vendredi 11 février 2005

Ce Peuple qu'on abîme (I)

I./ Le réflexe monarchique déçu (1799-1870)

A la fin du XVIIIè siècle et malgré la saignée et les dévastations de la Révolution, la France atteignait son apogée. Elle était respectée jusqu’au Nouveau Monde, enviée et crainte dans l’Ancien. Libéré de la gangue des conservatismes, le pays se lançait dans la réforme de ses institutions à la rencontre du progrès et vu de nos jours, semblait dans la meilleure posture possible pour affronter la révolution industrielle qui allait se déclencher.

Royaume dans sa chair malgré les Lumières du siècle finissant qu’elle n’avait pas lues, la France de « Voltaire, Montesquieu, Rousseau, Tocqueville, Diderot, … » allait se jeter dans les bras d’un jeune dictateur, fondé de pouvoir d’une bourgeoisie avide de jouir. Celle-là, fiévreuse de conserver durablement les captations diverses que les évènements tragiques avaient mis à la portée de ses serres, n'avait pas d'autres soucis que l'enrichissement à outrance, la vêture, les fourrages et la remonte de guerre furent d'excellentes occasions comme cinquante ans plus tard l'épopée du chemin de fer. Le peuple qu’on avait usé à l’envi au succès du dépeçage des castes anciennes, le peuple qui pataugeait il y a peu dans le sang, ce peuple souillé était une fois encore bon d’engagement.

Le dictateur qui connaissait bien à la fois la force de la nation et son enracinement monarchique se fit empereur, sans rire. La France se mettait à contre-pied de sa stratégie traditionnelle qui était depuis l’avènement des Capétiens, d’agréger et d’assimiler des territoires pour aboutir au pré carré d’un seul tenant, riche et puissant. Au lieu de quoi l’Empire de par son essence, tendait à confédérer sous ses jeunes abeilles des pays divers, distincts, parfois éloignés, peuplé souvent de gens incompréhensibles. Or le mouvement impérial n’appartenait pas à la tradition française. Des empires subsistaient encore en Europe, qui ne pouvaient supporter la concurrence effrontée d’un nouvel empire libertaire dans son discours, intégriste dans sa loi. L’empire français provoqua la guerre.

La France y sacrifia une génération de géants. A la fin du régime qui n’avait duré que quinze ans, le pays appauvri, saigné à blanc et écoeuré de l’odeur du sang, ne savait pas qu’il devrait abandonner toute ambition à l’avenir, et quand bien même en aurait-il, qu'elle se dissoudrait comme le sel dans l’eau. Tout irait mal désormais. Le peuple avait devant lui cent trente ans de désordres et de peines.

Quinze ans de restauration ne pouvaient rebâtir les cœurs et les esprits. On donna finalement le sceptre au roi des affaires qui passait par là sans titre ni programme, car il était temps de s’y mettre, aux affaires. On entreprit de coloniser une terre étrangère à la nôtre en tous points, l’Afrique du nord, dans le meilleur style des plantations caraïbes, et on y déporta les effectifs du peuple qui remuaient le plus à s’agacer des conditions dans lesquelles on le faisait suer sur la machine. Jusqu’à ce que la situation devienne intenable. Le régime sauta comme les précédents, on savoura sa liberté, peu de temps finalement.

Le réflexe monarchique reprit le dessus mais celui qui répondit à l’appel n’avait pas dans ses gènes « le principe » correspondant aux attentes profondes de la nation. Le peuple fut à nouveau gouverné au meilleur rendement possible, et la dispute reprit avec nos voisins qu’on assurait déjà de nos arrogances, l’Empire second se croyant détenteur d'une vérité politique universelle et unique, le droit des autres à disposer d'eux-mêmes. L’Empire, impossible à greffer en France, encore une fois provoqua la guerre à mille lieux de chez lui, retournant les empires centraux et se démarquant clairement comme une menace à tout changement qu’il n’accepterait pas ailleurs et chez lui.

Or pour son malheur, une ambition politique urgente faisait sortir des brumes du Nord un stratège politique de première force, appuyé sur la meilleure armée du moment, qui entendait créer son empire à lui aussi. Un empire ethniquement pur (déjà!) et unicolore.
La chance du peuple français au moment du choc, fut cette fois que son armée était une armée de métier, de professionnels, qui dès lors que la caisse à sable leur eut montré l’inévitable défaite, capitula sur le champ* avant que quelque hurluberlu ne décide la levée en masse qui prolongerait l'effort en pure perte, et l'éloignerait d'autant du commerce des plaisirs auxquels elle s'était accoutumée.
(*) Plutôt dans ses fortifications avant qu’on ne l’affame.

De lointaines réminiscences libertaires permirent quand même de rejouer une pièce cent fois donnée depuis, pièce qui consomma encore du populaire en quantité, celui de Paris cette fois. Jusqu'à la paix des cimetières.

Le pays amputé d’un quart et puni d'un tribut onéreux qui allait permettre à son adversaire de commencer sa propre révolution industrielle, le pays allait se calmer pour quarante ans.
Sauf dans les usines à labeur, ce fut la Belle Epoque sur le pont-promenade. Le peuple, lui, ne savait pas que le pire était devant.

(à suivre)

Ce Peuple qu'on abîme (II)

II./ Boucheries portes ouvertes (1871-1940)

Les dures leçons de la guerre perdue par une armée du modèle mexicain, avaient été comprises et codifiées rapidement dans un nouveau Règlement d'Infanterie dès 1875.
Malheureusement pour ce règlement, s'il fixait une doctrine raisonnable, cohérente et assez souple pour s'adapter à des situations très diverses, il ne répondait absolument pas à la profonde idée de la Nation, soi-disant hantée par l'esprit de "revanche" pour reprendre au Hun l'Alsace et la Lorraine, quels que soient les sacrifices que cela puisse lui coûter. La nouvelle doctrine de combat fut donc immédiatement attaquée par des écrivains porte-parole autoproclamés de l'opinion publique ; à tel point que « s’efforcer de limiter les pertes », « se terrer », etc… constituaient une pusillanimité coupable, des pratiques honteuses.
Neuf ans plus tard, le règlement incriminé fut remplacé par un nouveau inspiré par des auteurs plus offensifs : les Bonnal, Maillard, Langlois, Cherfils, va-t’en-guerre qui apportaient à la fière nation Doctrine & Vérité Nouvelles. Doctrine et Vérité simplistes : L'attaque, tête haute, sans se soucier des pertes.

On sait que ces idées furent poussées jusqu'à l'absurde à l'Ecole Supérieure de Guerre dans la période précédant la première guerre mondiale. Ceci se traduira par les stupides hécatombes de la brève guerre de mouvement, puis celles des non moins stupides offensives de 1915 et 1916, où une nation de 40 millions d'habitants prétendait "grignoter" celle qui en comptait 60 et qui était beaucoup mieux armée moralement et matériellement. L'essentiel était de hurler avec les loups, c'est à dire la presse et la classe politique aux manettes, puisque les pertes, touchant surtout les ruraux « qui votaient mal », n'avaient pas à être prises en compte.
Quelques esprits se référant à la Guerre de Sécession ou à celle de Mandchourie, se risquaient à prévoir que la bataille pourrait éventuellement s'éterniser, sans fin, en combats de tranchées. Mais les partisans de l'offensive à outrance, exclusive de la "vieille escrime" des méthodes surannées, emportèrent la décision du Commandant en Chef. Et la boucherie ouvrit grand ses portes.

Grâce à l’alliance de notre ennemi héréditaire qui n’était menacé en rien au départ mais nous avait à la bonne vraiment, et par le renfort des Insurgents que Lafayette avait un jour libéré, nous reconquîmes ce quart de France, l’Alsace-Lorraine, qui tel un bras coupé nous grattait encore à l’épaule. Mais le peuple, les peuples, allaient payer la morgue de leurs élites au prix fort. Ici, un million et demi de morts parmi la crème de l’effectif, cinq cent mille prisonniers ou disparus, quatre millions de blessés et des dévastations gigantesques dans le Nord-est de la France. En face, deux fois pire.

