L'endive de Savoie qui fait le commissaire français à Bruxelles s'est insurgé le 11 juillet contre les agences de notation qui ne nous trouvent pas aussi beaux que nous pensions l'être. Il faut dire que la situation financière européenne inquiète bien au-delà des agences, et les détenteurs de créances ne sont pas rassurés par les plans d'austérité lancés le dos au mur par les Etats acculés, plans qui risquent d'enrayer l'économie et donc de compliquer sérieusement le règlement des intérêts échus. Que sera demain la réunion de l'Eurogroupe sur le défaut grec ? Technique, uniquement technique. Les nombreux présidents¹ de l'Europe n'ont aucune vista.
Les Cassandres, celles dont les pouvoirs politiques refusent par principe les prédictions, nous avertissent d'une météo financière très dégradée au tournant de l'année, quand les catcheurs pour de rire auront fini d'amuser l'estrade et que les couillons seront taxés comme les gueux de la forêt de Sherwood. Vous et moi.
Parce que je ne crois pas à l'effondrement du système américain annoncé depuis trois ans déjà par des "économistes hors-sol" et parce que la dispute entre le président Obama et les Républicains dramatise à outrance le défi de la dette pour se coucher ensemble dès la onzième heure venue, j'ai pris le parti d'explorer les voies de salut de nos Etats à notre détriment ; et elles sont nombreuses. Comme la Grande Armée retraitant de Russie, ils boufferont leurs chevaux, c'est-à-dire, nous !
Notre situation à nous ? Elle est à peine meilleure que celle de l'Italie qui n'est plus mal traîtée que pour deux fausses raisons : les censeurs redoutent les tocades du satyre national et ne prennent pas en compte le PIB immergé historique qui fait 15 à 20% du produit réel, le portant au niveau de celui de la France. Le plan drastique d'austérité qui vient de passer au parlement de Rome (salaires, retraites, fonction publique, ticket social modérateur, niches fiscales) est plus soft que celui qui nous attend quand la vague de défiance aura sauté le brise-lames italien, car toutes ces mesures nous les avons déjà prises, à nul effet nous l'apprendrons ! Quand nos emprunts de cavalerie² légale seront placés sur le marché à des taux facilement du double des taux actuels, le premier poste budgétaire qui est de servir la Dette deviendra vite écrasant au fur et à mesure du renouvellement des bons, et nous serons enfin un pays africain mettant en accord nos moeurs et notre diversité. J'en vois à Barbès qui se marrent.
Que fera alors le peuple immense des veaux reste un mystère. A le voir se comporter dans le métro et les trains de banlieue, pas grand chose au premier abord.
La manip
Le gouvernement évitera de toucher au livret A et aux petites pensions car son projet n'atteindrait pas le Palais Bourbon sur le chemin duquel les réverbères sont nombreux. Les pauvres épargnés au départ, la classe moyenne et les fonctionnaires ne pourront pas compter cette fois sur les gros bataillons de couillons manipulés qui sont là pour faire peur à la une des quotidiens. Les syndicats non plus, qui ameuteront les profs, l'EDF, la Poste, les pompiers et la SNCF hors week-end.
Souvenons-nous déjà que la dette souveraine est du même ordre de grandeur que l'épargne des ménages
(cf. patrimoine financier net à l'Insee) et pour un cinquième détenue par les contrats d'Assurance-vie. Soixante-dix pour cent de cette dette est détenue par des non-résidents
(suivre la répartition des détenteurs ici). Comme il n'y a aucune chance que l'Etat mette en péril sa position diplomatique mondiale, son siège permanent au Conseil de Sécurité de l'ONU et une foultitude de positions éminentes dans des organisations diverses et variées (dont le FMI) qui profitent à la classe politique, il ne plantera pas les étrangers.
La France ne fera pas défaut. Suivez mon regard. L'Etat s'intéressera donc aux prêteurs domestiques.
Confisquer du patrimoine aux possédants français qui lui ont fait confiance ne l'émouvra pas, si dans le même temps, au motif de préserver la notation des agences, il brise le modèle social afin de répartir également les souffrances. Un coup sur les faux riches, un coup sur les vrais pauvres. L'occasion ou jamais de couper avec la gangrène soviétique laissée par la Libération ?
