vendredi 30 juin 2006
Des vanités particulaires
Le paon symbolise la roue solaire, sa plume seule, l'orgueil bien placé. L'orgueil étant cousin de la vanité, il sied d'assimiler maintenant la procédure après le paragraphe héraldique. Avez-vous un beau nom, mademoiselle, comme aurait dit Jacques Laurent ?
Article 61 du code civil : "Toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander à changer de nom./ La demande de changement de nom peut avoir pour objet d'éviter l'extinction du nom porté par un ascendant ou un collatéral du demandeur jusqu'au quatrième degré./ Le changement de nom est autorisé par décret".
Le notaire me précise : La demande doit être adressée au Ministre de la Justice.
Elle comprend les motivations de la personne ; et une proposition de noms de remplacement par ordre de préférence. Le changement de nom est autorisé par décret. Toute personne peut s’y opposer dans les deux mois de sa publication au journal officiel. Le changement de nom prend effet une fois le délai d’opposition expiré ou après le rejet de cette opposition. Le changement est mentionné en marge de l’état civil. Il s’étend aux enfants de moins de 13 ans. Pour ceux de plus de 13 ans, leur consentement est requis. Le changement de nom doit être publié à la Conservation des hypothèques si nécessaire, par exemple si la personne avant de changer de nom, était propriétaire d’un bien immobilier, ou avait bénéficié d’une donation ou donation-partage de ses parents.
Il faudra donc contacter son notaire à cet effet. Le Conseil d'Etat statue en dernier ressort.
C'est ainsi que la lecture de la dernière page du Journal Officiel de la République est un moment de détente très prisé des bureaucrates obligés par leur fonction à lire le quotidien le plus triste du pays :
Il y a le changement de noms insupportables; quoique certains en fassent une arme redoutable, tel ce professeur d'université du midi, colonel de réserve, qui au premier amphi de l'année, écrivait son nom au tableau et disait d'un ton de commandement :" Connard ! C'est mon nom ! Vous avez quatre minutes de rigolade obligatoire, ça vaut pour tout le reste de l'année !" Sans particule, je le savais de la Haute, apparenté aux ambassadeurs Seydoux et au champagne Krug.
A côté de cela, on trouvait - moins aujourd'hui - le relèvement de noms disparus par les filles ; mais il était rare d'y croiser un relèvement trivial comme Germain ou Blouzot, par contre "de Saint-Germain" ou "de Labarrère de Blouzot" avaient leur chance.
Le plus tordant reste la naturalisation des rastacouères. Les Grandchamps, Beauchamps, Lavallée, Lavalière, tout ce qui fait "de-vieille-souche" a la cote.
Quand ça ne mange pas de pain, on peut en sourire et comprendre que la plaque future de marbre noir ne soit pas destinée à secouer de rire les affligés qui passeront à l'ombre des ifs, devant un Gaston Culard ou Emile Bitar. La vraie vanité est ailleurs, dès lors qu'il s'agit de relever un nom célèbre tombé en déshérence, des armes prestigieuses, en visant jusqu'au château un jour prochain à vendre et à s'y employer. Et trois générations plus tard, quand les témoins de l'usurpation auront disparu, les rejetons seront enracinés dans le haut Moyen Age, chasseront à courre et causeront dans le grand monde, s'ils ne se cherchent pas quelque bâtardise royale pour continuer sur l'échelle de la gloire innée.
Pour y parvenir, il faut avoir déjà ses entrées au Conseil d'Etat.
Le plus surprenant est quand cette quête de la riche particule est le fait de parvenus, reconnus par ailleurs pour leur intelligence et leur hauteur de vue, et quand cela demande le travail appliqué et rigoureux de trois générations. C'est la saga des Giscard.
Papa Edmond, grand serviteur public, très sensible aux ornements sociaux, obtint en 1922 du Conseil d'Etat de relever le nom d'Estaing, illustre famille qui se distingua à Bouvines en sauvant Philippe-Auguste, ce qui leur valu les trois lis de France sur leur écu avec une simple brisure en chef d'or. Cette famille de robe courte fut toujours comptée parmi les parents du souverain ; elle érigea le clocher de la cathédrale de Rodez, eut prélats et comtes en conseils du roi, et finit avec le vice-amiral Charles-Henri d'Estaing, vainqueur aux Antilles et guillotiné à Paris le 28 avril 1794.
Le motif déclencheur de la revendication de M. Edmond était une trisaïeule Lucie d'Estaing (+1844) descendant d'un Joachim, dit d'Estaing parce que bâtard de Charles d'Estaing (+1661), condamné pour usurpation de noblesse mais autorisé à porter le nom de son père présumé.
Le lien avec la bureaucratie républicaine des Giscard-Bardoux n'est pas évident - c'est un euphémisme - mais le décret de 1922 fut édicté sous la IIIè République où certaines choses étaient plus faciles à obtenir qu'aujourd'hui. Les sarcasmes entendus dans la brillante carrière politique de VGE ne les freinèrent pas dans leur investissement nobiliaire. Président de la république, il fit des représentations pour être admis parmi les Cincinnati, descendants des combattants américains et français de la guerre d'Indépendance ! Il avala l'affront de n'y être admis qu'en viager, le titre ne pouvant poursuivre. Son frère, Olivier, prit la mairie d'Estaing (Aveyron) afin de clouer les planches du théâtre à amuser les gueux du cru. Le père ayant acquis le château de Varvasse à Chanonat, le fils ne pouvait faire moins que de se hisser jusqu'à celui d'Estaing. Les frères en SCI l'ont racheté récemment sous les applaudissements du conseil municipal dont il grevait par de trop le budget.
Il ne restait qu'à s'approprier les armes aux trois lis et chef d'or ! Le petit-fils Frédéric (*1986) vient d'éditer les siennes. Les 3 lis y sont. Ouf !
Il n'est plus que de relire désormais la fable du geai et du paon.
mardi 27 juin 2006
Le sou du roi
Puisque nous allons parler en livres autant commencer par expliquer la monnaie :
La monnaie du royaume était la livre tournois de 240d (deniers) ou 20S (sols) de 12 deniers. La livre tournois "pesait" en 1640 0,619g d'or pur, mais elle fut dévaluée et réévaluée avec un creux à 0,124g en 1720 lors de la banqueroute de Law pour remonter à 0,312g jusqu'en 1785.
On estime généralement sa valeur entre 5 et 8 euros d'aujourd'hui. On frappait toutes sortes de pièces. Sous Louis XVI :
- en argent : l'écu de 6 livres, le petit écu de 3 livres, le 1/5 d'écu de 24 sols, le 1/10 d'écu de 12 sols, le 1/20 d'écu de 6 sols.
- en billon : les pièces de 2 sols, 1 sol 1/2, et 1 sol.
- en cuivre : le liard double ou 1/2 sol de 6 deniers et le liard de 3 deniers.
On croisait plus rarement les monnaies d'or : le double louis de 48 livres, le louis de 24 livres dit 4 écus (le pourboire de Louis XVI à Varennes), le 1/2 louis de 12 livres. .
Les monnaies n'étaient pas frappées de leur valeur nominale ce qui facilitait la dévaluation. Il fallait les reconnaître en diamètre et en poids. On ne frappera les valeurs faciales qu'après l'année 1789 dite "An 1 de la Liberté".
Quant au pouvoir d'achat de cette monnaie, il varie considérablement dans le temps et s'avère difficile à comparer à celui de nos jours par l'accroissement de productivité des biens qu'elle pourrait acheter aujourd'hui. Disons qu'un laquais de 1750 avait 200 livres de gages par an en ville ; un maître d'école élémentaire à la campagne, 125£.
Les registres fiscaux sont une source inestimable pour mesurer le poids de l'attention que porte l'Etat au sens le plus large, à un lieu donné.
En 1740 Sumène "valait" 17481£ en impôts directs.
6481£ de droits ecclésiastiques et seigneuriaux
9000£ de taille, appliqués au compois de 1655
2000£ de capitation
On ne peut décompter les impôts indirects : franc fief, gabelle, marc d'or, centième denier, menue dîme et casuel, et bien d'autres.
La taille (ou impôt foncier)
Le territoire de chaque paroisse était mesuré en parcelles et de chacune d'elle on estimait le revenu, le présage, calculé en livres d'allivrement, une unité de compte. C'était l'assiette de la Taille. La livre d'allivrement était ensuite valorisée en livre tournois (£). En 1722 elle valait 4£16S, en 1789 elle était à 10£, la Constituante la porta à 18£.
Le présage paroissial établi sur le compois de 1655 était de 1676 livres d'allivrement. La paroisse devait donc contribuer pour 8061£ de taille en 1722, et pour 16762£ en 1789 ; 30168£ de taille en 1790 ! La crise financière de l'Etat n'était pas un concept abstrait réservé aux effervescences parisiennes.
La collecte de la taille était adjugée avec un rabais rémunérateur pour celui qui se chargeait du doux travail de levée de l'impôt. Cette remise était d'environ 18 deniers à la livre, ce qui ferait un coût de collecte de 7,5%. On est bien loin des coûts de collecte de l'administration fiscale actuelle.
