Roman de gare estival - chapitre 3
Comme signalé déjà, le blogue du Piéton du roi profite de l'été pour publier une séquence musicale de divertissement "païen", célébrant la mer, le sexe et le soleil.
Des pharisiens s'en sont émus, qui considèrent la cause qu'ils s'approprient sans titres, écornée par l'écriture strictement ludique d'une nouvelle de plage, mais la caravane passe. Donc, Alf et Med avaient précédemment conclu avec leurs voisines teutoniques et les jours s'écoulaient entre le sable et l'eau dans la pinède de la Tamarissière...
Une semaine déjà que le ménage à quatre tournait rond. Vous étiez même allés jusqu'à Narbonne voir la capitale successivement romaine, gothe et arabe de la Septimanie : un sujet épais comme le bras qui tenait la journée, facile ! Savaient-elles que Narbonne fut le Poitiers-732 puissance 2, puiqu'on y massacra toute l'armée sarrazine et les milliers de colons arabo-berbères coincés sur la plage au pied de La Clape sans pouvoir embarquer. Ce fut inscrit dans l'histoire comme la bataille de la Berre-737 mais puisque les Annales sont écrites au nord, on n'en parle jamais, bien que l'issue de ces combats soit le vrai marqueur du reflux arabe. Alexia et Marie ouvraient de grands et si beaux yeux qu'on leur en aurait conté des heures, et la région recelait tout ce dont on avait besoin pour distraire les dames, jusqu'au mystère de l'abbé Saunière à Rennes-le-Château*.
Savaient-elle qu'Heinrich Himmler, le mec sévère avec les petites lunettes de Brasillach, avait commandé une mission spéciale pour rechercher le secret de Rennes-le-Château que les plus allumés des archéologues disaient n'être rien moins que l'Arche d'alliance pillée par Rome à Jérusalem et rapporté du sac de Rome par Alaric. D'ailleurs, puisqu'on en parle, le papa d'Alexia et Marie avait été un collaborateur des troupes française d'occupation. Chacun son tour mais comme il était Sarrois, c'était à moitié pardonné. Les jours passant, on entrait moins dans le réchauffement climatique et plus dans le water-polo. A quatre c'est plus simple. Bref, tout laissait comprendre qu'il y aurait une suite au roman de plage.
* Royal-Artillerie a déjà parlé de Rennes-le-Château ici.
Ce matin-là, Med prit la Onze pour aller en Agde faire des courses et ce jour-là Alf l'accompagna pour acheter des fruits frais chez des gitans de sa connaissance sur la vieille route de Vias et rapporter de l'agneau à prix coùtant. De retour à midi...
Elles s'étaient tirées !
L'emplacement était vide, nettoyé, les sacs poubelles enlevés, mais les vélos toujours enchaînés au pin.
Med gara la voiture avec précaution. Ils restèrent là, dans la voiture, un peu hébétés, sans oser demander au voisinage. Un gosse qui répondait au joli nom de Mouloud sortit de sous les pins derrière le bungalow attenant et s'avança, déjà prêt à leur raconter l'épisode. Il avait forcément tout vu puisqu'il badait les filles du matin au soir en cachette dans toutes leurs activités. Il s'arrêta à six mètres et attendit. Au bout de deux minutes, Alf leva la main, il vint et raconta en acceptant un coca frais.
La Mercedes était venue vers 10 heures. Une grosse bagnole gris foncé badgée 500 sur le coffre. Elle s'arrêta devant la tente des filles et deux mecs ouvrirent les quatre portes et la malle. Ils démontèrent la tente avec soin, la plièrent et chargèrent tous les sacs. Les deux filles montèrent derrière sans broncher, ni un mot, ni un refus, ni un battement de cil. Ni les uns ni les autres ne disaient mot, comme s'ils vivaient la fin de quelque chose d'attendu.
- C'est dommage, ne put s'empêcher de dire Mouloud.
- C'étaient quoi ces types, Mouloud ?
- A mon avis des Turcs, et probablement les maris. Ils n'ont même pas eu à parler.
- Comment ça ?
- S'avaient pas l'air de types à qui tu demandes cent balles. Les polos Ralph Laurens, les gourmettes, les bagouses en pierres de couleur, les futals à revers à quatre cent balles. Ils serraient pas des écrous chez Volkswagen.
Alf lui donna un paquet de Speculos qui était sur le dessus du panier, et ils déchargèrent la voiture. Mouloud ne partait plus, compatissant en un sens, ou curieux de voir comment ils allaient encaisser la gifle. Car il n'y avait pire gifle dans son imagination que de se faire larguer par une meuf. Heureusement qu'ils avaient la décapotable pour lever des filles et suffisamment de blé apparemment pour n'avoir pas à faire la cuisine chaque jour sur le petit réchaud ; ce qui aurait fait Mimile, avouons-le !