Alors dès la victoire acquise, la bêtise et la myopie des stratèges et politiciens sèmeront aussitôt les ferments d’une confrontation future en abaissant plus que le raisonnable l’ennemi vaincu qui avait lui aussi enduré d’immenses pertes, dont trois millions de morts et un océan de blessés et disparus (11 millions). Les autorités françaises à Versailles se vengeront de leur impéritie. Ce sera la politique des gnomes au comptant, sans vista ! On remettra le pays au travail, espérant cette fois en avoir fini une bonne foi des guerres faute de bras pour tenir les fusils.

Sans perspectives, sans permanence d’une analyse politique fondée, l’Europe se reconstruisit lentement jusqu’au krach. Le mal-être courrait les campagnes, il manquait trop de monde à la fin des hostilités, tant qu'on finira pas se douter qu'il y en avait d'irremplaçables. Les braves gens ne croiront plus vraiment à cette république qui avait pataugé dans le sang depuis qu’elle avait chassé l’Ancien régime. Là, un pacifisme compréhensible mais dangereux gagnait du terrain. Ici, les nostalgies se réchauffaient à la doctrine d’Action Française qui proposait autre chose autrement et un roi qui les aimerait pour conduire cela.

Hélas, la France qui compte se mit à l'agiotage, la magouille, ses classes dirigeantes se mouillèrent sans vergogne dans des trafics honteux montés par les ressortissants d’un cosmopolitisme sans freins ni racines. Les scandales firent rage autant que l’argent coulait à flot sur la classe aisée et sa domesticité politique, et ce lot commun de putréfaction morale devint la première circonstance atténuante invoquée à la barre des tribunaux. La nausée. Divorce entre le peuple laborieux et les élites.
Front Populaire, ras-le-bol des « soutiers ».

C’est dans ces conditions que le pays doit affronter maintenant la revanche de l’ennemi qu’il avait écrasé si complètement, mais qui s’est redressé moralement contre les vainqueurs d'hier pour se relever matériellement et réparer l’outrage. Alors que le pouvoir fébrile mais bavard recule, transige, recherche des alliances semblables à celles qui lui avaient permis de vaincre « quelles que soient les pertes » la fois précédente, déferleront de l’Est les hommes-machines dans le meilleur scénario de « L’Empire Contre-attaque » et le pouvoir une fois encore décidera de jeter son peuple au devant du danger, avant que de l’abandonner et s’enfuir. Mais ce peuple était déjà « trop tué » dans son coeur. Il va s’asseoir et attendre. Deux millions de prisonniers presque volontaires.
La nation française mourut en juin 1940.

La république à terre se suicide à Vichy et appelle au secours un maréchal de France dont on espère que les états de service dans la plus grande bataille que le monde ait jamais vu, Verdun, pourront intimider l’Allemand revenu en vainqueur. Il n’en sera rien. Ce militaire déjà atteint par la limite d 'âge dans son grade à l'ouverture des hostilités en août 1914 - on n'avait plus que ça sous la main en 1940 - avait un agenda de redressement moral qui fut largement débordé par les dompteurs de son entourage en agenda de dressage.
Pour punir peut-être le peuple français de s'être couché, le régime nouveau maniera le knout avec férocité. En vain, les ressorts étaient cassés. Les meilleures analyses ont donné cinq pour cent de résistants, cinq pour cent de collaborateurs, quatrevingt-dix pour cent de chasseurs de tickets de rationnement.

Au sortir de la seconde guerre mondiale, la France qui ne s'est finalement pas ou peu battue mais a montré un certain génie de l'agitation militaire et un pouvoir de nuisance par le harcèlement permanent de ses alliés, la France libérée accède au statut de puissance moyenne, primus inter pares , bienvenue au club. Elle aura le front de ne pas l'accepter.

(à suivre)

Ce Peuple qu'on abîme (III)

III./ Vae Victis (1941-1980)

Dès la capitulation sans conditions (la deuxième en soixante dix ans), la France abasourdie par l’effondrement de sa puissance et l’invasion germanique allait ne survivre que du souvenir de sa grandeur éteinte.
Elle n’aurait plus jamais sa liberté d’entreprendre dans les domaines stratégiques, attelée ou dételée du char commun de l’Occident selon les circonstances, les hommes qui la dirigeraient, l’humeur des partenaires. Et pour commencer la France était ruinée, matériellement et moralement. Ne lui restait qu’un empire colonial qu’elle n’avait plus le goût ni les moyens de gérer, et dont elle n’attendait que des contributions à son propre relèvement sans contreparties. En moins de vingt ans, cet empire en faillite et anachronique aux yeux de ceux qui finançaient le relèvement de notre nation, serait liquidé. Le premier pays d’Europe, autrefois mère des arts, des armes et des lois, avait été plié en 140 ans par la république des Lumières et ses avatars impériaux et fascistes.

Le réflexe monarchique, ou gaulois, allait jouer une fois de plus et l’on porta au pouvoir le hérault émigré de la Résistance qui était rentré dans les fourgons américains et jusqu’ici n’encombrait pas ses discours triomphants des sacrifices énormes consentis par les nations alliées dans la libération de l’Europe continentale et de la France en premier.

Vint l’époque de la reconstruction, et celle des récompenses (!). Bien que les efforts des uns et des autres dans la guerre achevée aient été plus que mesurés –on s’était beaucoup appuyé sur nos troupes coloniales pour paraître sur les fronts qu’ouvraient nos alliés - on décréta d’une part le pays indiscutablement « résistant », et l’on marqua d’autre part le début de la fin de l’épopée nazie à la bataille de Stalingrad ! Aux dogmes du Front Populaire, à ceux de l’Etat Français, allaient succéder maintenant ceux de l’âne gaulliste et du bœuf communiste qui tireraient le char de l’état, à hue et à dia, le premier, biffant d’un trait les raisons et les conséquences du désastre, le second, promettant le bonheur terrestre à ceux qui le rejoindraient les yeux fermés, sans poser de questions sur les « maladresses » du géant soviétique.

Soit qu’il fut déçu de ne point recevoir les pleins pouvoirs en hommage – mais allait-on donner cette fois le bâton de maréchal à un général de brigade, insurgé politique, soit qu’il fut las de guerroyer dans les allées parlementaires qu’on avait rendues à la circulation, le Général décida de rendre le sceptre de papier et se retira sur l’Aventin de sa Lorraine brumeuse pour y attendre qu’on le supplie.
Le pays désorienté qui avait noyé ses lâchetés dans l’Epuration ne croyait plus qu’en l’Amérique. Celle-ci aidera à la reconstruction de l’Europe, et sa générosité sera visible par tous. Quand il fallut le remettre au travail, on s’avisa de compenser les pertes en important une main d’œuvre moins disante pour fouiller nos mines, vendanger nos vignes, ériger en plein vent des cubes de béton pour loger le peuple des bidonvilles et à l’occasion se battre à notre place dans nos lointaines possessions.

Peu à peu on laissa le peuple s’habituer à coloriser les activités professionnelles se réservant celles qui donnaient outre les meilleurs salaires les pensions les plus sûres. Les travaux réputés inintéressants furent laissés aux étrangers, et l’amélioration du niveau de vie par le progrès favorisa l’accroissement de ces secteurs seconds, appelant ainsi à augmenter le nombre des acteurs importés. Les gouvernements comme les industriels ne firent rien pour remédier à cette culture du travail facile ou noble, et laissèrent les gens s’accoutumer à la pénibilité des travaux nègres. Cette aisance à répartir les tâches entre ceux de l’intérieur et ceux de l’extérieur aboutira un jour au culte du non-travail et au déclin moral qu’il ouvre. Mais on n’avait pas atteint encore ce seuil d’abandon bien qu’on s’en approchât dans l’insouciance et l’oubli des leçons subies.