La capitation (ou impôt personnel)
C'était un impôt réparti par le conseil de communauté (municipalité) sur chaque tête et qui tenait compte des revenus, des activités (patentes de négoce ou d'industrie). La capitation de 1722 leva 1910 £ à Sumène.
Ainsi sur 2500 âmes réparties sur 2500 hectares les impôts "césariens" de taille et capitation de l'an 1722 représentaient 4£ par tête. Ce qui ne semble pas excessif mais nous ne sommes pas dans le jugement des esprits de l'époque. Il n'y avait que 500 capités. Il faut y ajouter la dîme, les banalités, droits divers et les impôts locaux.
La dîme et le casuel
La dîme perçue par l'Eglise était, disait-on, le patrimoine des pauvres. L'Eglise assurait les secours aux indigents par ses bureaux de charité, fournissait le dispensaire et bien sûr le salut garanti des âmes. La dîme prélevée tournait autour de 3000£ (3980£ en 1790). Il est amusant de lire le rapport de mission de l'évêque Séguier qui avait décidé de faire baiser l'anneau p toutes les paroisses de son diocèse en 1675. Le rapport donne l'état des lieux de chaque communauté et commence ainsi :
- Sumène : Il y a 200 communiants et autant de huguenots. Le bénéfice appartient au chapitre de Nîmes et vaut 1150£ de rente. ...
- St Martial : C'est un bénéfice qui appartient à l'Evêque de Nîmes et de 1500£ de rente. Il y a plus de 400 ...
- St Laurent : Prieuré de 500£ de rente de la collation de l'Evêque de Nîmes. Il n'y a que 2 ...
- St Julien : Prieuré cure de 500£ de rente. Il n'y a point d'église ...
- St Bresson : Prieuré cure de 100 écus de rente tout catholique. Il y a ...
- Cézas et Cambo : Bénéfice du chapitre de Nîmes affermé 700£ ; 50 catholiques ...
- Le Vigan : petite ville assez jolie. Le bénéfice aujourd'hui simple était autrefois monacal, il vaut 2000 ou 2500£ de rente. Il n'y a 70 communiants.
Etc.
On l'imagine, comme dans les films anti-cléricaux, suivi d'un char sinistre portant les coffres de fer du fisc épiscopal.
Une paroisse était considérée comme une métairie en production inscrite sur la liste des revenus d'un évêché ou d'un chapitre voire d'une abbaye.
La dîme de Sumène était de 1800£ en 1680, mais atteindra 3980£ en 1789. Le chapitre cathédral de Nîmes touchait aussi les redevances féodales du prieuré qui avait donné des parcelles à bail, et les fermages en propre. S'y ajoutait les dons manuels ou les legs testamentaires des âmes sauvées, que l'on disait considérables. A côté de la dîme, l'institution percevait le casuel, abandonné aux desservants de la paroisse sans doute parce que difficilement contrôlable.
Le casuel d'une cure était formé par les honoraires de messes ou de prestations particulières aux fidèles, comme les mariages, de visites aux malades, la confession, les messes pour les morts et surtout les bénédictions de sépultures. Le casuel était une source de revenus importante étalée tout au long de l'année. La Communauté en tant que telle y abondait aussi.
Les impôts locaux
La charte d'émancipation organisant la franchise municipale de Sumène fut arrachée à la Maison d'Anduze en 1275 pour six mille sols tournois. Le Conseil Général de la paroisse était depuis lors élu chaque année par l'Université, c'est à dire l'ensemble des chefs de famille résidants et propriétaires sans distinction de position sociale. Deux consuls étaient tirés au sort sur deux listes, l'une de la ville, l'autre de la campagne. Les Consuls élus devaient prêter serment devant le Seigneur le 31 décembre. Le Premier de l'an ils étaient en fonction et leurs biens hypothéqués en garantie de leur gestion (on frissonne à observer la situation actuelle ; Chirac aurait été ruiné par Paris). A noter que l'autorité royale n'était pas conviée au chapitre, même si Louis XIV força le passage avec des charges vénales de maires permanents qui furent abolies plus tard. La première chose était d'établir le budget municipal.
Le budget primitif de la Communauté de 1744 approuvé par le Gouverneur du Languedoc, l'Intendant, l'Evêque d'Alès était de 400£. Il couvrait les dépenses administratives de base auxquelles la Communauté ne pouvait se soustraire, et c'est pour cela qu'il était soumis à Toulouse.
S'y ajoutait un budget complémentaire de 1043£ non soumis aux Etats, qui rémunérait deux maîtres et deux maîtresses d'école et leurs loyers, qui contribuait au casuel du curé et rétribuait le missionnaire royal (on était en pays réformé). La Communauté comptait sur 880£ de recettes dont 680£ de banalités (four et moulins), le reste en leude et courtages. Les registres ne disent pas qui couvrait le déficit prévu donc à 563£, les habitants ou les familles des enfants scolarisés.
Nous avons gardé pour la fin les droits seigneuriaux. Les plus importants étaient la Censive et le droit de Lod que les emphytéotes versaient à la Directe. Il faut expliquer un peu le système féodal sachant de prime abord qu'il n'y a pas de théorie générale, tant est variable et divers selon les temps et les lieux, ce droit du Nord qui est un droit coutumier non écrit et interprété sans cesse par ses bénéficiaires et ses débiteurs.
Le principe féodal (nulle terre sans Seigneur) gère d'abord la terre et son revenu avant que de créer des pyramides de suzeraineté ou des exploits de chevalerie. La terre de la baronnie d'Hierle appartenait à la Narbonnaise romaine et de ce fait était cadastrée complètement. Les Wisigoths récupérèrent le droit latin en 416 et l'appliquèrent à la gestion de leur conquête jusqu'à l'invasion franque de 526 qui força la loi barbare coutumière.
Deux modèles de Seigneuries se partageaient les pays chacune à son niveau, la Justice et le Fief. En dehors d'eux subsistait l'exception confirmant la règle, les Alleux. Ces trous noirs fonciers provenaient de concessions wisigothiques laissées aux collaborateurs gallo-romains et réglées par le droit romain. Les alleux, il y en avait de nombreuses sortes, était un héritage libre et franc d'Hommage et de Directe, mais soumis quand même au devoir de Justice.
La Justice était une seigneurie qui possédait originellement des droits régaliens, merum imperium, sur tous les habitants de sa juridiction, à savoir, justice criminelle et civile, pouvoir militaire, droit de lever les troupes et de se fortifier. Sumène dépendit le plus longtemps de la Justice d'Hierle.
Le Fief n'avait rien de commun avec la Justice. Le Fief était un concept foncier. Le seigneur du Fief n’avait d'action que sur les possesseurs de terre et uniquement en raison de cela. Le Fief étant une concession de jouissance du sol, on comprend qu'il y eut un propriétaire original distribuant les fiefs. C'est le Seigneur Féodal, dont le droit au sol était imprescriptible et s'appellait Directum Dominium. Ce seigneur était ainsi appelé Seigneur Directe. Il concèdait des parties de la terre à des tiers pour leur mise en valeur à travers un bail dont les conditions particulières, en l'absence de codex, variaient à l'infini. Le loyer du bail était la Censive. Le bénéficiaire de la concession était l'Emphytéote qui obtenait l'entière jouissance de la terre concédée et la transmettait à ses héritiers. Il pouvait même l'aliéner sous réserve des droits de la Directe qui choisissait soit de préempter par son droit de Prélation, soit louer la vente et percevoir le droit de Lod.
Mais ce n'est pas fini. Le propriétaire original ou celui d'un fief pouvait céder tout ou partie de ce fief sous réserve des droits de mouvance. L'acquéreur devenait son vassal et le Directe des emphytéotes installés sur le Fief. C'est la Maison d'Anduze qui avait la Directe du territoire de Sumène.
Les censives étaient établies à Sumène sur 450 possessions et se réglaient chaque années en céréales, chataignes, vin, cheptel, gibier, coton, journées de corvées ou monnaies. Certains droits, toujours contestés par la Communauté, étaient appliqués sur les foires, marchés, cours d'eau et diverses banalités non-concédées comme droit de four, de moulin, de puisage, mesurage, poinçonnage, mercurage.
Outre la censive, les propriétaires devaient le droit de Lod sur les mutations de biens immeubles et fonciers d'environ quinze pour cent de la valeur déclarée.
L'acquisition de Fief ou même de Justice par un roturier était soumise au droit de franc-fief à 5% du revenu des vingt prochaines années. Ainsi l'acquisition d'une parcelle rendant 500£/an était actée après le versement préalable de 500£ au receveur.
Les droits féodaux étaient nombreux et varièrent considérablement à mesure des transactions et franchises arrachées par les vassaux et les simples sujets.