Elles avaient passé une douzaine de jours de totale liberté, avait vécu l'idylle qu'elles étaient venues chercher avec des gars sympa, de vrais frenchies en décapotable - que demandent les Huns ? - elles avaient chacune inventé un personnage sans doute un peu plus jeune qu'elles, très tendance dans la mouvance écologiste, tout en ne parlant pratiquement jamais de leur vie quotidienne à Mannheim ; et elles étaient montées en ballon presque chaque nuit sans faire auparavant une heure de danse du ventre. Tiens, puisqu'on en parle, en blond caucasien, ça le fait aussi :
Vous n'aviez aucun élément pour remonter la piste et savoir ce qu'il adviendrait d'elles. Elles ne s'étaient pas comportées en professionnelles à la mer et probablement n'avaient-elles d'enfant ni l'une ni l'autre. Elles en auraient parlé et le sachant maintenant, pareils maris n'auraient pas lâché les deux sœurs sans surveillance avec une progéniture à couver. Peut-être avaient-elles laissé les cailloux du Petit Poucet d'ici au bureau de sortie du camping ; mais ils n'y croyaient pas vraiment. Avant d'aller à la paillotte de Daniel, il firent le tour par le bureau en demandant s'ils avaient vu passer Alexia et Marie qui de notoriété publique allaient et venaient avec eux depuis dix jours, au point de faire croire qu'il y avait un semblant de sérieux dans leur double liaison.
- Ah bon, c'est ça ! C'étaient elles dans la Mercedes fumée ?
Un type avait payé leur note en entrant. Il a fait salut de la main par la vitre en sortant. Elles, elles n'ont rien dit.
Alexia ressemblait un peu à Amber Heard et Marie plutôt à Léa Seydoux. Non, bien sûr, pas exactement mais vous comprenez. C'était juste pour mesurer la perte. On savait en revanche pourquoi les "maris" avaient fait le voyage pour venir les récupérer. Ils n'en avaient pas des tonnes de ce calibre dans leur communauté orientale. Au repas, Alf et Med convirent de lever le camp. Pour changer d'air et de souvenirs quotidiens mais peut-être et surtout pour ne pas subir les regards en-dessous et rigolards du voisinage qui avant l'apéro de ce soir serait tous au courant. Ils plièrent les affaires, donnèrent les provisions à Mouloud pour ses parents et chargèrent la Traction.
- Vous partez à leur poursuite ?
Alf sourit en hochant la tête.
- Je peux vous passez le canon scié que mon père tient dans la caravane.
- Il n'y en aura pas besoin, Mouloud. T'es un gentil garcon. Fais gaffe à toi, et où tu mets ton nez. Bye !
Et c'est comme ça qu'ils partirent finir la semaine qui leur restait dans une cure d'altitude par la A75. Ils en eurent pour quatre heures jusqu'au village d'Aubrac, et établirent leurs quartiers à l'auberge de jeunesse du Royal. Ils étaient sur la draille, c'était bon signe en un sens. Le monde allait et venait. La gérante leur fit l'avantage du garage fermé après avoir admiré la Traction de collection chocolat.
- Vous pouvez manger au village.
Ce fut mieux que bien et moitié moins cher qu'au Grau d'Agde.
Rentrés à l'auberge, les étages bruissaient déjà de jeux de société et de guitares. Mais Alf et Med avaient prévu de monter à cheval au bon air à Nasbinals dans un centre équestre qu'ils avaient réservé à la réception. Quel plaisir eurent-il à dormir au frais la fenêtre ouverte sans moustiques ! Il suffisait dès maintenant de laisser venir les rêves et leurs créatures. Med eut plus de mal qu'Alf à s'endormir, les créatures semblaient empêchées.
(la suite au prochain numéro)
Pour info et si u veux rajouter une suite pittoresque, le vétérinaire de nasbinals est camerounais et s'appelle alpha wan! Autant dire que l'hiver sur le plateau de l'aubrac on le remarque au milieu des congères !
RépondreSupprimerSalut. On pourrait le faire intervenir dans le débat jamais conclu entre la Rouge de Salers (cantal) et la Blonde d'Aubrac (laguiole), cette dernière étant la seule vache au monde fardée naturellement au mascara. Pour la qualité de fromage, il n'y a pas photo : c'est la blonde qui travaille le mieux.
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