Protégée par les oeillières d’une société convenue et déjà stratifiée, la jeunesse était conviée dès le collège à l’admiration des pays neufs (!), ceux qui allaient finir le siècle aux premiers rangs de la fortune obligatoire, avec à leur tête l’Union soviétique. Décrite si formidablement que les stratèges qui présidaient à la sécurité de la France conclurent à l’imparabilité du choc qui ne tarderait pas, se pressant d’organiser à l’avance cette fois la submersibilité de la résistance de la nation dans un concept lu et mal compris des théories maoïstes qui faisaient alors florès. Cette incongruité militaire jamais envisagée depuis deux mille ans par la « Mère des Armes », la patrie des dragons de Noailles, celle de la furia francese, ce bricolage indigne de la mémoire de nos pères, prit le nom de Défense Opérationnelle du Territoire (DOT) ; et bien qu’elle sonnât creux comme une cloche en tôle de zinc, elle emporta la décision du général le plus altimétrique et capricieux que le pays s’était choisi dans des circonstances troubles sur lesquelles le blogue reviendra un jour, de ne plus nous défendre sur l’Elbe avec nos alliés contre la menace grandissante du Pacte de Varsovie, mais de les lâcher cette fois encore en quittant le commandement intégré de l’OTAN dans le pur style du supplétif indigène parti rejoindre ses frères menacés, et de s’enterrer chez soi, en attendant qu’ils changent d’idées (nos alliés) et qu’ils reviennent nous sortir de l’enfer que nous aurions une fois de plus provoqué.
A la même époque et pour bien faire passer le message à nos alliés ahuris, le Général dotait nos armées et surtout son cabinet présidentiel du détonateur nécessaire à la manœuvre de secours obligatoire qu’il exigerait d’eux quand même. Ce dispositif de contrainte de nos alliés s’est appelé force de dissuasion pour faire illusion dans les bars tabacs. On sait aujourd’hui qu’il n’aurait dissuadé personne et transformé notre pays en Sahara noir.

Dès cet instant, le monde anglo-saxon retirait pour toujours sa confiance à la France ; et selon les circonstances allait œuvrer inlassablement à son abaissement, en ne faisant pas mystère qu’il nous retirait en même temps son parapluie nucléaire.
Par bonheur il n’arriva rien de grave sur le théâtre d’opérations européen jusqu’à l’implosion de l’empire soviétique que personne aux affaires chez nous n’avait prédit, mais les hallucinations de grandeur du Très-haut laissèrent le peuple français exposé, vulnérable et passible d’une totale vitrification pendant vingt-trois ans.

Ce peuple à l’occasion traité de « veaux », et gouverné comme une satrapie persane, applaudira bientôt à la divine surprise de sa jeunesse en révolte, jusqu’à mettre à la retraite d’office le flambeau de son honneur soi-disant regagné, qui l’en avait défié.

Notre vocation universelle enterrée, on ne parla plus que de modernisation, de rattrapage, de laissés-pour-compte, de canards boiteux, de défi américain, bref on réarmait enfin moralement pour faire face à la guerre économique qui pointait son nez chafouin dans la nouvelle communauté européenne et atlantique.

L’heure était à la jeunesse. Après un fondé de pouvoir de banque qui ne jurait que par l’art abscons et les assonances dites contemporaines, le pays se choisit en fanfare un président de 48 ans seulement qui lui jouait de l’accordéon à la télévision. Pour la première fois depuis le temps des rois de France on levait sur le grand pavois un chef d’état jeune. Il portait dans ses gènes quelque chose de Louis XV dont il disait parfois descendre par les chambres de bonnes. Il finit par le croire, transforma le palais en château et sa fonction en pharaon absolu.
Le ridicule de ses exigences – il prétendait être l’unique chef d’état des réunions européennes, les autres n’étant à ses yeux que des chefs de gouvernement, et exigeait en conséquence des égards particuliers -, le ridicule ne le tua point. Il n’est resté de son septennat que trois réformes majeures, la Marseillaise en si-bémol, l’heure d’hiver, le regroupement familial des étrangers sur notre sol. La révolte inopinée des pays pétroliers arabes l’ensevelit. Une affaire de diamants bruts reçus d’Afrique tassa la terre de sa tombe politique. Le peuple vacciné aux lendemains qui chantent se détournera des mânes de Pharaon. Et tombera bientôt du côté de la mauvaise pente. Sic transit gloria mundi.

(à suivre)

Ce Peuple qu'on abîme (IV)

IV./ Le bonheur à crédit (1981-2004)

Dans une stratégie de reconquête de leur pouvoir disparu dans les décombres de la IVème République, les Gauches françaises après avoir tassé dans leurs placards respectifs les cadavres exquis qui en empêchaient beaucoup de dormir, tentèrent de se rejoindre sur un programme commun de gouvernement qui par l’effet du plus petit dénominateur commun agrégea les plus vieilles lunes de l’idéologie marxiste-léniniste. Le peuple fatigué d’entendre qu’il ne sortirait finalement de l’épreuve du marché concurrentiel qu’en sacrifiant une partie de ses avantages sociaux et en travaillant plus énergiquement, le peuple peu disposé à lire dans le Programme les prémices naturels de son avachissement, laissa parler sa rancœur d’un Pharaon lointain et moqué, et choisit à une courte majorité l’archaïsme politique le plus ringard d’Europe, mais le mieux présenté.
La France cette fois encore se distinguait par la médiocrité de ses analyses collectives et son goût immodéré des mirages. Le corps électoral avait été formé à la revendication permanente et à la jouissance sans frein et à crédit. Il choisit le démagogue dans une ambiance de fêtes à outrance.
Que le nouveau président élu soit originaire du mouvement d’Action Française ne sera le gage d’aucun empirisme organisateur, au contraire s’appliquera t’on à mettre en usage les dogmes idéologiques du Programme, cherchant à en financer les extravagances par l’emprunt forcé camouflé en impôt et la nationalisation du crédit.
Le seul effet novateur de cette politique du déficit fut pour la première fois depuis des lustres de faire contribuer les paysans au pot commun de la nation. Jusque là ils étaient intouchables.

Comme à l’accoutumée, on poussa la réforme dans le sens social du « toujours plus » abonnant largement les masses laborieuses et démocratiques à l’état providence, comme pour les droguer.
Le massacre économique et moral du pays qui commençait à peine à se relever du "totalitarisme" gaulliste, ne s’arrêtera que lorsque les comptes de la nation montreront le chemin des abysses financiers qui s’ouvraient sous les pas du prolétariat dictateur.
Les « damnés chics de la terre » qui gouvernaient alors s’activèrent à conquérir les classes aisées et moyennes pour sauver leurs positions du désastre. Les feux étaient tous au rouge. Les comptes aussi.

On rappela les gestionnaires. Ils taxèrent pour survivre. Ils taxèrent le peuple bien sûr, les autres étaient partis.

Il s’avéra assez vite qu’au pharaon avait succédé l’avatar radical-socialiste de Laurent le Magnifique. Ses adversaires l'affublaient parfois de l'attribut "florentin". Il adorait cela et se vêtit bientôt des oripeaux autocratiques de l’image, puis sans aucun autre frein que les limites de son habileté, mit à sa botte la Justice qu’il découragea de poursuivre ses anciens amis francisquains, la Sûreté nationale qu’il dévergonda dans l’espionnage des conversations du tout-paris, et même la haute finance qu’il circonvint dans des initiations coupables promises à son premier cercle.
On chercha à déciller les yeux du peuple trompé en lui montrant que les avantages acquis au milieu de tout ce désordre ne pouvaient se payer qu’en accumulant les traites sur la tête de leurs enfants. Rien n’y fit, le peuple avait été shooté à mort ! Il ne voyait rien qu’on puisse lui arracher au moment et ne voulut se départir d’aucun privilège, quant à ses enfants ils se débrouilleraient bien tout seuls, comme il avait l'outrecuidance de le soutenir en évoquant des luttes qui n'avaient jamais existé que dans l'esprit enfiévré de racôleurs doctrinaires.