Qu'est-ce qui n'allait pas finalement ? Tout ! Le contribuable percevait mal où était le "retour" sur contributions dans les services fournis par l'Etat. Par exemple l'Eglise prenait 3000£ pour un service qui n'en valait pas 400. Il assistait à la parade des privilèges et ne supportait plus l'inégalité fiscale et ses arrogances. Le Tiers allait s'insurger.
Il suffit de lire le cahier des doléances de la Communauté de 1788 pour comprendre l'exaspération. Sans infliger au lecteur le document complet on relèvera pour ce qui nous intéresse quelques termes :
Préambule
"... Si par suite d'erreurs perpétrices d'âge en âge il y avait dans un empire diverses classes de citoyens dont les droits et intérêts soient différents et souvent opposés, une multitude d'abus par suite desquels les moeurs civiles et domestiques même soient altérées au point que l'oisiveté soit récompensée et l'homme inutile honoré, un tel empire doit périr". (c'est envoyé !)
Voeux :
- Que tous les contribuables soient appelés à élire des députés aux Etats Généraux librement et à la pluralité des suffrages
...
- Que tout contribuable soit éligible
...
Attendu que l'allivrement de Sumène est le plus considérable après celui d'Alès, capitale des Cévennes, que sa population est d'environ 3000 âmes dont 519 payent la capitation, l'Assemblée adhère à cette délibération et prie le 1er consul ... etc." (le dernier coup de semonce est fiscal)
Suivent 259 signatures à commencer par le marquis de Sumène, trois familles nobles et toute la bourgeoisie, ce qui prouvent que la perception du désordre était générale au premier niveau de la nation. Deux nobles ne signèrent pas ; paradoxalement ce furent les plus ardents révolutionnaires du pays.
Bossuet avait affirmé que "Dans tous les Etats, le peuple contribue aux charges publiques, c'est-à-dire à sa propre conservation: et cette partie qu'il donne de ses biens, lui en assure le reste, avec sa liberté et son repos". De son côté Vauban avait écrit "Qu'un Etat ne peut se soutenir si les sujets ne le soûtiennent. Or, ce soutien comprend tous les besoins de l'Etat, ausquels par conséquent tous les Sujets sont obligés de contribuer."
La Révolution aux abois fera contribuer les deux classes privilégiées qui modéraient leur enthousiasme contributif, par la confiscation de leurs biens.
La sagesse est mère de sûreté, mais les Bourbons avaient oublié que les impôts étaient réputés par les Etats Généraux anciens comme un don des Etats, qui exigeaient en retour un sens aigu de l'économie du gouvernement central. "Ne découvrez pas nos autels pour couvrir les dames en cour", disaient les abbés. Les fastes princiers et les guerres n'avaient jamais été populaires ; le seigneuriage (ou faux-monnayage légal) encore moins, sauf pour les paysans endettés ; les exemptions fiscales de tous ordres, plus du tout ; il était venu le temps de le faire savoir au roi qui avait déclaré la banqueroute le 16 août 1788. Mais d'autres aspirations prendraient le pas sur la finance.
Cette note est une évocation du système fiscal. Si elle a excité la curiosité du lecteur, il est prié de se reporter aux ouvrages nombreux qui traitent la fiscalité de l'Ancien régime, domaine insondable.
Références bibliographiques en ligne ou non
La fiscalité en France http://membres.lycos.fr/gpfpme/dates_03.htm
Histoire de Sumène, Boiffils de Massanne, Editions du Vieux Pont
Histoire de Lentillac, http://www.quercy.net/qmedieval/histoire/hist_lentillac/moy_age.html
Histoire du temps passé http://www.amicale-genealogie.org/Histoires_temps-passe/Impots.htm
lundi 26 juin 2006
La justice du roi
ou comment était jugé un bourg de la baronnie d'Hierle en Bas-Languedoc, Sumène, d'après ce que nous en a dit Boiffils de Massanne devant le caveau de qui je me découvre chaque année au mois d'août.
"Nulle terre sans seigneur, Nul seigneur sans terre", le principe wisigothique fondera le système féodal. Ce principe territorial explique l'organisation plus moderne qui lui succèdera et surtout la nécessité d'un cadastrage des valeurs et des servitudes. Le régime féodal est avant tout foncier. Deux autorités se partageaient le pouvoir sur la terre d'Hierle :
- le baron qui était Seigneur, c'est à dire chef des possesseurs de fiefs et souverain des roturiers ; et parallèlement à lui,
- l'Evêque qui prélevait la dîme.
Après le 16è siècle, l'encadrement territorial de Sumène, participait de l'organisation suivante, déclinée ici de haut en bas. On mesure l'emboîtement du féodal et de l'administration césarienne civile ; le système féodal sera grignoté par le roi jusqu'au drame de la Révolution.
- Etats Généraux du Languedoc à Toulouse (parlement souverain)
- Gouverneur de la province (prince du sang), ses lieutenants généraux.
- L'Intendant de Justice, Police et Finances, à Toulouse, la vraie cheville ouvrière de l'Etat.
- Les Intendants-subdélégués répartis généralement par diocèses, dans le cas présent celui d'Alès. C'étaient les Subdélégués qui détenaient le pouvoir visible. Ils en avaient bien plus que nos préfets : justice, police, fisc et droit coutumier local. Ils pouvaient aussi modifier les juridictions subalternes. Ces fonctions étaient souvent dans les mains d'une famille qui risquait de les transformer en mini "vice-royauté" jusqu'à ce que l'Intendant de la Province se lasse. Le Subdélégué dont dépendait Sumène résidait au Vigan de son propre choix.
- La Sénéchaussée de Nîmes, d'origine militaire (noblesse de robe courte) ; le sénéchal perdra au 16è siècle ses pouvoirs militaires et judiciaires au bénéfice de magistrats civils, mais son titre sera maintenu et les jugement rendus en son nom.
- La Viguerie du Vigan ; idem, le Viguier d'épée sera supplanté par le Juge de la Viguerie dépendant du Subdélégué civil, mais conservera son titre.
L'ETAT JUDICIAIRE
(de la première instance à la cassation)
Les "tribunaux de simple police" qui réglaient les civilités ordinaires assuraient le maintien de l'ordre à travers des juridictions spéciales comme la maîtrise des eaux & forêts, les juges voyers pour les règlements de voirie, les juges gruyers (garde chasse), la connétablie qui jugeait les "points d'honneur".
Au civil, le justiciable s'adressait à l'Officialité ordinaire du bourg. C'était la justice de paix de première instance au niveau seigneurial. Elle jugeait souverainement jusqu'à 50£ de dommages. Le tribunal était présidé par un viguier nommé par le seigneur, et le ministère public était assuré par le procureur fiscal qui disait le droit ; le viguier nommait deux assesseurs parmi les hommes de loi du cru.
En appel (au-dessus de 50£) on allait devant la Cour royale du Vigan qui était compétente jusqu'à 250£.
Elle était présidée par un Viguier d'Etat jamais présent à l'audience, un Juge commun, deux lieutenants, principal et particulier, et d'un Procureur du roi.
Au-dessus, mais on pouvait l'atteindre sans passer par la cour du Vigan, il fallait aller à Nîmes à la Cour Présidiale du Sénéchal présidée par un Juge-Mage et disposant d'un grand nombre de conseillers qui formaient un tribunal de sept membres à chaque audience. Elle jugeait en dernier ressort jusqu'à 300£ au nom du sénéchal qui ne siégeait jamais, et avec une possibilité d'appel, jusqu'à 500£.
A côté de ceux-là il y avait les tribunaux exterritorialisés (attributifs de juridiction) qui jugeaient à charge d'appel les parties ayant convenu de trancher leur différent en se présentant devant eux, sans obligation de résidence. Deux tribunaux étaient courus dans la région du Bas-Languedoc, celui des Conventions Royaux de Nîmes et celui du Petit Scel de Montpellier. Leurs jugements étaient exécutoires par tout le royaume. Ces tribunaux offraient la possibilité de plaider localement une affaire dont la partie défenderesse aurait transféré son domicile par exemple à Lille. Aujourd'hui il faut aller au tribunal du ressort du domicile du défendeur.
La justice criminelle était entre les mains du baron ou marquis selon l'époque. Bien qu'ayant dans leurs pouvoirs la justice haute et basse, ils hésitèrent toujours à pendre. Le juge seigneurial de Sumène ne connaissait que les contraventions et petits délits. Les délits plus graves montaient à la viguerie du Vigan. Les crimes valant galère ou la vie étaient soumis au Présidial-Sénéchal de Nîmes ou à celui de Montpellier.
La justice ecclésiastique était représentée par l'Officialité diocésaine d'Alès qui jugeait la simonie, le blasphème et l'hérésie. L'exécution des sentences était déférée à l'administration séculière. L'Officialité d'Alès n'étant sans doute pas assez féroce, elle ne jugea aucun huguenot rebelle. On chargea les Présidiaux-Sénéchaux de Nîmes et de Montpellier du sale travail à l'endroit des Camisards.
La justice consulaire était rendue à la Bourse de Montpellier qui connaissait les disputes commerciales, nombreuses sur cette route marchande, véritable route de la soie méditerranéenne qui allait de l'océan et des Pyrénées à l'Empire.
