lundi 5 septembre 2022

Après le pourquoi, le quoi (1/3)

Spécial Royco. A relire les cahiers de l'Université Saint-Louis de cet été, on perçoit très bien l'ancrage dans le passé et la revendication du meilleur gouvernement possible des hommes par la monarchie capétienne. Rien sur les voies et moyens d'une reconquête du pouvoir, rien sur l'institution monarchique prévue. On fonctionne en cercles, en loges.
Ce billet répond à la première assertion du programme de rentrée paru le 29 août 2022.

Guy Coquille
La littérature royaliste abonde en démonstrations définitives de la pertinence d'une monarchie héréditaire, aujourd'hui fédérative et sociale. S'il faut amorcer la longue cohorte des penseurs majeurs de la monarchie on peut commencer par Guy Coquille (1523-1603) et finir par Hans-Hermann Hoppe (1949-still going strong). Des douzaines entre les deux. On est archi-bordé quant au "pourquoi" : hors de la monarchie point de salut ! mais quid du quoi ?
Le "quoi" et le "comment" ou mieux l'inverse, s'appliquent à décrire l'institution monarchique réinsérée dans son environnement politique et social du moment, disons dans trente ans ? Parce la réponse à la question légitime du vulgum pecus est déterminante pour la suite. Comment ça marche ? Déjà qu'aucun prétendant ne fait l'unanimité, si l'épure institutionnelle est floue voire inexistante, on peut tirer l'échelle, plier les gaules et rentrer au chalet boire une fine : le "rêve ne cessera jamais de passer" et les royalistes suivront éternellement la séquence messe, galette et camp ! Le "comment" est une autre affaire que nous n'aborderons pas ici.

Des penseurs professionnels objecteront que le régime monarchique étant universel dans le temps et l'espace, son environnement à trente ans de distance n'aura que peu de conséquences sur son organisation. A quoi les penseurs du dimanche comme le Piéton du roi répondent qu'il ne s'agit pas d'imprimer demain matin la nouvelle constitution du royaume de France mais de fournir des billes à la propagande royaliste d'aujourd'hui pour faire avancer le schmilblick bloqué depuis cent cinquante ans, faute en partie d'image nette du régime à installer. C'est toute l'arrogance revendiquée de ce billet !

Le lecteur trouvera plus bas un projet institutionnel de base, mais l'idée est d'appeler à contribution des constitutionnalistes et des penseurs politiques pour dessiner l'épure la mieux adaptée au futur de ce pays. Quel est-il à trente ans d'avenir ?

Le projet monarchiste s'appuie sur des réalités et pas sur des phantasmes ni des rêves arrachés au passé. On part de l'hypothèse que ce pays aura retrouvé une certaine liberté dans les compartiments qui comptent vraiment, à commencer par ses comptes publics, ceci induit qu'une période de forte austérité aura précédé une réinstauration après l'assainissement de la dépense publique ramenée à son juste poids corrélé à la production de valeur ajoutée. Si ce pays, qui marche sur la tête - la Dette insupportable sur la tête de nos enfants et des leurs - ne retombe pas sur ses pieds, il aura disparu dans trente ans et sera devenu une division administrative d'un vaste ensemble de pays faillis dont les populations devront être soutenues par les pays souverains. Le régime politique en ce cas ne sera plus une préoccupation, puisqu'il n'y aura pas d'autre régime possible que le plan Marshall humanitaire gouverné de l'extérieur. Mais à supposer que les efforts nécessaires aient été d'une façon ou l'autre possibles (consentis serait beaucoup demander) il pourrait être vendu à l'électorat, après avoir inséminé l'opinion, qu'un régime monarchique éviterait de retomber dans les errements antérieurs qui nous auront conduits jusqu'au bord du gouffre duquel on ne remonte jamais.

Le projet monarchique diffusé aujourd'hui doit être clair est compréhensible par tous, même par les moins doués de nos concitoyens ; il faut sans cesse objecter de la complication des mesures proposées pour le jour d'après. L'organisation vendable serait de découpler l'essentiel et le contingent, à savoir, remettre le régalien au roi et laisser le peuple gouverner son quotidien, région par région, en démocratie représentative ou directe. On revient au projet développé cette année sur Royal-Artillerie sous le titre Quinte Floche Royale, qui prévoit de remettre au roi en ses conseils la Justice haute, la Guerre, la Sûreté, la Diplomatie et le Trésor. Seraient confiés aux régions devenues entités politiques capables d'appeler à contributions et libres de se regrouper ou de se redécouper par référendums, les douze ministères suivants, pour rappel :
- Assurance maladie nationale, privée, hôpitaux généraux, hôpitaux spécialisés, dispensaires publics, cliniques privées
- Assurance vieillesse nationale, privée, fonds de pensions, allocations et secours
- Instruction publique nationale, régionale, départementale, municipale, privée
- Universités, recherche fondamentale, grandes écoles, écoles techniques, apprentissage
- Justice basse, tribunaux d'instance et justice consulaire, cours d'arbitrage, admistration pénitentiaire
- Ecologie pratique et météo, polices municipale, cantonale, des voies, des marchés et des sols, monopoles du quotidien
- Aménagement du territoire, ponts et chaussées, ports et canaux, transports
- Recherche et sécurité énergétique (production, surveillance et transport)
- Recherche et développement industriel, aérospatial, militaire, arsenaux d'Etat
- Recherche agronomique et gestion des espaces agricoles
- Gestion des zones économiques exclusives et de la pêche
- Gestion du budget de la nation, fisc

Il existe au Roycoland des esprits plus déliés qui sont capables de pousser la description du royaume de France modèle 2050. Qu'ils le fassent ! Toujours dans le but de nourrir la propagande, des illustrations de ces différents cercles de pouvoir, des infographies, c'est ça, des infographies, aideront à comprendre la répartition des responsabilités, les interdépendances dans les communications par exemple, les éléments libres comme les universités, les ensembles communs à tous comme l'assurance-maladie, la météorologie, la gestion du budget ou l'administration pénitentiaire, les compétences locales et différenciées selon les régions etc. Tuons le jacobinisme et au diable la compétence universelle.

Un projet concret se passe d'attendus, préambules et déclarations liminaires. Il tient debout tout seul. La séparation des domaines public et régalien participe de cette clarté mais nous devons nous améliorer. La séparation nécessaire des pouvoirs tient toute dans cette formule : "le roi en ses conseils, le peuple en ses états". Il n'est pas obligatoire qu'un domaine domine l'autre. Le royaume pourrait au départ être un contrat qui se pérenniserait par la démonstration de sa supériorité en exercice. Sans doute n'est-ce pas orthodoxe, mais l'orthodoxie n'a rien donné depuis la fuite du dernier capétien régnant en 1848.

Avant de terminer faisons un sort à l'esquive classique qui me fut opposée plusieurs fois. Le royaliste n'a pas à s'inquiéter des institutions du royaume, le roi revenu y pourvoiera. Facile ! Les mêmes (je pense à certains permanents du CJB de jadis) de brandir leur prétendant, nous assurant qu'il sait déjà tout et que ses conseillers complèteront les détails. Faudrait-il encore que l'impétrant ait été formé dans l'emploi, au moins dans des sciences politiques un peu poussées, ce qui est loin d'être la cas de ceux que nous connaissons.

Qui va développer le projet monarchiste pour demain ?

cul de lampe

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