Mais le chômage rampant puis ouvertement déclaré comme une pandémie immaîtrisable montrait à tous que les voies ouvertes par la Vème République socialiste étaient pavées de chagrins. Alors ne croyant plus aux discours de préaux de ses élites politiques, le peuple balancera d’une élection à l’autre entre les interprétations ajustées d’une même politique de renoncement et de facilité. Jusqu’à se faire la démonstration que le mal n’était pas guérissable sauf à catapulter dans l’arène close de la nomenklatura gavée, quelque diable de Tasmanie qui la dévorerait. Ainsi crut-on un court instant qu’au pays des aveugles, un borgne ferait le roi !

On arrive aujourd’hui au terme du processus, la France est en tête de liste pour la confiscation par un Etat polymorphe putréfié sauf de la trique, des richesses produites par le labeur de courageux minoritaires, en tête pour le chômage chronique de ses travailleurs et la mise au ban des espérances de plus du double de ceux-là, en tête pour les jours non travaillés et les jours de grève. Les caisses de cet Etat sont claires jusqu’à en voir le fond, les coffres sont vides, chaque semaine le Trésor Public « convoque » les banques de la place pour couvrir l’échéance et sortir les salaires de ses nombreux agents. Un trillion d’euros de dette publique, d’argent que l’Etat doit à la nation qu’il a la prétention de gouverner, dette qu’il creuse sans cesse pour engraisser jusqu'à ne plus voir ses pieds quand il marche !

Jusqu’au jour où ce qu’on appelle « le service de la dette » - les intérêts des prêts consentis - représentera la moitié des dépenses de cet Etat, et que ses créanciers prendront peur ! Le premier à refuser les bons du Trésor de la semaine ne sera peut-être pas le premier à passer la frontière, car à ce signal, la bousculade sera générale.
Un mot, un seul, déclenchera la panique, un mot tel qu’Alexandrie dans une bibliothèque, ou Lapin dans un bateau à voiles, ce mot : « Argentine ».
Là-bas le péronisme stupide et triomphant d’un président syriaque s’acheva dans les cris et les pleurs du peuple au bord de l’émeute. Le pays dut sa survie à la confiscation de l’épargne privée accessible, celle du bon peuple donc, du moins sa fraction un peu fourmi dans ce pays de cigales, les plus avisés ayant depuis longtemps dépêché leurs avoirs aux paradis ad hoc.

Chez nous les comptes sont tous redevenus rouges aussitôt que la croissance économique qui masquait l’impéritie des gouvernements successifs depuis vingt-quatre ans, s’est estompée.
Les bateleurs qui nous gouvernent n’en finissent plus de communiquer sur la réforme incontournable sans vraiment l’entreprendre. Sauf à casser le système, ils n’ont plus les moyens de la vraie Réforme, et l’important n’est-il pas de « gagner les prochaines » d’abord ? Comme le fou qui se prend pour Spiderman et plonge du haut de l’Empire State, on peut leur demander à chaque étage devant lequel ils passent si « ça va ? ». Et eux de répondre bien sûr «que jusque là ça va ! ».

Le splash arrivant à la fin des fins, on prétextera de sa gravité historique pour confisquer avec des mines d’experts à sang froid et contre la promesse de tout vous rendre quand les poules génétiquement modifiées auront des dents, les économies populaires.

A moins que ce ne soit la génération suivante qui ne s’en charge, ayant un beau matin le sentiment de s’être fait volée au coin du bois par la précédente.
Ce pays autrefois moyen, pourra dès lors prendre le leadership des Petits qui grâce à nos références historiques s’en trouveront flattés!

(à suivre)

Ce Peuple qu'on abîme (V)

V./ Le Risorgiamento (2005-…)

La moitié de la France a du mal à admettre soixante ans après la Seconde Guerre Mondiale que la Communauté Européenne l’a sauvée d’un irrémédiable déclin, la forçant à se remettre en question, et en ouvrant un large marché de proximité à ses productions.
Six secteurs seulement se sont maintenus au rang international après bien des attaques provenant de l’intérieur même du pays :
- l’aéronautique et l’aérospatial
- la filière céréalière
- le génie nucléaire
- l’automobile
- le luxe inutile
- la biochimie

Les deux premiers doivent tout à l’Europe. Le dernier est encore très menacé.
Les activités ci-dessus s’exercent toutes sur le marché concurrentiel mondial. La tentation est grande parmi leurs acteurs de rechercher les meilleures équations de production et d’aller souvent faire faire ailleurs pour tenir et améliorer leur rang.
Il ne sert à rien de se dissimuler que l’Europe unie est un acteur économique de référence et de poids, alors qu’aucun de ses membres à l’exception de l’Allemagne ne peut émerger en force sur le marché mondial.

Pour bien comprendre il faut lister les PIB (GDP) en unités de compte comparatives :


N°1 : USA : 100
N°2 : CHINE : 58
N°3 : JAPON : 32
N°4 : INDE : 28
N°5 : RFA : 21
N°6 : GB : 15
N°7 : FRA : 15
N°8 : ITA : 14
N°9 : BRAZ : 13
N°10 : RUSS : 12
(GDP 2003 base dollars, source CIA-Index Mundi)

Où est la quatrième puissance du monde tant vantée lors de l’avènement de Pinarque Ier en 1995 ? Si rien ne bouge au-delà des incantations politiciennes, et cela semble être la maxime de la classe politique, la France finit dernière du TOP-10 dans très peu de temps, ex-aequo avec l’Italie, qui ne s’en sort pas si mal.
Il n’est pas outré de prédire que toute puissance économique inférieure au dixième de la puissance américaine sera tenue pour quantité négligeable par celle-ci, et devra faire où on lui dira de faire, dans le monde de demain.
Dans ce contexte il faut être myope (et rester poli) pour ne pas voir que sans l’Europe nous courions vers le statut enviable de réserve d’indiens la plus visitée au monde. Le pays est beau en plus !

A elles seules, les trois puissances continentales européennes (All+Fra+Ita) passent en 3ème position et avec le renfort de la perfide Albion, qui sait faire le même calcul que nous, surpassent l’Empire du Milieu.
Mais pour que cette puissance s’exerce dans d’autres domaines que l’industrie ou les services, et serve à nous protéger physiquement et culturellement, il faut que les compétences de chacune d’entre elles soient intégrées dans un ensemble qui se meut d’un même mouvement en permanence, comme le poing fermé transporte les cinq doigts où qu’il frappe. Au fait l’Espagne qui n’est que dans le TOP 20 apporte 8 points à notre coalition et le Bénélux 7. Avec six doigts à la main nous sommes redoutables.

Arrivé là, le lecteur comprend déjà que je tiens en piètre estime les souverainistes qui racontent des foutaises sur la France éternelle qui par son génie méconnu va s’en sortir haut les cœurs toute seule. A les écouter, à les suivre, à les laisser vaincre, nous finirions comme le Portugal, formidable pays d’Argonautes régnant jadis sur un empire planétaire, et qui est maintenant aux ordres des moins petits que lui, attendant le mandat de fin de mois.
Le dressage bruxellois du président Barroso épargne de longs discours sur les vertus de la force latente.

Et la France alors ?
Quid de son peuple prétendument abîmé ?
La France ne tiendra son rang que forte dans une Europe forte qui lui servira de truchement. Si nous avons encore des valeurs à faire partager par les gens de la planète Terre, pour leur bonheur, pour la justice, pour leur salut, pour n’importe quoi d’autre qui donne son meilleur sens à la vie humaine, sachons que seule l’Europe unie sera le vecteur disponible de nos ambitions, espérons-le, définitivement pacifiques.

Or l’Europe qui se répand comme on le voit maintenant et comme on l’annonce encore pour demain, se dilue, perd en force et conviction ce qu’elle gagne en statistiques. Cela sera un grand chantier de la "durcir". Il commence par un NON au référendum sur la Constitution de l'Europe molle comme une montre de Dali.