Au sommet de tout cela, on trouvait la Cour souveraine du parlement de Toulouse. Le parlement des Etats de Languedoc faisait cour d'appel du dernier ressort, cour de cassation et assemblée législative quand il édictait lois ou règlements. Siégeaient aux Etats, le gouverneur (un prince du sang jamais présent), ses lieutenants-généraux, l'Intendant, les Syndics généraux de la province, tous les évêques, les titulaires de baronnies représentant tous les possesseurs de fiefs, les consuls de certaines villes plus importantes.
Le parlement avait compétence sur tout, droit civil, pénal, coutumier, féodal et droit canon. Il n'en fallut pas beaucoup plus pour qu'il juge aussi des ministres.
Le roi tint à modérer les prétentions des parlements et furent ainsi crées à part d'eux la Chambre des Comptes et la Cour des Aydes.
La cour souveraine des Comptes Aydes et Finances de Montpellier jugeait en dernier ressort toutes les contestations de taille, capitation, et tous crimes et délits concernant les impôts. Elle jugeait aussi de la "noblesse" du fait des exemptions fiscales qui lui étaient attachées.
Ce tribunal fiscal avait développé ses rameaux en installant des magistratures ad hoc servies par des officiers des Finances nombreux. Ainsi pouvait-on comparaître devant des Greniers à sel, Commissaires de francs fiefs, Trésoriers de France ; tous siégeaient à Montpellier.
Le système judiciaire connu sa clef de voûte avec le Conseil des Parties, établi par le roi au niveau du royaume.
Ce conseil présidé par un Chancelier était composé de Conseillers d'Etat et de Maîtres des Requêtes, avec la prétention de casser les arrêts des parlements et régler les juges. Il faisait office de ce que de nos jours on appellerait Conseil d'Etat et Constitutionnel.
Qu'en retenir ?
Le pays était très administré par un croisement de justice féodale de proximité et d'une justice "professionnelle" d'Etat ; celui de Languedoc bien sûr. Le roi - au sens de la fonction - intervenait dans le domaine judiciaire par le truchement de ses intendants qui eux-mêmes au plan judiciaire se limitaient le plus souvent à régler les juges, et à surveiller les délibérations du parlement. L'Intendant avait une grande liberté exécutive du fait que le Gouverneur restait à la cour du monarque, et même sans cela car il avait autorité sur une administration ramifiée ; si son développement n'était pas uniforme, il n'en était pas moins universel.
Le maillage judiciaire désordonné mais serré suscitait paradoxalement les contestations. Les guichets de justice étant nombreux et pourvus, le pays était très "plaideur". La première en importance de ces contestations surgissait de l'opposition inlassable entre les coutumes aborigènes et celles imposées par les Francimans. A noter qu'il n'y avait en Languedoc ni serf, ni "homme de poëste" contrairement au Nord, puisqu'il avait été jugé au Moyen-Age que le débiteur de droits féodaux gardait celui de s'exonérer des devoirs y attachés en abandonnant le fonds grevé. Les autochtones se réclamaient d'une constitution antérieure à la conquête franque, supérieure bien sûr à la loi barbare, leurs seigneurs faisant de même en invoquant leur loi ancestrale qui en valait bien autant. Pour régler les conflits entre ces "âges d'or" réciproques, il y avait transaction.
L'Ancien Régime fourmille de transactions ; mais en Languedoc les innovations dans la tradition devaient être ratifiée par la convocation des citoyens visés à un scrutin d'acceptation. Ces mutations fréquentes obligeaient à tenir un relevé précis des possessions, titres et droits attachés. Ce furent les livres terriers qui remplirent ce rôle en commençant par le cadastre ecclésiastique. Le territoire de Sumène était repris en détails sur cinq cadastres :
- le Cartulaire du chapitre ecclésiastique de NîmesOn devine bien que dans cette "anarchie juridique" le pays était devenu le paradis de la Chicane. Et la Chicane, passionnée de rationalité, sera conquise par le discours des Lumières jusqu'à devenir le fourrier de la république. Ce pullulement juridique et la jurisprudence produite n'amélioraient pas la lecture des droits fondamentaux des gens et surtout ne diminuaient pas, bien au contraire, la pléthore d'abus mineurs et de contradictions de tous ordres. Finalement à la porte de la Révolution plus rien ne coïncidait entre les deux systèmes, féodal et césarien, tout était disparate. Il fallait réformer.
- L'Aveu de Justice, dénombrant tous les droits appartenant au seigneur justicier
- L'Aveu des Fiefs, dénombrant tous les droits des possesseurs d'un fief
- Les Cahiers emphytéotiques, dénombrant les reconnaissances féodales consenties par les emphytéotes à leurs seigneurs directes. Ces cahiers furent détruits à la Révolution.
- Le Compois municipal évaluant chaque parcelle et son revenu, sur lequel on répartissait la dîme et la taille.
La mutation vers un despotisme éclairé ne put aboutir. Malgré un souci ardent de justice qu'on lui reconnaît aujourd'hui, le roi chercha à préserver les droits anciens de sa charge, faute de savoir ou pouvoir imposer aux privilégiés les réformes indispensables qu'il avait pourtant fait rédiger.
La monarchie capétienne n'avait eu de cesse de réduire le régime féodal en ignorant peut-être que ce faisant elle se saignait, puisqu'elle en était issue. Elle disparut avec lui. La Justice devint alors pour une longue période, politique.
Nous espérons que cette notice donnera au novice une idée du droit d'Ancien régime, lui épargnant ainsi la lecture d'une somme de 600 pages, ce que la présente ne saurait bien évidemment pas, remplacer. Une prochaine note est en préparation sur le même schéma pour la fiscalité.
Références bibliographiques :
- Histoire de Sumène, Boiffils de Massanne, Editions du Vieux Pont
- Les justices ordinaires, inférieures et subalternes de Languedoc : essai de géographie judiciaire, 1667-1789, Didier Catarina, Université de Montpellier III.
mercredi 21 juin 2006
La Route Royale des LDF
Chers amis,
Nous vivons des temps de grands périls, les forces de destruction issues des Lumières répandent de nos jours cette nouvelle utopie de la banalité. Notre société en refusant de se référer à Dieu passe à l'aphasie et perd son âme en même temps qu son orientation. Pourtant, le christianisme est le critère intrinsèque de notre civilisation, il détermine la structure des valeurs et éclaire la raison. La faillite des Lumières qui a développé la rationalité scientifique ne pouvait laisser place qu'au nihilisme et au relativisme, une sorte de résignation devant la vérité que l'on ne peut atteindre. Le vide des âmes pousse alors les hommes à l'apathie, à l'indifférence et les font tomber dans la misère intérieure, libératrice mais démoniaque.
Le "phénomène" Da Vinci Code et le film Marie-Antoinette illustrent cette perversion de l'esprit qui sont aussi les conséquences de l'inculture et de l'ignorance. Cette crise de l'intelligence plonge les esprits dans le conformisme totalitaire de la pensée dominante, et ce viol de la conscience aboutit à l'amnésie culturelle et spirituelle. Dès lors, toute démarche apologétique ne permet plus de répondre aux inepties colportées, la vérité historique se confondant avec les affabulations.
Nous ne pouvons ignorer que seule la vérité sauve et rend libre tandis que la contre-vérité altère et corrompt les coeurs comme les âmes. C’est autour de la vérité que les français pourront réaliser une nouvelle unité. Les Francs nés libres doivent aujourd'hui se libérer en esprit. On ne peut pas échapper à la mémoire de nos racines et à la reconquête de notre identité. L'Histoire est une force d'où l'on tire des enseignements porteurs d'avenir, ce passé révolu se conjugue et se recompose au temps présent.
Défendre la cause royale, c'est faire vivre notre riche héritage culturel et d'être fidèle au voeu du prince Alphonse "de maintenir un courant intellectuel, de rappeler la vérité historique d'un régime millénaire". Avec Les Lys de France, je souhaite mener par un dynamisme missionnaire le combat de l'intelligence et du coeur. C'est aussi pour répondre au nécessaire engagement des laïcs chrétiens à la vie sociale et des idées de la Cité, rappelé par sa sainteté le pape Benoît XVI dans son encyclique "Deus caritas est", que nous devons mener ce combat pour les valeurs en discernant ce qui est conforme au vrai, au beau et au bien pour laquelle saint Benoît fit lever l'aurore d'une ère nouvelle.
La Route Royale (dimanche 25 juin 2006) s'inscrira dans le souvenir des Cisterciens, cette force spirituelle qui était aussi celle de saint Louis doit encore nous animer. Alors qu'il est en mer avec sa flotte pour se rendre en Terre sainte, une violente tempête s'abat sur eux. A minuit, tout semble perdu. Le roi s'adresse alors à son équipage en ces termes : "Ne craignez plus, voici que Dieu va nous visiter et apaiser la tempête. C'est l'heure où les moines de Cîteaux se lèvent pour chanter les matines". La tempête s'arrête alors.
