Le trésor de Taïwan n'est pas le butin caché du Kuomintang qui, dans sa retraite en 1949, aurait emporté avec lui deux cents tonnes d'or du continent selon le tabloïd Global Times. Le trésor de Taïwan, c'est une géographie exceptionnelle et ses peuples certes, mais aussi des villes de légende comme Taïnan !
Au flanc sud-ouest de l'île en Mer de Chine méridionale, sous l'archipel des Pescadores, se trouve l'ancienne capitale de Formose. C'est une métropole très active de la taille de Bordeaux, mais la Garonne s'appelle An-Ping River. Taïnan a la particularité d'abriter trois cents temples et quatre fois plus de chapelles-boutiques dédiées au commerce des grâces divines, dans le droit fil de la relation donnant-donnant entre le mortel que nous sommes et le dieu ou la déesse invoqué. Mais personne ne les a comptés. Y en aurait-il cinquante qu'un guide de voyage s'y serait mis, mais seize cents ! Les guides citent le vieux temple de Confucius ; le temple très couru de Matsu, la déesse de la mer (et des pêcheurs) ; le temple de Wufei qui veille sur les sépultures des concubines et les ennuques du prince Zhu Shugui qui se tuèrent tous pour ne pas passer sous la domination de la dynastie mandchoue. Chacun de ces temples a son histoire et il vous faudra plus d'une journée pour épuiser ce chapitre. Mais Taïnan n'est pas que cela.
Le site fut au départ celui d'un comptoir de commerce où les capitaines chinois et japonais venaient trafiquer des peaux et diverses denrées avec les aborigènes établis là depuis trente mille ans au moins. Puis les Hollandais structurèrent l'espace au XVIIè siècle et le mirent en défense pour en faire la capitale de leur colonisation côtière. Ont subsisté de cette époque le Fort Provintia et la forteresse Zeelandia (Anping). Vint ensuite le légendaire Koxinga, capitaine de pirates-marchands chinois, né au Japon, ayant conçu le projet d'arracher la Chine du sud aux griffes des Tsings mandchous pour la remettre aux Mings. Après des succès mitigés au Foukien, il débarque avec vingt-cinq mille hommes à Formose pour prendre l'île à la Compagnie des Indes néerlandaises et en faire sa base arrière. Il y parviendra en 1662 et d'une certaine façon créera une nation taïwanaise. Sa page Wikipedia vaut le détour. L'empire mandchou délaissera Taïnan la rebelle pour Taïpeh en 1886, avant de perdre l'île de Formose au traité sino-nippon de Shimonoseki (1895).
Taïnan a conservé la double influence sino-nippone - les Japonais l'administreront durant cinquante ans (1895-1945) pour la moderniser - et la ville est très caractéristique de cette différence marquée d'avec la Chine populaire actuelle, rutilante et fliquée à mort tout à la fois. Taïnan est plus "accessible" que Taïpeh dont la démesure (presque dix millions d'habitants dans l'agglomération) et la pulsation continue peuvent parfois fatiguer l'Occidental.
Trois trucs à faire parmi cent :
- Les sources chaudes de Guanziling dans la montagne, une vraie thalassothérapie de boue. On termine la cure du jour par la visite rassérénante du temple Huoshan Biyun où brûle une flamme naturelle depuis plus de deux cents ans.
- Les salines de Jing Zai Jiao, à moins que vous n'ayez déjà fait Noirmoutier et Guérande.
- Le lac artificiel de Wushantou où l'on a eu le bon goût d'édifier une statue en hommage à l'hydraulicien japonais maître d'oeuvre de ce grand projet d'irrigation dans les années 20.
Bien sûr, on peut aussi aller se prendre en photo devant le drapeau nationaliste de la République de Chine sur le destroyer DDG-925 TeYang amarré au port de Anping. Et sur la plage, on pratique le surfcasting. Eh oui : si vous êtes entraîné, vous vous ferez une tonne d'amis, la meilleure façon d'apprendre une ville chinoise ! En hiver, il fait 20°C à Tainan.
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