Parallèlement, la France qui fut au cœur du projet, s’est transformée en supermarché politique de sous-préfecture, et crève littéralement sous un état sur elle vautré et trois fois trop grand et lourd pour le pays relatif actuel. Les ambitions politiques qui fusent – il en faut pour avancer – sont clairement électoralistes et quelques part démagogiques obligatoirement puisque le système est fondé sur l’opinion du plus grand nombre possible, donc sur les convictions qu’on lui fait partager à la seule minute où il passe dans l’isoloir. C'est tout un art. Un art du trompe-couillon.
Et encore cela ne suffit-il jamais à trancher les avis contraires et mettre en œuvre la politique choisie démocratiquement puisque la fraction minoritaire se vengera de sa défaite par le sabotage systématique des projets annoncés ou même des décisions prises par la représentation du peuple légalement souverain !

La démocratie telle qu’elle se vit en France depuis 1875 est un théâtre d’ombres ou de marionnettes selon que l’on croit encore au grand Sanhédrin des maîtres de forge ou aux réseaux corruptifs d’une nomenklatura halée par les vacances et indéboulonnable.
Le pays pourrit par la tête.

Pour 61 millions d’habitants répartis sur un demi-million de km², il n’est pas besoin de toutes ces strates exécutives, législatives, administratives et ces assemblées qui ne représentent qu’elles-mêmes mais ne comptent aucun bénévole.

L’appareil de la république pourrait être diminué de moitié sans qu’on en souffre, à part bien sûr de désoeuvrement pour les fonctionnaires mis à pied, encore s’y sont-ils entraînés. Ce n’est pas qu’une économie budgétaire qui nous récompenserait de la réforme mais aussi et surtout la cessation du harcèlement administratif le plus souvent stupide – les chiffres sont les chaînes de l’esprit – qui freine tout élan, et vole du temps en permanence pour faire faire souvent aux usagers les ajustements de dossier que les bureaux multiples sont incapables d’administrer eux-mêmes. N'importe quelle administration transportée sans qu'elle le sache sur la lune pourrait y travailler en vase clos au moins un an avant que de s'apercevoir de son expatriation.

Il en va autant des corps représentatifs. Nous avons 346 sénateurs sans pouvoirs autres que de propositions, et 577 députés. En comparaison le Etats-Unis, sept fois plus puissants que nous, ont 100 sénateurs qui tranchent et adoubent les ministres du gouvernement de Washington, et seulement 438 représentants ; les deux réunis forment le Congrès qui vote le budget, à 538 !
Passons sur nos 1880 conseillers régionaux qui ne pensent qu’à s’augmenter dès que Raffarin aura le dos tourné ; et 3800 conseillers généraux de département qui sont peut-être les plus utiles car de plein pied avec les besoins du citoyen.

Comment voulez-vous courir vite si chaussant du 40 vous portez du 45 ! C’est exactement le problème de la France, elle a de trop grandes godasses pour atteindre la vitesse des autres concurrents dans le marathon mondial.

Ajustons-nous, ramassons-nous, condensons-nous. On peut encore les battre.

Un état central compact permanent, dialoguant avec une représentation nationale resserrée et compétente, élue pour un seul long mandat de neuf ans par exemple, les uns et les autres débarrassés des tentations démagogiques de l’électoralisme à tout crin. Des gens d'honneur puisqu'il en reste !

Au-dessous, faisons confiance au génie humain et laissons courir partout la liberté de faire dans les limites des lois et mœurs communément acceptées et défendues.

Combien faudra-t-il de temps attendre pour voir s’effondrer cette république à bout de souffle qui ne mobilise plus que la moitié de ses électeurs, qui pis est redivisés en chapelles dont aucune toute seule ne dépasse les quinze pour cent des votants, soit 7 ou 8% des ayant-droits à la carte d’électeur ?

La nomenklatura émigrée bientôt, sinon garée dans les hospices avec les baby-boomers jouisseurs qui n'en finiront pas de geindre sur leur moindre confort, les prévaricateurs bannis aux Kergelen avec le trop plein de nos prisons, la nation réconciliée avec un chef digne, honnête et respecté, viendra le jour de la jeunesse de France, celle qui ne se décourage pas, qui aujourd'hui s'expatrie sans hésitation dès qu'elle a un projet à porter, qui demain ensemencera à nouveau le pays de sa créativité, de sa persévérance, de sa pugnacité.
Et en deux générations nous redeviendrons le coeur battant d'une l'Europe unie et forte qui aura envoyé entre misaine et beaupré ses couleurs offensives juste au-dessus des nôtres.

(fin)

vendredi 4 février 2005

L'Europe et le Roi

Quarante pour cent des Français refuseraient le projet de constitution européenne du pharaon Giscard d’Estaing, à des motifs divers, le premier n’étant rien moins que les 488 pages qu’ils ne comprennent pas. Avaient-ils compris quelque chose à la constitution crypto monarchique du général De Gaulle avant que de l’approuver ? Là n’est pas la question.

L’article I-2 du projet stipule que : " L’Union est fondée sur les valeurs de respects de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’état de droit, ainsi que le respect des droits de l’homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités. Ces valeurs sont communes aux Etats membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité, et l’égalité entre les hommes et les femmes".
Que redire à cela ?
Le manque de souffle.

On aurait aimé entendre le galop des Chevaliers teutoniques dans les brumes de Courlande, le fracas des haches saxonnes sur les cornes normandes à Hastings, le chant funèbre des Porte-glaive sur la Vistule, et couler le fleuve métallique de l’or du Temple sur fond de psaumes débités par les castrats pontificaux. Au lieu de quoi on nous sert une déclaration supplémentaire des droits du citoyen, digne, libre, démocrate, égal à son voisin, bon avec les nains, aimant les marginaux et la diversité, pas raciste ni excité par le tapage nocturne, juste avec les forts, compatissant avec les faibles, volontaire chez le percepteur et concupiscent de la femme d’autrui.

Alors de guerre lasse et effrayé par les 487 pages qui suivent, on court à l’amalgame, et abandonnant juste une heure l’obscure constitution, on se jette à la tête le Turc. Alors là, j’irrupte, m’offusque et aboie, ce qui n’est pas bien, non de le faire mais à qui.
Dans le meilleur mensuel que la Cause produise, je lis une relation de voyage en Turquie de quelqu’un qui prétend aux plus hautes destinées, si Dieu se penche. Il est contre la Turquie dans l’Union, et d’énoncer les griefs sans presque respirer. Auxquels notre envoyé spécial auprès du Divan, Jules Schneider, répondit pied à pied sur le site de la RN, ce qui est proprement irrespectueux et passible de la Bastille - on me dit dans l'oreillette que c'est passé de mode.

1/ La géographie: " Regardons la carte: non seulement la partie européenne de la Turquie est minuscule (5% de sa surface), mais 5 de ses frontières voisinent avec l’Asie, dont des pays de haute insécurité " dit le prince.

Sauf votre respect Monseigneur, la carte géographique n’est pas un argument fondamental. Dans quel continent situeriez-vous l’épopée grecque, puis la splendeur byzantine, et les fastes ottomans ? Si vous en citez un, vous n’avez pas écouté ma question (sorry).
(b) La Turquie est frontalière de 4 pays cartographiés en Asie : Iran, Irak, Syrie et … Chypre. Ses voisins du nord ne se disent pas en Asie. Ils sont d’ailleurs du type " caucasien ".
Citons les deux les plus connus de notre distingué lectorat :
- L’Arménie devint à la chute de l’Empire grec un royaume puissant, bientôt vassal de Rome. Elle devint en l’an 300 de notre ère le premier état chrétien de l’histoire et se couvrit d’églises et monastères. Toute son histoire, ses heurs et malheurs la projetèrent au nord ou à l’ouest, pas en Asie.
- La Géorgie, pays de la Toison d’Or des empereurs barbus d’Occident, se convertit au christianisme au IVè siècle et le pays se couvrit d’une architecture religieuse remarquable. Dans les lettres et les arts le pays atteint son apogée au XIIè siècle sous la reine Thamar. N’a jamais pataugé en Mésopotamie !