En septembre, une Lettre d'informations sera adressée à tous les adhérents des Lys de France. En outre la rentrée qui s'annonce sera aussi marquée par la présence du prince Louis et de la princesse Marie-Margueritte à l'occasion de la messe de fondation des Invalides (24 septembre 2006) et du colloque "Marie-Antoinette (30 septembre 2006).
Je reste persuadé que je pourrai compter sur votre soutien pour faire vivre la flamme de l'espérance et faire refleurir Les Lys de France.
Président
BP 80 434
75327 Paris cedex 07
nicolas.chotard@wanadoo.fr
Le programme de la Route Royale du 25 juin aux Vaux de Cernay commence à 10 heures par une visite-conférence de l'abbaye; il est disponible sur le site des Manants du Roy en cliquant sur le chat botté. Prévoir son pique-nique dans le parc du château de Breteuil.
lundi 19 juin 2006
Le principe et les frasques
Les royalistes sont toujours effondrés quand la justice rattrape un prince éminent. Quels que soient les motifs de ces arrestations, et celle du prince de Savoie n'a pas le mérite de leur limpidité, nous avons le sentiment amer que notre propagande est chaque fois sérieusement entamée. Le roi est rentré au pays, - la loi d'exil a été abrogée par Silvio Berlusconi en 2003 - un juge hyper médiatique, beau comme un manequin Armani, qui cultive chaque matin une barbe de quatre jours, se paye le roi !
Nous n'avons pas d'éléments plus que ceux que la presse italienne rapporte ; graves et bénins à la fois, selon le degré de moralité de chacun. Le curseur de Royal-Artillerie est réglé sur "moyen" pour cause de lassitude au spectacle du monde.
Le fils du prétendant italien (prétend-il vraiment,demandons-le à Monarchico) est poursuivi en France pour hacking sur un site web hostile à la famille de Savoie. Le prince Siméon de Saxe-Cobourg & Gotha, Siméon II csar* des Bulgares, serait quand à lui poursuivi pour corruption ; ce qui pour nous ne correspond pas du tout au personnage qui a sorti la Bulgarie de la gangue communiste, et montra beaucoup d'humilité et d'efficacité dans sa fonction de premier ministre pour raccrocher son pays à l'Union européenne.
Une question adressée aux excellences et monseigneurs ne peut être évitée :
Les princes sont-ils conscients que toute dégradation de leur image entame les efforts des militants royalistes qui oeuvrent inlassablement à la "restauration" de la monarchie dans leur pays, en débitant un argumentaire difficile à vendre auprès de sceptiques qui veulent bien les écouter et se laisser convaincre ?
En France nous avons la chance que les deux princes de la nouvelle génération sont à tous égards impeccables, bien qu'un peu timides quant à leur exposition médiatique ; mais à tout prendre, un "recours" n'est pas meilleur s'il est une étoile de la jet-set.
Dès qu'il s'agit de monarchie, on pense aussi à la famille royale. On peut légitimement exiger de la famille, le même comportement exemplaire qu'on demande à l'héritier titulaire de la charge. Défions-nous donc par nos applaudissements de valoriser la pacotille de certaines postures, et restons en la, comme disent les musiciens.
La question seconde est doctrinale :
Le principe prime-t'il le prince ? Autrement dit, le système monarchique du modèle capétien est-il intrinsèquement supérieur à toute autre, au point de déclasser le risque du mauvais numéro de série dynastique au niveau de l'épiphénomène, le résultat sur la durée restant indubitablement positif pour la Nation. Nombreux sont ceux qui l'affirment. Le système digère la médiocrité temporaire. N'ayant ce matin ni les compétences d'historien ni celles de constitutionnaliste exigées par cette énorme question, nous n'y répondrons pas et laisserons Anthinea dérouler un peu de doctrine.
Maurras considère la Politique comme une science, une "physique sociale", à la manière de son maître Auguste Comte, et refuse de lui appliquer le seul critère de l'opinion. L'étude de l'Histoire doit nous permettre de dégager quel régime est souhaitable pour un pays comme la France. La monarchie, véritable matrice de la Nation, institution stable pendant près de mille ans, adaptée au tempérament français par le frein qu'elle met aux ambitions et aux rivalités des chefs de parti, apparaît alors comme bien supérieure aux différentes républiques, régimes instables oscillant sans cesse entre anarchie parlementaire et appel à des autorités charismatiques de type providentiel (Napoléon, Pétain, De Gaulle)..."
La fonction sublimerait au sens chimique le titulaire, mais la contestation la plus banale d'un auditoire reste quand même celle du mauvais numéro de série dynastique, fou, incompétent ou malhonnête. L'Alliance Royale esquisse certaines réponses :
Mais si le roi est fou ?
AR. Le président de la république Paul Deschanel n’était-il pas fou ? En mille ans de Monarchie, le cas c’est peut-être présenté avec Charles VI. En réalité, il était malade. De plus, un roi ne gouverne pas tout seul. Il a des conseillers, lesquels sont tenus par une institution. Même malade, la seule présence du roi assure la stabilité du pouvoir. C’est là un avantage de l’institution royale. Par contre, c’est sous la république de Weimar qu’Hitler a été élu. Et Danton, et Robespierre avec la Terreur et tous ses massacres.
Et si le roi est incompétent ?
AR. Même d’intelligence moyenne, le roi est élevé dès l’enfance pour son métier de roi. Aujourd’hui nous élisons les meilleurs... candidats, et les meilleurs candidats font rarement les meilleurs responsables politiques. Par exemple, si Henri III avait été élu, il aurait fini par être renversé par le duc de Guise, ultra populaire à un moment donné, anti-protestant acharné, et qui n’aurait pas manqué de rallumer la guerre civile. De plus, les rois peuvent s’entourer des meilleurs hommes : Suger, Sully, Colbert. Tandis que les hommes politiques miseront plutôt sur des médiocres car ils ont trop peur de la concurrence. Tenez, si Louis XIII avait été élu, jamais il n’aurait gardé Richelieu. Et ne pensez-vous pas que le système actuel est par nature incompétent avec des majorités qui font et défont ce que les autres ont fait et défait juste avant ?
Mais le roi ne fera les lois qu’en fonction des ses intérêts !
AR. Est-ce que vous connaissez dans votre entourage ne serait-ce qu’une personne capable de croire que les hommes politiques actuels se préoccupent sincèrement de l’intérêt des citoyens ? Non. Ils ne font jamais de loi contre leur intérêt ou contre les intérêts de ceux qui les ont fait élire. Le roi, au contraire, a déjà le pouvoir. Il sait que ses enfants l’auront aussi. L’intérêt du roi est le même que celui du pays sur lequel il règne. Quel intérêt aurait-il de régner sur un pays appauvri ? Aucun. Certains diront qu’un roi de France peut faire ce qu’il veut. Qu’ils méditent ces paroles. Monsieur Chirac a actuellement plus de pouvoir que Louis XIV. Un roi de France est responsable, et s’il se montre parjure à un certain nombre de serments et de lois, ses sujets sont délivrés du serment de fidélité, alors qu’un président jouit de l’immunité. La république est un régime irresponsable.
Ces réponses ne tarissent pas complètement l'inquiétude car il reste beaucoup de situations floues. Que faire d'un roi martien comme Louis II de Bavière ? Attendre patiemment qu'il se noie comme Ophélie !
Nous encourageons les tenants du "principe d'abord" à articuler savamment et méticuleusement leurs démonstrations, car nous prédisons que lors de la campagne électorale, le vulgum pecus qui lit la presse générale, va opposer aux avantages si évidents de l'offre politique royaliste, "les frasques du prince".
Affiche de campagne de la famille de Savoie en 1946 (de la part de Monarchico). Umberto II a la main sur l'épaule de son fils de dix ans, Victor Emmanuel, prévenu aujourd'hui.
Note : (*) Simeon II n'a jamais abdiqué, sa famille avait émigré volontairement par crainte d'être liquidée éventuellement par les services soviétiques. Il est donc toujours csar des Bulgares.
samedi 17 juin 2006
Plus forte est l'influence
Rama IX dont on fête les soixante ans de règne est un souverain constitutionnel qui ne gouverne pas. Neuvième roi de la dynastie des Chakri qui règne en Thaïlande depuis l'époque de Louis XVI, ce vieux roi (il a 75 ans maintenant), impeccablement droit, fier, attentionné et digne, est pour son peuple déjà un des grands de la mythologie thaïe. Son autorité morale servie par une vie exemplaire, a été mise à contribution dans ce royaume de la diversité, comme un liant entre des antagonismes ethniques et économiques puissants. Si le régime parlementaire institué en 1932 peut en principe ignorer tel sourire, recommandation ou remontrance du roi, il doit compter avec l'opinion attentive des peuples du Siam qui, elle, est influencée par les silences et les gestes du monarque qu'elle admire. Ce qui le convoque de facto à l'arbitrage.
Dans notre république froide et raisonnée, on néglige trop souvent l'influence des familles royales dans les pays qui nous entourent, organisés en monarchies people. C'est nous qui les qualifions ainsi.
