samedi 23 avril 2005
Les armes bavardes de Benoît XVI
Armes cardinalices de S.E. Ratzinger
Les armoiries de l’archevêque de Munchen u. Freising Ratzinger passent à Benoît XVI. Que nous disent-elles ?
Le Noir couronné, certains le disent Maure, d’autres Nubien, d’autres Ethiopien, est apposé sur les armes des évêques de Freising depuis le Xème siècle. La signification de ce symbole choisi par des princes-évêques bavarois est obscure, surtout avec les cinq signes que sont respectivement le profil européen noir, la couronne royale de rubis, les boucles d’oreille assorties, les lèvres fardées, le col rouge. Il est probable que l’origine de ce symbole quintuple soit perdue. En reprenant les armoiries du comté de Freising, on retrouve cette tête mieux dessinée avec les cinq détails ci-dessus plus une chevelure nettement féminine. Le Maure des armoiries serait-il finalement une belle reine noire ? Nous cherchons encore.
L’ours bâté évoque une légende que l’on prête à saint Corbinien de Freising qui fut le fondateur en 716 d'une église à Freising qu'il renforça par un monastère bénédictin érigé sur une colline proche : un ours dévora le mulet du saint évêque en route pour Rome au passage des Alpes (ou des Abruzzes). L’ours fut dompté par le saint homme et dut porter le bât du mulet contre son gré. Mais arrivé à Rome l’évêque le libéra. Moralité, ne restez pas à Rome avec votre esclave.
Reste la coquille mouillée. Elle raccorde Benoît XVI à saint Augustin. Méditant sur le mystère de la Sainte Trinité, la légende dit qu’il vit un enfant sur la plage jouer avec un coquillage, à l’aide duquel il essayait de puiser l’eau de la mer pour remplir un trou de sable. « Il est plus difficile à ton intelligence de saisir le mystère de Dieu que de transvaser toute la mer dans ce petit trou ». On ne dit pas si le gamin haussa les épaules et continua. Mais Mgr Ratzinger choisit ce symbole pèlerin dans son itinéraire théologique.
Benoît XVI, coopérateur de la vérité.
Tout un programme.
Discussion de la tête de Maure (suite)
La tête de maure portée sur les armes de Benoît XVI provient, nous l'avons dit, des armoiries du diocèse de Freising, mais plus encore des vastes possessions de la goupille (Hochstift) de Freising, leur fief, en ce sens que la tête se retrouve dans les armoiries des villes en apanage comme Skofja Loka en Slovénie, Innichen au Sud Tyrol italien, Wörth, Garmisch-Partenkirchen, et bien d’autres en Bavière.
en Bavière actuelle
en Slovénie actuelle
Il est admis en Allemagne que cette tête représente saint Corbinianus, le fondateur du diocèse de Freising. Avec d’autres plus savants, nous en doutons.
Corbinianus naquit à Paris vers 680 sous le règne de Thierry III, de Waldekisus son père et Corbiniana sa mère. Baptisé du nom de son père, pourquoi prit-il le nom de sa mère plus tard est un mystère de plus ? Sa vie est magique et pleine d’aventures, d’ermitages et de fondations, et sa foi clouée au fer dans son coeur le portera vers la canonisation sans souci. Mais nul n’a jamais remarqué jusqu’à l’écrire quelque part, qu’il était noir ! Peut-être qu’en ces temps bénis à la hache, la couleur de la peau importait si peu qu’on ne la mentionnait pas. Les brassages de l’empire romain avait-il fait flotter le bois d’ébène jusqu’au coeur de l’Europe. Sans doute puisque bien des "Africains" eurent des positions éminentes dans l'empire. Si ce n’est pas Corbinianus nous y revenons ci-dessous.
