Retour au présent.
C'est la République et ses succédanés impériaux qui ont inventé la vocation universaliste de la France, jusqu'à transformer l'essai par un immense empire colonial destiné à assouvir notre besoin de justice-pour-tous mâtinée d'égalité, sans omettre l'indispensable liberté que nous avons offerte à nos indigènes z'ébahis devant tant de mansuétude constitutionnelle !
Le régime capétien s'était contenté pour la France du rôle central de pivot, moyeu, moteur de l'Europe. Mais apparemment cela ne suffisait pas à nos ambitions nationales. Nous voulions "soumettre" ! Nous soumîmes ... et fuîmes par après ... à grande enjambées.
Où en sommes-nous ?
Le pays n'a pas bougé sur la carte, il est plein centre, comme le dimècre diraient certains de nos voisins que nous agaçons. C'est un avantage comme c'est aussi une grande responsabilité. Bien que nous ayons cru devoir y échapper quand le général De Gaulle décida de créer un trou noir de 550000 km² au coeur de l'Alliance atlantique, la vocation de la France reste un certain leadership de l'Europe continentale dans ses domaines de prédilection : les arts et manufactures, le luxe insolent, l'agroalimentaire et surtout la Loi.
Nous excellons dans les industries de pointe (militaires souvent), à commencer par le nucléaire, puis les arts dès qu'on les soustrait au jugement de Jack Lang, nous restons inégalés dans les parfums et tout l'inutile mais si indispensable, et la gastronomie que nous réinventons en continu, et un peu moins dans le domaine juridique qui devrait être notre grand chantier de demain avec l'environnement. Certains secteurs nous comptent aussi dans le peloton de tête, mais nous devons partager les lauriers avec d'autres, comme dans le ferroviaire, l'aéronautique, la navale, la biochimie, la bancassurance.
Mais reconnaître cette vocation naturelle pétrie par nos espaces et notre histoire ne garantit en rien sa pérennisation. Par contre on peut en garantir la pertinence quand des non-français nous convoquent pour l'assumer. Nous sommes appelés par beaucoup d'étrangers francophones à "dominer" les secteurs de la culture, du droit international et de l'art de vivre, sous son nom moderne d'écologie. Ajoutons-y de quoi faire bouillir les autres chaudières de notre économie, et allons-y gaiement.
Quel est donc, ou devrait être, le dessein de l'Etat français pour accomplir complètement la vocation de la France ?
Logiquement la première action serait de retrouver les moyens nécessaires à l'accomplissement de ce dessein en assainissant la situation financière du pays. Il faudra une génération au mois pour nous extirper de ce désastre démocratique au prix d'une révolution quasi-civilisationnelle, le confort de notre modèle social étant intenable pour les générations montantes. Mais le monde tourne plus vite qu'autrefois, et on ne peut attendre d'être redevenus sérieux dans la gestion de notre société pour prendre nos marques dans nos domaines de prédilection et lancer des actions conservatoires.
Dans l'état calamiteux de nos moyens, nous devons impérativement privilégier les approches neutres budgétairement, et si possible rémunératrices en emplois. Il faudra commencer donc par redéployer l'existant.
Ciblons les champs d'action et leurs limites, sans oublier qu'ils devront être labourés tous simultanément.
ENVIRONNEMENT :
- Arrêtons les conférences ! Défions-nous des taxations !
Il faut pousser la recherche scientifique et technologique pour que produire et vivre propre rapporte plus que de le faire de manière sale. De même faudra-t-il découvrir des produits et services qui rapportent beaucoup à leurs inventeurs, d'où qu'ils viennent. Commençons par exemple par instaurer mondialement la gratuité des dépôts de brevets dans le chapitre écologique.
L'intérêt personnel est un puissant moteur économique ; on le voit dans l'émergence du mammouth chinois qui a commencé à s'arracher à sa crasse misérable quand Deng Xiaoping a appliqué le champ magnétique du capitalisme au peuple des Hans ; chacun s'est tourné dans le bon sens et s'est mis à bosser pour soi-même ; même les fonctionnaires indolents se sont jetés dans les joint-ventures. La parade provocante des milliardaires chinois entretient la flamme dans le peuple qui croit en la bonne étoile de n'importe qui. Et c'est ce qui compte en fait !
C'est à mon sens la clé du défi énorme mis en scène par Al Gore et Nicolas Hulot. Les grosses machines administratives ne nous sauveront pas. La fourmillière humaine intelligemment magnétisée, si !
Mettons de l'argent dans la recherche.
FRANCOPHONIE ET VOCATION MARITIME :
- Ne mélangeons pas l'expansion culturelle et la mise sous curatelle de certains pays autrefois soumis à nos lois. C'est le retour de bâton assuré et d'expérience ça ne nous rapporte rien. Sachons brider nos ambitions et ne pas nous disperser pour une gloire sans lendemain. Le cas du Vietnam est exemplaire.