Outre le facteur de cohésion nationale, ces familles servent de repères et de modèles quand les temps l'exigent. Le roi de Siam est dans ce rôle. Volontairement ou pas (il ne me l'a pas dit), il instrumentalise l'amour de ses sujets.
Le roi du Bhoutan qui veut se défaire de tous ses attributs gouvernementaux se trouvera, s'il y parvient, dans la même position d'arbitre en dernier appel que le roi de Siam ; ce qui lui rendra l'influence qu'il aura précédemment abandonnée.
Chez nous, revenons en Europe, la reine d'Angleterre se réunit avec le Premier ministre une fois par semaine - contrainte hebdomadaire qui irritait Margaret Thatcher car elle y endurait les remontrances du centre-gauche et d'un certain tiersmondisme qu'elle jugeait exécrable ! Le roi des Belges est intervenu efficacement contre le désordre des institutions dans les affaires de moeurs. Dans les vieilles monarchies nordiques (Pays-Bas y compris) l'attitude de la famille royale en temps de guerre a été d'un grand secours moral aux affligés, et son exil éventuel un phare de l'espoir. Au Danemark, le courage et la fermeté du roi qui resta au pays et porta l'étoile jaune, le transformèrent en héros. Par contre les complaisances teutoniques du père d'Albert II de Belgique furent mal acceptées, ce qui prouve en creux son influence.
Plus récemment en Espagne, c'est bien la conjonction d'une attitude plutôt raide du monarque et l'agenda événementiel de la famille royale, qui a "décalé" les fermentations fascisantes en les ringardisant. Le franquisme a été coulé par Hola plus que par ABC. Par contre on aurait pu attendre de la reine Sophie le mot de trop, qu'on lui aurait aussitôt pardonné, sur les lois décadentes du gouvernement Zapatero, ce qui aurait évité à l'Eglise de monter en ligne avec tant de véhémence. En revanche l'implication (toujours indirecte) du roi dans le paysage basque est positive. Il est aussi leur roi, puisque titré "Roi de toutes les Espagnes". Dès qu'ils en seront vraiment convaincus les Basques se calmeront.
Les doctrinaires français qui poussent en avant encore aujourd'hui la monarchie absolue ou déroulent dans leur argumentaire l'antiparlementarisme, jouent en fait contre le roi, le roi possible.
Le spectacle de l'Etat mis à l'encan des partis politiques abaisse la fonction et ridiculise le mode d'y pourvoir. Il sera bientôt l'heure de proposer à l'Opinion de substituer au président quinquennal actuel dont l'élection provoque un tumulte dévalorisant pour l'autorité de chef d'état, une sorte de secrétaire perpétuel de la Nation qui ne s'userait pas dans la politique du quotidien, mais représenterait plus dignement le pays urbi et orbi, et serait son point fixe par rapport auquel les communautés diverses se parleraient.
Il suffirait peut-être de diffuser ces idées de règne sans gouvernement pour voir croître la faisabilité du "royalisme" dans les esprits. Il y a de bons arguments dans tous les chapitres, le premier n'étant pas l'économie budgétaire conséquente que l'on obtiendrait, mais quand même !
La fonction suprême étant dès lors pérennisée hors des joutes politiques, on pourrait considérer que les choix de gouvernement soient appuyés sur l'ensemble des intérêts particuliers qui seraient représentés proportionnellement à leur force dans le pays, et légitimés par la grille d'analyse du Bien commun auquel ils devraient concourir.
C'est toute la philosophie politique de ce vieux pays républicain qui pourrait être modifiée car serait venu le temps de la pédagogie des gouvernements d'union et celui de l'abandon des affrontements idéologiques de bloc à bloc. La Nation parviendrait, deux siècles après sa naissance, à maturité ! Bien des peuples autour de nous y sont parvenus. Pourquoi notre "génie national" nous en excluerait-il ?
Il serait toujours temps ensuite de juger de la pertinence d'une meilleure implication du roi dans les affaires de l'Etat. Son tempérament dicterait le sens de l'évolution de la fonction jusqu'à ce qu'on parvienne à stabiliser la monarchie revenue. Quelque soit le point atteint, la situation serait meilleure qu'aujourd'hui.
Le combat doctrinal actuel de certaines chapelles serait-il vain parce qu'articulé seulement dans la sphère philosophique avec au final peu d'impact sur le sentiment du Commun ? Or ce qui prime pour instaurer la monarchie, c'est bien l'affectivité du peuple. Cet affect que le roi de Thaïlande sait instrumentaliser avec bonheur.
lundi 12 juin 2006
La démocratie c'est l'envie
C'est une affaire de celles qu'on ne sait par quel bout prendre. Alors je vais vous la raconter simplement sous forme de parabole.
Il était une fois ...
... un grand et beau pays qui avait sculpté aux frontons de son régime politique la devise trinitaire et généreuse de Liberté, Egalité, Fraternité. La dite devise s'appuyait sur une Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen que le pays en question n'eut de cesse de promouvoir dès qu'elle fut gravée dans le marbre, au son du canon Gribeauval chez tous ses voisins, puis par toute la planète, ou presque, son empire n'étant pas convoqué à la récitation.
Vint un jour où la Misère du monde se mit en marche vers l'Eldorado moral. La bureaucratie qui en gérait les accès quelque dizaines d'heures par semaines seulement, fut vite débordée et les requérants d'asile en tous genres, honnêtes ou crapuleux, affluèrent. Le travail étant une denrée raréfiée par ces temps-ci, les nouveaux-venus durent se contenter de vaquer en rasant les murs, n'ayant dès lors aucun titre les assurant de la reconnaissance du pays d'accueil qui, malgré tout, les disait de vrais "chances pour la France". On les appelle les "sans-papiers". C'est une classe sociale située exactement sous le lumpenprolétariat, à un jet de pierre du jardin d'acclimatation où d'aucuns pensent déjà les contenir, les retenir, tendre l'élastique de la fronde géante qui les renverra chez eux, à l'étude des dits-Droits qu'il va bien falloir compléter de la formule désormais célèbre : les promesses de lendemains qui chantent n'engagent que ceux qui les recoivent.
Dans un pays en déclin, une économie malade et un Etat en banqueroute, les "sans-papiers" tombent souvent dans une misère plus grande que celle qu'ils ont fuie, et l'insécurité qu'ils affrontent est parfois aussi terrible que le menaces qui les convainquirent d'aller chercher loin de chez eux un asile politique...
Deux repas simples par jour et un toit bas de plafond mais étanche, c'est ce qui fut organisé sur le fleuve capitale en agrégeant quelques péniches Freycinet à un bateau-chapelle en béton. Une ancre pour stopper la dérive vers une mort minable et hâtée, un point de miséricorde pour se reprendre, pour accéder au secours d'activités pas toujours émergées, une chance de croire en quelque chose de supérieur à l'homme, aussi. Survivre !
Générosité, sens de l'organisation et des relations publiques, pugnacité procédurale, enthousiasme communicatif, l'oeuvre entreprise fit florès. On l'appela de la couleur de son béton, La Pierre Blanche. Dons et donations affluèrent pendant quinze ans, quelques dizaines de petits logements lui furent légués, jusqu'à ce que l'idée miséricordieuse devienne une petit ONG avec la bénédiction virtuelle de la préfecture qui jusqu'ici ferme un oeil.
Et là, ça ne va plus !
Le succès de l'oeuvre bien connue aujourd'hui est attribué à un ... curé ... dans une commune dirigée par une coalition socialo-communiste ! Peponne et Don Camillo, on y est en plein ! Tout le monde sait que les affaires sociales et la misère qu'elles agrègent, sont le fonds de commerce socialiste historique, à tel point qu'on impute à la distance que le parti mit entre lui et les masses laborieuses-et-démocratiques, l'échec retentissant de son champion trotskiste aux élections présidentielles de 2002.
Le programme socialiste en cours de promulgation prévoit donc quelque part d'aider le quart-monde, de régulariser les martyrs de la Droite, et affiche surtout son opposition implacable à toute mesure sarkosienne de régulation et contrôle de l'immigration. Où donc est l'os ?
L'envie de la gloire !
L'envie mêlée au dépit saisit à la gorge tous ceux qui alentours ont moins réussi, confrères, "concurrents sociaux", sans parler de l'armée de tous ceux qui disent sans jamais faire. L'envie, enfant adultérin de l'Egalité ! Qui serais-je donc, moi, si brillant pour que n'importe qui, pas mieux que moi, réussisse dans un domaine que j'explore depuis si longtemps avec des diplômes ? Qui es-tu, toi, pour hisser ta tête au-niveau de l'élite reconnue sans avoir emprunté la voie démocratique sans laquelle il n'est de légitimité en rien de nos jours ?