(c) Dans l’espace-temps actuel, le voisinage d’états dangereux ne s’inscrit pas au débit de la sécurité. Les Etats-Unis loin de tout ce beau monde ont eu le Onze Septembre. L’Espagne … Madrid, quid du prochain ? Peut-être serait-il avisé au contraire de s’approcher de la gueule du tigre pour bien lui planter le pieu au fond de la gorge.

2/ La démographie: 70 millions d’habitants actuellement, près de 200 en 2020, avec une fécondité de 2,5 enfants par femme. " Cette croissance démographique rend utopique et dangereux tout projet d’intégration européenne ". Monseigneur nous rappelle aussi qu’à Bruxelles le premier ministre turc Erdogan, en a fait un argument économique : "Nous représentons 60 millions de consommateurs supplémentaires". La démographie a aussi des incidences politiques : " Ce qui apparaît incroyable, dans cette affaire, c’est que l’on envisage en toute inconscience qu’en 2020 la Turquie puisse afficher un plus grand nombre de députés que la France au Parlement de Strasbourg !"

Oui, la démographie est un vrai problème, mais de l’Europe d’abord.L’incidence démographique sur sa liberté de choix est patente déjà, avec ou sans la Turquie. La vraie question serait plutôt de savoir ce qu’elle compte faire devant la montée en puissance d’empires populeux comme l’Inde, la Chine. La Turquie n’est qu’une alerte prémonitoire.
(b) Quant à la perte d’influence de la France au parlement intermittent de Strasbourg, elle est déjà avérée pour de multiples raisons, la plupart de son fait, et ce n’est pas fini. Qu’en restera-t’il en 2012 ? Suivez juste le classement des PNB …

3/ La religion et la culture: Même s’il existe une tradition laïque depuis Atatürk, en Turquie la quasi-totalité de la population est de religion musulmane. Monseigneur souligne que : " C’est un pays profondément musulman, tant par son architecture que par sa population. (…) Ce qui m’a frappé, ce sont surtout les innombrables mosquées et le nombre toujours plus considérables de femmes voilées. A première vue, il est évident que rien ne rattache ce peuple à la culture européenne. (…) Tout nous sépare de la Turquie: philosophie, histoire, religion. On ne construit pas une Union politique sans un partage de fondamentaux acceptés par chacun des membres " ».

Jusqu’à vous surprendre, Monseigneur, la religion, je ne discute pas.
( b) Mais quand je lis "A première vue, il est évident que rien ne rattache ce peuple à la culture européenne" je me dis qu’il faut changer les lunettes de première vue et se souvenir que l’Empire ottoman à son apogée fut un empire balkanique. Ses possessions asiatiques et africaines étaient plutôt des colonies, comme en eurent les empires « européens». Le cœur battant de l’empire était ici.

(fin du plaidoyer de Jules Schneider)

Ce en quoi nous saurions approcher la perception de l'exotisme ottoman du prince Jean , est que l'Europe unie telle qu'on nous la vend à Vulcania, est en fait une construction ... idéologique, même si l’adjectif est galvaudé et connoté marxiste.Construction, concept, artificiel, créé par l'homme sans intervention de Dieu, etc... ensemble flou !
Quelles sont les Valeurs de l’Europe ? Quelle Europe prétend-on construire ?

Tout le monde connaît les valeurs et monter à l'assaut de l'Europe est pour certains manière de contester ces Valeurs sans enfreindre apparemment le consensus démocratique. Le prince ne peut être dans ce camp, et il n'y a aucun doute ici. Mais ces valeurs se sont estompées derrière la marchandisation de l'Europe.
Dès l’entrée du Royaume Uni, l’Europe a muté en concept idéologique attrape-tout. Mais pas plus que ne le furent avant elle le Saint Empire divers et varié, les empires romains d’Orient et d’Occident, l’empire d’Alexandre et tant d'ambitions transnationales ! Dans cette Europe nouvelle mouture, la France qui n’a plus de projet européen national depuis longtemps, va se fondre et diminuer relativement en taille.Mais sans l’Europe, la France aurait déjà disparu des écrans radar, et passerait faire la quête au FMI chaque fin de mois. Sans parler de son siège au Conseil de Sécurité ... parfaitement anachronique.

La seule vraie Europe qui aurait marché, eût été l’Europe des Six, arrondie à 7 ou 8 (Autriche et Danemark). Celle que nous voyons s’épandre aujourd’hui est une mosaïque multiethnique jamais tentée de mémoire d’homme, qui manque cruellement de projets édérateurs forts, et de chefs viscéralement convaincus.

Mais cette Europe ramassée, forte, respectée est toujours faisable. Au sein de la confédération qui se dessine, avec ou sans les Turcs, Moldaves, Poldèves, Ukrainiens, Arméniens du haut et du bas Karabah, Géorgiens and so on, fédérons-nous étroitement à 6, 7 ou 8. Et nous l’aurons le cœur battant du futur vrai empire. Qui voudra s’agréger devra répondre aux critères de cette fédération, et non comme on a vu à la Convention les critères établis pour englober tout le monde. Ceux qui resteront en dehors de la fédération seront ses meilleurs partenaires économiques, et pourront aussi bénéficier de primes au développement (pour autant qu’ils se développent en utilisant nos productions).

Epilogue

Nous avons maintenant un argument politique fondé pour voter NON au référendum.

Dynamitons la Tour de Babel qu’on nous propose (faute de mieux) et laissons la zone de libre échange de la CEE se développer au mieux jusqu’au plus loin. L’Ukraine est candidate depuis hier.
Et sur les débris de la Tour construisons cette Fédération de l’Europe Occidentale ou Atlantique si on préfère, dans laquelle nous nous intégrerons complètement pour la vivifier.

En ces jours d'artillerie, revenons au Carlisme

Si l’on vous demande ma chère cousine¹ dans le feu de la canonnade légitimiste que vont échanger nos royales maisons ce qu’est le Carlisme espagnol, répondez que c’est le parti de l’honneur, et nul avocat plus aimable que celui-ci ne saurait plaider sa cause.

LE PARTI DE L'HONNEUR

On vous a demandé, ma chère Angèle, ce que c'était que ce Carlisme dont on parle tant à propos des événements d'Espagne. Bien que vous soyez un peu fâchée contre moi parce que je n'admire point M. Blum et que je désire du fond de mon coeur voir M. Cot au diable, vous m'interrogez à ce sujet.
Pour vous, comme pour beaucoup d'aimables Françaises, tout votre savoir sur ce point vient de Pour Don Carlos, qui est un fort agréable roman de M. Pierre Benoît, et que j'ai vu au cinéma muet il y a déjà longtemps. Vous confondez un peu Allegria Detchart et la Passionnaria dont vous parle le Populaire, et vous vous demandez si tous les Carlistes sont semblables à l'excellent sous-préfet du pays basque.
Mais quand j'ai demandé pour vous ce que c'était que le Carlisme, l'Espagnol auquel je m'adressais est devenu grave et m'a répondu:
"C'est le parti de l'honneur."

Je trouve le mot assez beau et très espagnol; de cette Espagne attirante où la France, depuis tant de siècles, du Cid à Hernani et au Soulier de satin, est allée chercher les images du risque, de la jeunesse, de la confiance et de la parole donnée, même si, ce faisant, elle se trompait dans l'expression. Je ne suis peut-être pas un très grand clerc en matière de Carlisme, et je ne pourrais rendre des points à M. Pierre Benoît. Mais j'essaierai de vous renseigner.
Je n'ai pas besoin, ma chère Angèle, de vous rappeler comment est né le mouvement: en 1833, le roi Ferdinand VII abrogea la loi salique, afin de laisser le trône à sa fille Isabelle. Son frère don Carlos se souleva, fut proclamé roi sous le nom de Charles V et soutint plusieurs années une guerre sanglante.