Nous avons cru et le Quai le pense encore, que de ranimer les cendres de notre influence en Indochine allait ouvrir un boulevard à nos entreprises. Elles ont été reçues ni mieux ni plus mal que les autres, et resteront loin derrière les acteurs de la région, tous asiatiques (c'est normal). En dehors d'une très petite élite francophone qui est flattée par les invitations diplomatiques, il n'y a pas de résurgence française au Vietnam. La démarche est à la limite, romantique. En passant, on n'en trouve pas beaucoup plus au Cambodge où les investisseurs asiatiques et australien tiennent le haut du pavé, à bourse ouverte.
Ceci pose indirectement la question de la vocation maritime de la France qui est le trompe-couillon parfait pour obtenir des crédits militaires, finalement inutiles.
Si la France a depuis longtemps des intérêts outremer, elle n'a jamais eu une vocation maritime, hors la grande époque des découvertes. Elle est d'ailleurs la seule au monde à avoir sabordé son escadre avant même de subir le feu de son ennemi ! Je doute qu'un équipage anglais ait obéi aussi parfaitement à cet ordre de destruction ; c'est contre les gènes britanniques de couler son bateau soi-même ! Chez nous, apparemment pas de difficulté !
Même si nous avons de grands marins, nos regards ne sont pas tournés depuis des siècles vers le large. Notre capitale est au milieu des champs de bettraves, pas au bord de la mer. La grande exportation française a longtemps été une économie d'aubaines, en dehors de la zone franc protégée. Nous n'avons pas beaucoup d'expatriés dans les régions à fort potentiel mais difficiles. Les Français ne sont généralement pas bilingues.
Illustration :
Au même moment où nous poursuivons la chimère de la francophonie en Indochine, nous nous rétractons à Riga sur la mondialisation de l'OTAN au motif que nous ne saurions d'aucune manière être impliqués dans une fâcherie sur le détroit de Formose ! Cela veut bien dire que nous ne sommes pas à l'aise dans le Pacifique Nord, ni sur les mers adjacentes. D'ailleurs nous n'y sommes venus que dans le sillage des Anglais pour dépecer la Chine, et nous en sommes repartis un demi-siècle avant eux à la rétrocession volontaire de Kouang Tchéou Van, port cédé par l'Empire dans les mêmes conditions que la péninsule de Kowloon !
Inutile de nous épuiser dans des terres stérilisées ; mettons des moyens plutôt sur le Japon qui nous aime tant dans le domaine des arts ! Nous en retirerons cent fois plus pour la francophonie.
Faisons plus où nous percevons de l'écho, n'insistons pas quand il ne s'agit que de notre incommensurable vanité.
Redéployons !
DROIT INTERNATIONAL :
Il y a une formidable carte à jouer pour la France qui va passer de puissance moyenne au rang de premier des petits, ce qui mettra en discussion son siège permanent au Conseil de Sécurité de l'ONU : c'est le Droit.
Pour le moment, les relations entre les pays sont soumises au droit anglo-saxon qui laisse un goût amer pour les pays émergents, d'avantager le plus souvent les pays rédacteurs. Forcés de transposer le droit américain dans leur législation, les pays du Tiers-monde, et surtout la Chine, l'Inde, le Brésil et plus largement toute l'Amérique latine, sans oublier les tigres asiatiques - sauf Hong Kong qui joue le jeu -, ces pays essaient tous d'en atténuer les contraintes par une application paresseuse des sanctions ou par le contre-feu de dispositions non tarifaires et non juridiques. En cela ils suivent l'exemple du Japon qui avait exercé ces représailles avec constance et finesse quand il avait dû entrer au GATT (ancêtre de l'OMC) pour crever l'industrie yankee.
Un corpus juridique découplé des obsessions mercantiles et réellement équilibré entre les parties prenantes est à construire. Le pays qui produira cette charte mondiale acquerra une autorité du plus haut niveau et pour longtemps. C'est un gros travail, sur budget d'Etat. Mettons des moyens dans la réinvention du droit international. Nous construirons ce faisant notre propre abri.
Ces axes ont été déjà explorés dans ce blogue sous le titre "Une diplomatie refondée".
© Visualparadox
Reste la décoration.
La France a une longue histoire militaire, ternie, c'est vrai, par le désastre de Sedan et la débâcle de Juin 40. Néanmoins la qualité est toujours là. Nous le prouvons chaque jour. Construisons une armée nickel-chrome, à la mesure de nos moyens, afin d'obtenir l'irréprochable dans nos engagements, et promouvoir la sophistication française dans la mise en oeuvre des aides techniques. Nous savons tout faire. Allons-y ! Que l'armée française, quand elle est engagée, soit crainte !
Pour ce faire, abandonnons les coûteuses opérations pseudo humanitaires ou de gendarmerie africaine, et ne gardons que les opérations de choc et de mise au pas ! Nous allierons les économies budgétaires à la promotion d'une image propice à tous les autres domaines dans lesquels nous travaillons.
Quand la Légion aura supplanté les Marines dans les jeux vidéo des gamins du monde, nous aurons gagné. Et nos industries aussi.
Bonne chance à la Fédération des Etudiants Royalistes d'Aquitaine dans son débat de mercredi prochain.
1 rue des Lauriers à 20h30, n’oubliez pas !