Que fait la couronne sur sa tête? Son bâton de maréchal ne fut que l’épiscopat et sa canonisation ne pouvait lui apporter de couronne. Il semblerait que les princes-évêques de Freising aient surtout voulu mettre une couronne dans leurs armoiries pour bien signifier que leur Hochstift relevait directement de l’empereur et pas une minute du duc de Bavière. D’ailleurs le diocèse de Freising n’intègrera la Bavière qu’en 1803, trois ans avant la chute du Saint Empire.
Les hypothèses suivantes ne sont pas départagées :
1. La tête serait celle du roi-mage Gaspard. Des trois rois accourus, Gaspard représente l'Asie. Il est noir, jeune, imberbe, et apporte de l'encens qui a une valeur divine. Mais que ferait Gaspard dans les Préalpes bavaroises ?
2. Ce serait une représentation de saint Mauritius, dont le nom dérive du latin maurus et qu’à défaut de pouvoir nommer en héraldique, on a décidé de noircir le visage pour faire parler l’image auprès des âmes simples. Saint Maurice ne semble pas avoir laissé de traces indélébiles à Freising. Mais il fut massacré à la tête de la légion des Thébéens d’extraction chrétienne, non loin de là, en 286 par l’empereur Maximilien Hercule, brute balkanique redoutée, dont il refusa l’ordre de massacrer les chrétiens du lac Léman. 6600 hommes périrent dans cette affaire à Solodorum, château fort sur les rives de l'Arula non loin du Rhin. Le tumulte a très bien pu traverser les siècles dans les Alpes. Les Thébéens venaient d’Asie, comme Gaspard le roi-mage noir. Etait-il noir aussi, peut-être bien !
3. Pourquoi pas saint Zeno, évêque de Vérone martyrisé en 380, représenté le plus souvent en maure parce qu’il venait d’Afrique. Mais on n’établit pas le lien avec le versant nord des Alpes. Il n''est jamais cité dans la Vie des saints au chapitre de Corbinianus.
4. Saint Sigismund (+525), roi vandale de Bourgogne, violent et pieux jusqu'à se faire moine, et plus tard assassiné en sainteté. Ce roi fut d’une certaine importance pour que Charles IV d’Autriche transfère ses reliques à Prague. Il est représenté sur un bois gravé polychrome non daté en compagnie de saint Corbinianus, au pied duquel on aperçoit l’ours de la légende et le blason du maure. Le lien existe donc quelque part bien qu'ils n'aient pu se connaître à cause de l'écart de temps, mais l’énigme du maure demeure.
l'évêque, la Vierge et le roi
5. Avant-dernière hypothèse : la tête de maure représenterait saint Mauritius que Corbinianus aurait mis sur ses armes épiscopales. Elle serait passée à la postérité, et l’image, plutôt exotique en Bavière, aurait été identifiée avec le saint évêque jusqu’à devenir la sienne propre. La scène du bois polychrome ne dirait pas autre chose, Corbinianus, le teint frais à la droite de la Vierge Marie, pose en mitre d'évêque crossé, son écu à tête de maure déposé à ses pieds pour l'identifier.
6. La dernière hypothèse est tout aussi tirée par les cheveux. Le Moyen Age utilisait largement le visuel dans la catéchèse depuis qu’on sait que les églises étaient décorées de scènes bibliques ou catholiques de couleurs vives. Pourquoi n’aurait-on pas décidé un jour de noircir le profil de Corbinianus sur les armoiries de tout le Hochsfit de Freising en associant l’image à la racine latine du nom du saint homme, qui est noire comme le corbeau, Corvus, Corvinus, Corvinianus.
Sur les armes du cardinal-archevêque de Munchen u. Freising actuel, Mgr Friedrich Wetter, le maure est toujours là, mais bien éclairci. Il ne reste plus qu'à soumettre l'énigme au titulaire de la charge ! Votre serviteur pencherait pour la cinquième hypothèse.
Au final, le souverain pontife a simplifié ses armes cardinalices, la coquille est sèche - est-ce un signe ? - et il y a ajouté les clefs vaticanes et le pallium.
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