En 1860, son fils reprit la lutte. Enfin, en 1872, le neveu de ce dernier fit naître la dernière grande guerre carliste, qui dura quatre ans. L'an passé, le dernier descendant de Don Carlos, Don Jaime, chef de la maison de Bourbon, est mort. Ses droits ont passé à son oncle, un vieillard de 82 ans sans héritier direct.
Après lui, les partisans carlistes se rangeront probablement dans les rangs des "alphonsistes", Alphonse XIII, descendant d'Isabelle, étant l'héritier légitime de la dynastie. Il est peu probable qu'ils aillent chercher un Bourbon Parme, et, d'ailleurs, le mari d'Isabelle était aussi un Bourbon. Vous voyez que, raisonnablement et logiquement, le Carlisme est un parti sans avenir.

Mais vous avouerai-je que ce qui me touche plus que tout dans ce mouvement si parfaitement espagnol, c'est son apparente inutilité? Pour un vieillard de 82 ans, des provinces s'enflamment, et elles ont trouvé un chef, ce Falconde héroïque dont toute la Navarre s'émeut. C'est que le Carlisme n'est pas une doctrine de politiciens: c'est une doctrine de fidélité. Le principe dynastique est irréfutable, et tant que le dernier descendant de Don Carlos sera vivant, l'honneur commande de le suivre.

A cette fidélité primordiale se rattachent d'ailleurs d'autres fidélités. On s'en apercevra suffisamment si l'on songe qu'à la fin de la monarchie, le Carlisme avait à peu près disparu à la Chambre: aux dernières élections, devant les dangers du communisme et de l'anarchie, il a conquis un grand nombre de sièges. I1 se réveille quand l'honneur est oublié. Dans la révolution nationale d'aujourd'hui, à côté des fascistes de Primo de Rivera, les Carlistes de Falconde se battent au premier rang pour la grandeur et la liberté de l'Espagne. Libre à André Chamson de prétendre que le mouvement national est "coupé du peuple": ce menteur à prébendes sait pourtant que les populations de Navarre qui se soulèvent sont pauvres. Ce sont des paysans de la montagne qui partent trouver Falconde avec leurs curés, et leurs curés les bénissent et les confessent avant le combat. Ils meurent pour une idée incarnée, pour la justice, beaucoup plus que pour un intérêt immédiat.

Ajoutons que le Carlisme, si idéal qu'il ait toujours été, a la force et la précision réaliste des grandes doctrines. Le principe qui a fait son importance est l'union de l'autorité et des libertés. C'est au nom des fueros que se sont soulevées trois fois, au cours du siècle dernier, les provinces du Nord. Par là, et même si les prétendants n'ont pas toujours été à la hauteur du grand enthousiasme qu'ils soulevaient, le Carlisme montrait un vif sens politique.

Lorsque les rois d'Espagne seront revenus sur leur trône, il est à souhaiter qu'ils s'inspirent de ce libre régionalisme qui peut seul sauver l'unité nationale. En Navarre, en Andalousie, à Valence, et surtout à Barcelone, c'est cette politique décentralisée, et elle seule, qui pourrait réussir.

Qu'on ne s'étonne donc pas de voir un mourant sans héritier aider au soulèvement de l'Espagne. Car ce qu'il entrame à son seul nom, ce sont des idées assez fortes et assez belles, et ceux qui le suivent le savent bien. Mais on aime que l'exacte discipline des volontaires carlistes, que leur mépris de la mort, que leur enthousiasme s'attachent à une image aussi pure, aussi dépouillée des combinaisons et des contingences.
La pureté, voilà une notion que nous n'avons guère accoutumé de rencontrer en politique.

J'espère vous avoir montré, ma chère Angèle, qu'elle s'allie à un sentiment assez précis des remèdes nécessaires, à un juste réalisme. Mais elle demeure la pureté. Les horreurs de la guerre civile nous auront au moins appris à connaître son étrange présence. On ne saurait espérer de la presse du Front populaire, de Vendredi, de M. Chamson, de M. Guéhenno, des curés rouges et des antimilitaristes affamés de décorations qu'ils saluent et respectent le parti de l'honneur. Au moment où ils donnent l'exemple d'une bassesse aussi accomplie et d'une gloutonnerie aussi naïve, nous pouvons pourtant nous consoler si l'honneur, quelque part au moins, n'est pas tout à fait oublié.

Robert Brasillach (août 1936)

Vous voyez bien cousine¹ que la prédiction s'avère vraie avec Juan Carlos. Pour décorer ce post, explorez les armes de Ferdinand VII d'Espagne qui n'eut que des filles et reprenez l'affaire à partir de son frère Charles V.

Blason offert par l'Héraldique européenne qui sur leur site le déploie dans tous ses fastes.

Armes de Ferdinand VII de BourbonPosted by Hello


Note (1) : NDLR : il s'agit de Fleurdelys de VLR1


Ce que je crois

Je suis devenu royaliste par conviction, bien que tombé dans la marmite tout petit.

Souvent opposé à mon camelot de père sur des questions de stratégie de conquête du pouvoir, j'ai fini par croire que la Vè République dériverait vers un régime autocratique et représenterait une monarchie élective sans le nom. Au bout du compte, et du décompte, il n’en est rien, l’état républicain n’arrête pas d’enfler, la bureaucratie se régénère en permanence, le système pèse sur la nation comme une baleine morte qui nous prive de tout mouvement vers l’avant; sauf un saut dans l’abîme.
Abandonnant la monarchie élective à la polonaise, j'ai fait table rase de mes espérances crypto-monarchistes pour promouvoir la monarchie absolue à la française.

"Mon" dogme c’est « l’autorité en haut, les libertés en bas ».

En haut un exécutif ramassé et compétent gérant les fonctions régaliennes de l’Etat que l'on peut rassembler en quatre ou cinq domaines, justice, défense et sécurité, finances publiques, relations extérieures, contrôle des corps et comptes de la nation.
Un état compact, respectable, respecté, sévère mais juste, débarrassé de ses prétentions colbertistes anachroniques.

En face de cet exécutif, un parlement national élu à la proportionnelle au suffrage universel (ce n'est pas orthodoxe dans le parti royaliste) faisant office de représentation de la nation dans son tout, chambre de réflexion et de proposition, de questionnement. Le Sénat actuel serait très bien dans ce rôle. Et le bicamérisme qui est un face-à-face modérateur selon Montesquieu, vivra dans le jeu de miroir du parlement national et du parlement de Strasbourg.

Entre cet étage et le pays profond, rien !
... d’imposé d’en haut.

Les provinces s’organiseront comme elles l’entendent sur leurs deniers propres qu'elles lèveront elles-mêmes, convoqueront des parlements locaux pour légiférer
dans les domaines de compétence que lui reconnaîtra la Charte que l'on décalquera sur la constitution de la Vè République. Elles organiseront leurs chambres professionnelles, ordres divers, selon leur bon plaisir, sans souci d’uniformité. Elles coopèreront entre elles à la carte ou au menu; ce ne sera plus l'affaire de l'état central ! Liberté totale en bas. Liberté totale encadrée par les choix périodiques des électeurs, qui au moins seront consultés sur des choses qu’ils pourront appréhender plus facilement qu'une constitution européenne !
Il faudra tout de même créer ou recréer ces provinces car on ne pourra se satisfaire des régions de programmes actuelles trop artificielles et qui n'ont pas pris racine dans le terreau national.

On obtiendra rapidement :
Economies de fonctionnement;
Auto-gestion de la dépense publique;
Compétence enfin de l'électeur appelé à trancher des questions d'ordre municipal ou provincial, et déléguant comme aujourd'hui ses humeurs politiques aux députés;
Lustre retrouvé de l'Etat central.


Quel besoin dès lors d’organiser ce grand tournoi de poker menteur à double language qu’est l’élection présidentielle quinquennale ?

