ingénierie israélienne, c'est peut-être la naissance (compliquée?) d'une Suisse moyen-orientale.
    Merci Donald!

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    1. Nétanyahou n'est pas un con mais n'a aucune finesse d'esprit. Réélu ? Oui, c'est aussi le défi qu'affronte Israël, celui de voir réélire un politicien très moyen, mais habile et entouré. Reste qu'il n'a pas compris les accords d'Abraham qui enterraient les deux autorités palestiniennes et lui ouvraient un boulevard pour régler la question à sa façon (développement à marche forcée) avec l'appui jusque là inespéré des pays arabes voisins. qui en ont soupé ! Il suffisait de lever le pied sur la colonisation et mettre sous le boisseau les lois iniques sur le foncier "vacant" qui alimentent l'humiliation des résidents palestiniens.
      Le Hamas ne viendra pas à récipiscence, sauf à mourir. N'oublions pas qu'il fut à l'origine une création du Shin Bet dans le but de pourrir la vie de Yasser Arafat. Ça a marché, jusqu'à ce que les Pasdaran iraniens poussent des roquettes dans les tunnels.
      Aujourd'hui le Hamas a gagné la séquence (voir la minute stratégique ci-dessus) et accroît le chaos.

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    2. L'ermite du gave22 mai 2021 à 13:20

      Les Israéliens, malheureusement, ne sont pas les seuls à devoir déplorer le manque de finesse de leurs hommes politiques! L'élection ou la réélection de types très ordinaires dans la plupart des démocraties (y compris celles considérées comme "grandes") est un bon indicateur du niveau d'(in)culture politique des populations concernées.
      Reste que le choix du Hamas n'est pas de construire un début de pays où sa population vivrait dans la sérénité, mais d'entretenir ce chaos, d'une part pour se maintenir au pouvoir face à l'Autorité palestinienne et pour des raisons bassement matérielles d'autre part. Et qui finance le Hamas? La Turquie, le Qatar et l'Iran, principalement. Et pourquoi?
      Tout ça ne justifie peut-être pas la colonisation. Mais elle peut l'expliquer: le mitage (et la militarisation) des territoires qui sont à quelques kilomètres des principales villes du pays, facilite la défense de celui-ci: car avec 470 km de long, 130 km entre Gaza et la Jordanie, une quinzaine entre la mer et la Cisjordanie (20 000km carrés, moins que PACA!) c'est compliqué.
      Ceux qui ont gagné, ce sont ceux qui instrumentalisent ce conflit. Je ne suis pas sûr que Netanyahou en fasse partie.
      La fin du conflit, la coexistence pacifique, et la collaboration (économique et culturelle, dans un seul ou deux états, peu importe) des deux peuples , ne pourra s'envisager que lorsque TOUS les pays musulmans reconnaîtront, à Israël, le droit d’exister.

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    3. C'est pour cette raison que la démarche de Jared Kushner qui a abouti à ce que l'on sait, est exemplaire de la voie à suivre pour en finir une bonne fois. Je ne vois aucune autre issue au différend que la mutualisation des intérêts économiques et militaires contre l'Iran - ce qui explique pourquoi les proxis Hamas et Hezbollah ont mis le souk - mais la Turquie veut jouer sa partition, se prenant pour la Chine de Méditerranée orientale.

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  3. Dans le Guardian de ce matin, s'étale une analyse comparée des apartheids et de la vertu du boycott qui plia le régime sud-africain. Mais on en extrait ce court paragraphe qui cible l'inacceptable humiliation des résidents arabes, mesure que nous dénonçons parce qu'elle est inhumaine, contre-productive et ne rapporte rien :
    "Israel has worked hard to keep the focus on Hamas and it routinely disparages critics by asking why they are “singling out” the Jewish state when its Arab neighbours are less democratic and more oppressive. But the events of recent weeks have shown the extent to which that tactic is increasingly ineffective, particularly amid international criticism of the forced removal of Palestinians from their homes to make way for Jews in East Jerusalem."

    Ce pillage légal sera le pivot de la condamnation universelle d'Eretz Israel qui se construit actuellement par un battage sans précédent, ce qui est de bonne guerre.

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    1. L'ermite du gave16 juin 2021 à 12:05

      Voilà, c'est fait, Netanyahou est "viré"! Quand on voit par qui son gouvernement et lui-même sont remplacés, il n'est pas certain que ce soit un mieux, ni pour le pays, ni pour la région.
      La seule issue, je le redis, c'est la reconnaissance d'Israël par tous les pays musulmans et l'arrêt des soutiens au Hamas et au Hezbollah. C'est le seul moyen pour que les Américains exercent une réelle pression sur le gouvernement israélien en place (quel qu'il soit) et ne l'oblige à revoir sa politique. En attendant, à l'est, rien de nouveau.

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    2. La reconnaissance arabe n'est pas loin si le problème des colons enragés peut être réglé un fois pour toutes. Netantayu et ses "supporters" vont maintenant pourrir la vie à la nouvelle coalition. C'est leur seule feuille de route et ça a commencé avec la provocation des nationalistes israéliens dans les quartiers palestiniens de Jérusalem-est.
      Rien que pour ça, on peut se féliciter d'avoir jeté un premier ministre douteux et pas vraiment intelligent. Il devrait rentrer à New York !

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