La majorité municipale peut bien se démener pour mettre en scène le traitement de ses cas sociaux, qu'elle n'atteint pas la cheville du curé au classement de la notoriété généreuse. A quoi sert-il de créer des sous-commissions, gérer un service CAS, multiplier les photos dans le bulletin municipal, payer de l'effectif pour brasser des dossiers, si un ...... curé et quelques renforts bénévoles en font dix fois plus avec des bouts de ficelle, en quatrevingt heures par semaine non déclarées dans la joie en plus : C'est de la subversion cléricale !
Mais qu'y faire ?
Par la bande, comme au billard :
Les marginaux, ces inconnus que l'on ne veut connaître, ce n'est pas bien pour les riverains (même s'il y en a peu à l'endroit visé).
Les "sans-papiers", ce n'est pas vraiment légal.
L'occupation du domaine fluvial est abusive et contrecarre tout projet futur d'embellissement du quai, dont on a besoin pour attirer une couche plus aisée de population écolo-fluviale dite bobo de rivière.
Mais comme tout cela ne tient pas vraiment la route, alors on vise le responsable ad hominem.
Sans son énergie, l'ONG n'aurait pas grandi autant ni perduré aussi longtemps !
Et là ça devient sournois :
Savez-vous, chère médème, que la liturgie très "populaire" utilisée dans les offices à destination de gens simples, n'est pas un modèle d'orthodoxie ; on y a entendu chanter "au clair de la lune" à la messe par des petits enfants. On est loin du rite conciliaire sans parler jamais du rite tridentin.
La bonne humeur répandue chaque dimanche, l'enthousiasme choral, la qualité "concert" des pianistes réfugiés de l'Est, en sus de la solidarité batelière, produisent effectivement une concurrence déloyale pour les paroisses alentours établies en foncier, et qui ne font le plein qu'aux grandes fêtes.
Pourquoi y redire, dès lors qu'à côté du déplacement indéniable de fidèles, il faut compter aussi avec de nouveaux venus ou le retour de vieux catholiques un peu désabusés comme le scribe de ce brûlot, qui viennent à la messe sur l'eau et dans les autres manifestations du bord, pour soutenir l'oeuvre.
Le diocèse ne devrait-il pas juger en prenant un peu de hauteur ?
Sauf s'il y a des rumeurs qui traînent comme un fait exprès au bon moment de l'analyse du dossier. Un prêtre, c'est célibataire. Allez savoir les limites du comportement charitable envers des personnes fragilisées qui "vivent là" ...... vous voyez ? le feu, la fumée ... la fumée, le feu ... , c'est à la mode et tellement simple que ça en devient irrésistible pour les langues de vipères !
Finalement,
qu'un président de région sans charisme veuille accoler son nom à une marina :
C'est une vanité ordinaire!
Qu'un évêque pusillanime laisse obscurcir son jugement en ce réclamant in petto du dogme de la vague à éviter qui prime tout :
C'est une faiblesse de commandement !
Trop grosse l'histoire ? Trop fort n'a jamais manqué, dit-on dans la marine de mer.
Le père assomptionniste en cause se verra proposer peut-être par sa hiérarchie une retraite heureuse au Brésil ou à Madagascar, pour un départ dans trois mois. Après son départ, le démontage pourra commencer, les cars de la Mobile enlever les pauvres, et les affaires municipales reprendre un cours normal.
Le bateau-chapelle ? On refait une peinture fluo, et c'est un point remarquable à visiter sur la commune, juste après le marché folklorique au bord de l'eau, avec un petit tourniquet et une fente à sous.
Si vous voulez que ça se sache adressez l'url de cette note à d'autres autour de vous. Cela ne changera sans doute rien, mais au moins nous resterons tous éveillés.
mercredi 7 juin 2006
La république, bouc émissaire commode ?
Le déclin du pays est-il vraiment celui de l'Etat ? La Nation est-elle la première victime du régime proclamé pour exalter sa souveraineté ?
LA NATION - LA LOI - LE ROI !
Tels étaient mis sous le même joug les trois chevaux puissants qui tiraient le pays de France en 1790 et que l'on trouvera au revers des pièces de monnaie Louis XVI frappées jusqu'en 1793.
Du trio ce serait donc la Loi, celle de la République, la cause de tout ; celle bien sûr qui a démissionné le Roi de l'attelage ; celle qui a mis à bas les valeurs morales traditionnelles de ce magnifique pays si divers et uni tout à la fois ; celle qui codifie de plus en plus les moeurs en investissant la sphère privée depuis que l'oligarchie cosmopolite l'a interdite de séjour dans sa sphère mercantile. Cette Loi qui a organisé la canalisation des flux de richesse au profit du nombre sans préjuger des mérites, qui a construit le règne des saltimbanques de la politique sur concours fléché. Cette Loi qui a remplacé le pouvoir par l'image du pouvoir et qui nous mène aujourd'hui à tous les abandons.
A ce stade de la causerie, on entonne normalement la Royale !
Il est rare d'entendre les Français s'interroger sur la Nation, sauf au sein de certains cercles qui dans le brassage des peuples du monde, ne la comprennent plus ou la rêvent bien différente. Mais si le commun des mortels français sait appartenir à la nation française, ils ne le ressentent pas. Il faut dire que les ravages des nationalismes du XXè siècle jusqu'à leur avatar yougoslave récent, les ont prévenus de toute affection incontrôlée à l'endroit de la Nation ; concept que d'aucuns reconnaissent d'essence purement intellectuelle, ne concrétisant ni chair, ni os.
Les resucées présentes du rassemblement national pour affronter les chars de la globalisation, convoquent le "patriotisme" qui est un état d'âme, un lien à la fosse commune de nos pères, pas la Nation qui est un partage de valeurs communes et l'acceptation d'un Droit applicable à tous, à la frontière non franchie du nationalisme, idéologie qui en vaut d'autres. Or cette nation qui est-elle, que vaut-elle donc pour n'être pas appelée ?
Sans refaire le parcours de sa construction depuis Bouvines, on peut la décrire comme le précipité des peuples de France dans la Révolution, proclamé par la Confédération de 1790. Elle s'est éprouvée dans les guerres de la Convention puis du Premier Empire, a douté dans les désastres du Second, s'est réconfortée dans les assauts de 1914, sur la Marne, la Somme et à Verdun, pour relativiser ensuite l'inéluctabilité des boucheries, la taxe de concept national ayant été trop élevée : 1500000 morts et autant de blessés à fin 1918. La "der des der" façon de dire "jamais plus!". Finalement la Nation s'est débandée lors de la Débâcle de 40, ses peuples étant déjà trop morts. Ou, dit moins brutalement, des minorités opposées ont saisi des postures d'avenir au grand casino de la guerre totale quand la masse immense s'était recroquevillée sur ...... le Ravitaillement !
Les efforts pour reconstruire une nation après la Libération ont tous été vains. Une grande partie du peuple dont deux générations avaient beaucoup donné aux idées nationales, s'est abonnée ensuite à l'internationalisme, sorte de générosité gratuite et lointaine qui améliore l'estime de soi ; au tiersmondisme qui en est la version paternaliste et larmoyante avec l'avantage de maintenir la prééminence du tiersmondain ; au caritatif humanitaire pour quelques-uns encore plus débranchés. Et comme sous l'Occupation, la grande majorité silencieuse s'est affairée à ses affaires, zappant les programmes politiques pour alterner les inconvénients imposés par le régime démocratique.
On peut dire que depuis lors le précepte politique individuel s'est limité à l'échelle d'intérêts que déclame le sage d'Ancien régime égaré en République :
"Préférez la Famille à la Cité, la Cité à la Province, la Province à l'Etat, l'Etat à l'Humanité. Défiez-vous de ce qu'on appelle l'Intérêt général et souvenez-vous que la Société est faite pour sauvegarder les intérêts particuliers. Mais en même temps respectez scrupuleusement l'indépendance et les intérêts d'autrui. Ne courez pas, à notre exemple, après une chimère : l'Egalité, et après une rêverie : la Fraternité. La seule chose qui donne de la valeur à l'homme et du mérite à ses actions, c'est la Liberté."
Pour aujourd'hui on mesure l'état de délabrement moral de la Nation Libérée à quelques évidences :
Clearstream ! Les Français sont désorientés ! Horrifiés? révulsés? révoltés ? Pas le moins du monde ! Désorientés. Pour en avoir trop vu, la Nation a intégré le "scandale" dans les contre-valeurs de son imaginaire. Par contre les Français ne discernent pas que les scandales servent à les détourner des causes fondamentales de leur mal-être, qui n'a plus grand chose à voir avec le régime politique, et pas tellement avec les gens aux manettes qui font ce qu'ils peuvent avec ce qui leur reste de liberté de choix. De toute façon il a été décidé à tous étages de ne plus affronter la Réalité.
Quelle est-elle ? trois axes, mais il y en a tant d'autres :
(1) La France a déserté l'Europe en rase campagne par le référendum de mai 2005. La raison n'est pas celle que brandissent les "vainqueurs" souverainistes. L'électorat a pour moitié sanctionné la superbe bruxelloise savamment mise en scène par la classe politique nationale pour expliquer ses insuffisances, deuxio, le dessein inextricable de l'Union et le défaut de réponse à des questions simples et fondamentales comme le schéma social recherché en commun, et les limites géographiques de l'Union qui se sont avérées le meilleur cheval de bataille avec l'incursion de la Turquie dans le schmilblick.