La France peut se reconnaître dans un chef d’état permanent obéissant à des lois de gouvernement qui ont fait leurs preuves, et choisi automatiquement hors de toutes procédures coûteuses et quelquefois dégradantes; ce que j’appelle le principe capétien. Il faut quelqu'un de digne, capable et déconnecté des "ambitions de pouvoir".
Un roi fait parfaitement l’affaire. Notre histoire nous le montre, le futur nous le confirmera.

Non pas un roi potiche Wedgwood, mais le chef de l’exécutif.
Eduqué pour cela, conseillé par des gens de qualité qui ne devront leur position ni aux dévergondages de la démagogie ni à un affairisme débridé, ayant le temps devant lui, il donnera au pays les meilleurs atouts pour la compétition mondiale qui s'est déclarée comme une guerre économique.

Et pour les coeurs de sang, nous aurons quelqu'un à aimer.
Vive donc le roi !

Tout ceci fut "découvert" par Charles Maurras qui de sa plume incisive traça les contours de l'épure, l'autorité en haut, les libertés en bas, comme jamais personne ne sut mieux le faire ensuite:
"Il faut tendre à éliminer de l'Etat politique d'un grand pays tout élément de démocratie parlementaire et républicaine. Cet Etat politique doit être indépendant. Cet Etat politique doit être « absolu », mot qui signifie indépendant en latin, et qui doit être répété, dans son sens, par tous les esprits sains qui, n'étant pas malades, n'ont pas la peur des mots, qui est une maladie. Il y a des questions qui ne peuvent être réglées sans une indépendance souveraine : là, le chef de l'Etat politique doit être un souverain indépendant, donc absolu."
"Mais il faut tendre à éliminer de la vie sociale tout étatisme. Il faut constituer, organiser la France, ou plutôt la laisser se constituer et s'organiser en une multitude de petits groupements, naturels, autonomes : véritables républiques locales, professionnelles, morales ou religieuses, d'ailleurs compénétrées les unes par les autres, mais se gouvernant par libres conseils spontanés. Le parlementarisme, expulsé de l' Etat central, peut se réfugier dans ces Etats inférieurs, à condition que l' Etat central soit demeuré le maître de la diplomatie, des armées de terre et de mer, de la haute police, de la haute justice, et soit assez fort pour veiller de haut à toutes les fonctions d'intérêt général."

Apanage en débat

Le 8 décembre dernier, Mgr le comte de Paris titrait son neveu Charles Philippe d’Orléans, duc d’Anjou. Or depuis l’accession de Louis XVIII au trône de France, le titre était transmis régulièrement parmi les aînés des Bourbon d’Espagne, avec les armes* qui l’accompagnent.

Cette titulature au sein de la branche cadette fut entendue comme une bordée de 380 par la conscience des Carlistes, et au jour d’anniversaire de la mort du roi Louis XVI – est-ce intentionnel et lié au souvenir de Philippe Egalité le régicide ? - la duchesse de Ségovie (91 ans mais bon pied, bon œil) lui répond, la main sur l’épée.
*armes du duc d'Anjou Orléans Posted by Hello


DÉCLARATION
DE LA DUCHESSE D'ANJOU DOUAIRIÈRE,

DUCHESSE DE SÉGOVIE

Ayant appris qu'Henri d'Orléans avait sans aucun droit concédé le titre de duc d'Anjou à son neveu Charles Philippe, « grand maître de l'ordre de Saint-Lazare », je proteste devant ce nouvel acte inconsidéré qui sème encore plus la discorde dans la Maison de France dont mon petit-fils est le chef.

Depuis le prince Jacques duc de Madrid, filleul d'Henri V et propriétaire de Frohsdorf avec tous ses souvenirs royaux, les aînés des Bourbons ont porté le titre de duc d'Anjou qui fut celui du petit-fils de Louis XIV avant d'aller régner en Espagne en tant que Philippe V. Dès le décès de mon regretté fils aîné, ce titre est maintenant porté par le prince Louis, et ne peut être porté par un cadet.

Cet acte injurieux à son égard vient après d'autres actes similaires d'Henri d'Orléans :

1.-Les procès qu'il intenta à mon fils aîné puis à son fils et qu'il perdit.
2.-L'affront fait à tous les Bourbons d'Espagne issus de Charles IV en déclarant qu'ils ne descendaient que d'un courtisan.
3.-La prise du titre insensé de duc de France qui ne correspond à rien dans notre tradition et qui laisse entendre une mainmise sur la Nation.
4.-Sa prétention à se nommer de Bourbon, ce qui lui fut refusé par la Cour d'appel de Paris et la Cour de cassation en 2002, ces hautes juridictions soulignant à juste titre que ce n'était pour lui qu'une manœuvre pour se proclamer par la bande chef de la Maison de Bourbon.

À ce dernier acte est joint une décision d'attribuer à Charles Philippe d'Orléans les armes de France* à la bordure de gueules qui fut celle des ducs d'Anjou cadets, tant Valois que Bourbons, et donc du futur Philippe V. Là encore c'est une usurpation des prérogatives de mon petit-fils et même une injure faite à mon neveu le roi d'Espagne, chef de la deuxième ligne, et donc chef, comme descendant de Philippe V, de ces armes pieusement gardées depuis 1700 sur le tour des armes de son royaume afin de commémorer l'origine de ses rois restés princes des fleurs de lis malgré tant de péripéties politiques.
Ces armes ont toujours été respectées dans la famille des rois de France, et ce à un point tel que les comtes de Provence et d'Artois ont brisé cette bordure pour ne pas la porter pleine, alors qu'ils étaient aînés par rapport à la branche d'Espagne, le premier en la dentelant, le second en la crénelant.

L'ignorance de notre histoire et de nos traditions est d'autant plus pénible quand on la constate chez les princes de cette Maison de France dite encore Maison de Bourbon depuis le traité de Montmartre en 1662, à seule fin d'éliminer les Courtenay qui ne descendaient que de Louis VI le Gros et non pas de saint Louis, traité scandaleux et qui fut vite oublié. Il est vrai que pour ne pas avoir l'air de gêner la France privée de ses Rois légitimes, nous avons surtout parlé de Maison de Bourbon dans notre famille, Henri V faisant souvent de même ainsi que ses successeurs.
Mon beau-père Alphonse XIII fit savoir qu'il était chef de la Maison de Bourbon à la mort du dernier prince carliste en 1936 et en modifia ses armes devenues de France plein.
C'est ainsi que mon petit-fils est l'aîné, donc le chef de cette Maison de France ou de Bourbon. Il n'a pas choisi cette position qui lui a été donnée par Dieu et nul doute que c'est une obligation pour lui et sa grand-mère française que de veiller activement sur les droits et devoirs des princes de notre sang, qu'ils soient français ou étrangers.

Parmi ces devoirs est celui de refuser la fiction d'une grande maîtrise de l'ordre de Saint-Lazare éteint par les papes et les rois de France, et je renvoie à ce sujet à l'instruction du grand chancelier de l'ordre royal de la Légion d'honneur en date du 5 mai 1824 pour l'exécution de l'ordonnance de Louis XVIII en date du 16 avril précédent.
Les Français fidèles et même tous les honnêtes gens de France et d'ailleurs ne sont pas dupes des comédies d'un prince navrant et qui ne sait conserver sa place. Je sais que des membres de sa famille ne le suivent pas dans ses débordements.

Je prends donc Dieu et les Français à témoin de ma protestation devant les actes et positions de cadets ambitieux.

Et je prie « le Christ qui aime les Francs » et Marie reine de France, pour l'unité de la Maison royale, afin que la paix dans l'ordre règne parmi nous.
Nous nous devons de donner l'exemple et ce témoignage de charité chrétienne.

Paris, le 21 janvier 2005.  Emmanuelle de Dampierre


Article paru dans Steppique Hebdo

On se reportera avantageusement à une déclaration antérieure du professeur Bouscau qui a, semble-t'il, tenu la main de la duchesse de Ségovie dans son cri outragé.
http://www.royaute.org/extraits.htm#5

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