Si l'on y réfléchit bien, de n'importe quel bord politique qu'on l'observe, la déconstruction obtenue ne sera boudée, puisque l'évacuation du fatras réglementaire permettra à chaque expert des partis de livrer son idée de nouveau
contrat social sur une page blanche. Le rêve du penseur.
Finalement, taper dans l'épargne des ménages sera tout bénéfice, politique et financier, sous les applaudissements nourris des bailleurs de fonds étrangers qui détestent notre modèle social arrogant et notre messianisme libertaire.
Là où ça se gâte
A partir de ces confiscations baptisées de quelques noms technocratiques dont les conseillers "com" ont le secret, le Gaulois qui sommeille dans tout Français de souche, ou de papier non-norvégien, entrera en insurrection mentale. Il pétera les plombs, car le patrimoine c'est sacré, comme les vacances au Tréport, la petite résidence secondaire sur heures sup, la piscine en plastique, la bagnole roumaine, le camping et le cubitainer de rosé. Les brigades de contrôle de notre civisme fiscal et social qui policent d'ordinaire la société au bénéfice de l'Etat se trouveront alors en danger de mort. Depuis l'exécution de deux inspecteurs du travail au Périgord en 2004, qui a soulevé une vague de tacite désintérêt au grand dam de la fonction publique
(clic), les agents de terrain le savent et ne sortiront plus de leurs bureaux. Ceux que vous rencontrerez seront polis voire obséquieux, et évanescents. L'Etat prédateur fera retraite comme l'hyène vers sa caverne, la gueule obstruée par un jambon : la police publiera ses états d'âme, les pompiers demanderont des protections qu'on n'assurera pas, la gendarmerie analysera ses plans de carrière, les postiers exigeront des guichets blindés, des zones urbaines entières passeront à l'anarchie, la télé amplifiera l'alarme, et tout dès lors risquera d'arriver. Un Mexique avec une crise argentine. Tout ! Même et y compris l'évaporation du gouvernement comme en mai 68, si les hordes d'insurgés se pressent autour des ministères.
Ce sera... l'aubaine !
La septième du genre en 160 ans : 1851 - 1873 - 1940 - 1944 - 1958 - 1968.
Nos princes, qui sont prêts depuis longtemps à assurer leur propre destin, le sont-ils autant à assurer le nôtre ?
Réflexions pour le CMRDS qui vient
Les mouvements politiques ne peuvent suffire à leurs adhérents s'ils se cantonnent dans l'académique. Il faut "combattre". Et le but doit être net autant que le chemin choisi pour aboutir. A défaut, le recrutement en souffre et les effectifs fondent dans ce qui devient un groupuscule mécontent, pas bien méchant au final pensent les RG. Mais l'accession d'aubaine se profile déjà qui convoque tout le monde à la manoeuvre, malgré notre impréparation. Qui sait faire quoi ? Si l'on veut bien admettre qu'à l'heure de l'assaut, les commémorants et les cercles pleureurs seront de peu d'utilité - encore qu'ils risquent d'encombrer les couloirs - où sont les joueurs de mêlée et le pack qui vont balle à la main ouvrir le chemin du roi vers le Congrès, seule institution capable d'acter la rupture systémique ?
Pour faire à la page, où est le shadow cabinet ?
La maigreur des effectifs impliqués dans le mouvement d'après-guerre a fait le lit du concept d'une poignée d'acteurs déterminés instrumentalisant avec succès les débris des forces étatiques pour avancer leur agenda comme à Moscou en 1917, bien qu'on n'ait jamais vu chez nous l'effet positif de cette poignée redoutée qui se tiendrait prête. Jusqu'à plus ample informé dans l'action visible, nous nous en tiendrons aux choses communes.
Ayant caressé un temps l'idée d'un conseil politique du prince, convenablement staffé d'acteurs économiques et politiques en plus grand nombre que les contemplatifs de l'Université, je me suis fait la remarque qu'il y perdrait le prestige et le confort de sa position d'éternel estivant
(comme disait Brassens), prétendre oui, mais jamais prendre. On peut croire sans poser la question que la République cessera d'adresser des invitations protocolaires, des décorations et peut-être des emplois dans ses fromages, dès lors que leur bénéficiaire se sera mis indubitablement dans une position de contestation active du régime par l'organe d'un conseil de compétences de niveau gouvernemental. Pour s'en tenir au domaine régalien, imaginez le duc de Saint-Chose critiquer chaque semaine publiquement les positions diplomatiques du Quai d'Orsay, le comte de Montmachin éplucher les décrets fiscaux de Bercy et en dévoiler leur perversité, et le marquis de Carrabas tenir salon chaque vendredi pour dauber sur le Code Napoléon et la Chancellerie aux ordres, le tout au nom du prince, leur maître.
Jusqu'ici, rien à craindre.
Ce qui amène ma dernière interrogation.
Mis à part un appel au secours que la Chambre des députés, ou le Sénat ou les deux en Congrès, enverrait au prince pour cesser la crise systémique qui pourrait les emporter tous, appel du modèle utilisé en 1873 pour installer le comte de Chambord au sommet de l'Etat, je ne vois aucun dispositif d'accès performant qui justifierait mon engagement direct dans une structure de prise de pouvoir en second échelon (le premier est dédié aux vrais aristocrates). Et j'en suis bien triste ma foi. Mais selon Christophe Dickès dans l'AF2000 datée du 7 juillet, Jacques Bainville lui-même n'y croyait plus. Soixante ans à tracer le même sillon, on fera le tour de la Terre pour retrouver le début, et de tour en tour jusqu'à la fin du Monde.
Diffuser l'idée monarchique dans l'Opinion pour qu'elle se retourne une bonne fois, semble être la seule voie ouverte, ce qui induit que ce sera à l'Opinion suffisamment éclairée d'appeler le prince à la faveur d'une rupture de paradigme. La Porte des lys c'est donc l'Alliance Royale, du moins dans la mission qu'elle s'est donnée, ré-acclimater les Français au roi pendant les campagnes électorales où les gens écoutent plus attentivement ce type de proposition. La question des moyens engagés est une autre affaire, et pour le moment on se paie un peu de mots.
Même à "cible nette et guidon flou", attendre que le blé royaliste lève dans l'Opinion risque d'être long. Surtout si nous continuons sur les mêmes schémas et sur les mêmes vecteurs d'idées qu'aujourd'hui, si nous continuons aussi à mélanger valeurs sociétales et principes institutionnels, si nous promouvons une religion d'Etat qui a disparu de 95% des consciences, si nous collons à des programmes simplistes édités pour les Nuls³, si nous rêvons le pays réel au lieu de le comprendre, si nous coiffons le tout du handicap de la Querelle dynastique, sottise ultime. A cet égard et pour finir sur un sourire, sans l'apparition du Mérovingien manquant qui actera l'usurpation générale, il n'y a pas d'issue ! Et cette impasse compte beaucoup dans la démotivation des royalistes. La Querelle est la clef du déclin que l'on peut contourner par une communication adaptée. Celle-ci reste à construire. Il faut
un million au départ.
A vous les studios de La Gaubretière, à vous les idées !
Note (1) : C'en est risible : président polonais du Conseil de l'UE, président portugais de la Commission, président belge du Conseil européen, présidente britannique du Conseil de l’Union pour les Affaires générales et les relations extérieures, président luxembourgeois de l'Euroroupe, président français de la Banque centrale européenne, président polonais du Parlement européen, et laissons de côté toutes les vice-présidences croisées entre les institutions, chacun ayant autant de pouvoirs de nuisance que les autres et compétent pour intervenir sur tous les sujets, comme d'ailleurs les chefs d'Etat et de gouvernement des pays majeurs de l'Union. Quel foutoir !
Note (2) : emprunter pour rembourser
Note (3) : le programme économique électoral du FN marinisé n'est pas au niveau des enjeux