Or jusque là, avec des bonheurs divers, l'Europe était le gant visible que manipulait la France, plus ou moins bien selon le chef d'état en fonction. La main n'y rentrera plus jamais, la gant est vide mais pas pour longtemps. La France est devenu un pays européen "ordinaire", que l'on ne feint même plus d'écouter. Les exemples pullulent. La crise financière qui nous guette annule toute velléité de remonter au classement. Etonnés de nos ambitions éculées et de notre modèle unique au monde sauf dans les arrière-cours de la civilisation, nos partenaires de l'Est se rangent sous l'ombrelle américaine sans complexe aucun puisqu'il n'y a plus de solution de rechange. On attend avec beaucoup de suffisance au Quai mais peu d'arguments, la remise en cause biaisée de notre siège permanent au Conseil de sécurité de l'ONU.
(2) La Nation n'a jamais voulu affronter sa diversité nouvelle, fruit de sa réindustrialisation et du rapetissement du globe. C'est le problème de l'immigration dans un schéma inadapté, stigmatisée par les émeutes de novembre 2005 dans les banlieues. L'origine réelle des troubles n'est pas désignée par l'Etat, et la Nation refuse d'y comprendre quelque chose plus loin que le défaut de sécurité, le chômage et le laxisme de la Justice. Or il s'agit bien de l'effondrement du mythe intrégrationiste fabriquant à la chaîne une classe "low cost" à côté de la nation des Desouches. Laquelle ne montrant que mépris et discriminations en tous genres, a ramassé la monnaie de son incurie et de son arrogance. L'affaire ne concerne pas ce régime plutôt qu'un autre quoique l'affichage international des Droits et Valeurs généreuses de notre République sans cesse proclamés, ait pu tromper les candidats migrants sur notre compte. Il est trop tard. Et seuls nous n'arriverons à rien.
(3) En prolongement du désaveu insurrectionnel, la bronca provoquée par le CPE qui visait à faire exploser les contraintes syndicales d'un autre âge au profit de l'embauche sans conditions de jeunes de toutes provenances, est proprement sidérante lorsqu'on observe qu'elle fut portée par les jeunes bourgeois complètement en dehors de l'épure ! A 25 ans la plupart sont encore dans les études poursuivies et difficiles à rattraper, mais toujours chez papa-maman. Or cette agitation surmédiatisée a provoqué l'oukase suprême qui a bafoué les droits essentiels du parlement et le peu de liberté politique résiduelle du gouvernement. La vraie question est ailleurs, complètement étrangère au régime, elle met en cause la Nation :
La Nation intoxiquée aux avantages acquis et toujours plus nombreuse à bénéficier de la répartition forcée des fruits du travail d'une caste de moins en moins nombreuse, refuse carrément de mettre à plat ses fondamentaux, sa démographie, ses ressources, ses possibilités, et même ses atouts mais par-dessus tout, se cabre dès qu'il est proposé de tenter l'expérience du libéralisme économique; même en l'adaptant.
"Contre le chômage, on a tout essayé", pleurnichait Mitterrand. Du tout ! On n'a pas essayé de briser les contraintes réglementaires à l'innovation, à la production et à l'enrichissement des actifs ; on n'a pas essayé de déporter aux Kerguelen les tenants de l'administration soviétique. On s'est évertué (ou tué tout court) à préserver le travail de ceux qui en avaient sur injonction des syndicats relayés par leurs partis politiques quel que soit l'avenir des filières ainsi défendues. L'usine à gaz réglementaire héritée de la Libération est intouchable, même si elle produit trop de méthane.
La Nation est mal partie. Les voies sur lesquelles elle doit choisir de s'engager dans onze mois ne sont pas accessibles, mais dissimulées habilement par les slogans archaïques des partis de gouvernement et les affaires. Qui va passer à la moulinette médiatique ce mois-ci préoccupe tout le Landerneau politique. Les réalités économiques qui commandent tout ne sont pas traitées, et ne peuvent être affrontées qu'avec l'effet de levier européen. Ceux qui l'ont brisé en mai, dansent la carmagnole et les badauds battent des mains comme des otaries, avant que d'apprendre la délocalisation de leur entreprise au Vingt-Heures.
"La solution de facilité pour la classe politique, disait John Vinocur du Herald Tribune, est de faire du scandale le vecteur unique décidant de l'avenir politique de la France. A l'instar de ce qui s'est pratiqué depuis vingt ans, voilà une manière bien tentante et rassurante d'éviter la grande opportunité qu'offre l'affaire Clearstream, celle de s'atteler enfin à la tâche. Le scandale politique, s'il n'a pour conséquence qu'un changement de tête à droite ou à gauche, aura raté le vrai défi : prendre de front les vérités les plus amères du pays."
On sait maintenant que la Nation en est incapable.
Avec ou sans VIè République.
"L'histoire enseigne qu'on ne peut réinventer la morale à l'échelle d'une nation entière quand l'idiome de la morale qu'on veut retrouver est étranger à la masse du peuple et à l'élite intellectuelle" (MacIntyre dans Les Epées n°19)
vendredi 2 juin 2006
Ici L'Ombre !
"C’est dans la sombre matrice du complot que naît et grandit la nation démocratique. Non pas forgée au grand jour par les épreuves subies et traversées ensemble, ou mûrie par les jours tranquilles, mais sourdement travaillée par les énergies occultes. [...] Envers symbolique et nécessaire de tous les pouvoirs révolutionnaires, parfait instrument d’explication fantasmatique – et donc irréfutable, le complot traverse toute la société moderne, du XVIIIe au XXIe siècle. Les Épées l’examine, le scrute, le décrypte. Ici l’ombre !"
66 pages de bonheur. Alléchons le chaland déjà par le plaisir du texte qui nous sauve des cuistres qui commandent partout.
- "Lorsque nous entendons la nuit sur la lande comme un galop dans le grand vent, [...] leurs chevaux échappés vers l'éternité continuent à frapper la terre où se nourrit notre imaginaire européen"
(d'Antoine Foncin sur Le Mythe d'Arthur de David Jones) - "Il donne l'exemple d'un inspiré bouillonnant et régulier à la fois, d'un travailleur passionné et exigeant qui, à force de maîtrise, échappe aux chapelles et aux postures en laissant après lui un trésor"
(de Stéphane Giocanti sur l'oeuvre du musicien polonais Krystof Penderecki) - "Que le Verbe soit le fond de toute parole, on le savait certes depuis le De Magistro de saint Augustin, mais on ne nous le disait plus depuis saint Thomas : la philosophie du langage établie par la langue de l'ineffable est la mise en évidence de ce point aveugle en qui toutes les actuelles tentatives de penser ce phénomène trouvent leur condition de possibilité"
(de Paul-Victor Victor sur La langue de l'ineffable du Père Vénard) - "Que les partis soient un mal absolu parce qu'ils développent la servilité par le conformisme et tuent la capacité des intelligences à la vérité est d'une autre hauteur de vue. On reconnaît la radicalité de Simone Weil écrivant avec la foi d'Antigone, froide comme le métal, tranchante comme une lame, elle dénonce l'imposture des démocraties modernes qui s'érigent, tel Créon, en seule arbitre du bien et du mal"
(d'Alain Raison sur la Note de Simone Weil sur La suppression générale des partis politiques)
Alors ce complot, c'est quoi ?
Frédéric Rouvillois pose les cartes : "Lorsque le pouvoir est vide, il est facile de croire au complot, mais il est aussi facile d'y faire croire. Le complot en l'occurrence, peut être une conviction (celle des personnes qui croient qu'il existe effectivement), mais c'est aussi un instrument qui pourra s'avérer d'une redoutable efficacité pour ceux qui sauront l'utiliser dans le cadre d'une stratégie politique [...] Les théories conspirationnistes, méthodologiquement modernes et historiquement liées à une démocratie dont elles constituent une forme pathologique chronique, peuvent dans le cadre de ce système, être utilisées par n'importe qui..."
Il nous est démontré ailleurs (16 pages de "complot", un régal) qu'il est le contrepoint indispensable du régime démocratique, tiraillé entre la perception d'une certaine illégitimité et le dogme de l'égalité. Christophe Boutin règle le débat en trois coups de cuillère à pot. Nous avons compris que la multiplication du fantasme du complot tient à deux causes, qui sont filles du monde moderne :
1. L'illégitimité : la dénonciation des complots par un pouvoir usurpateur découle de son inquiétude d'être renversé par n'importe qui, chacun étant aussi digne que lui d'occuper le "trône". A entendre chaque jour dans les déclarations du pouvoir l'exaltation de la République 130 ans après son établissement durable (1875), laisse percer un doute quant au confort politique des détenteurs précaires.
2. L'égalité : Le fantasme du complot sert l'homme moderne déclaré par les Droits l'égal de tous, qui ne saurait accepter le succès d'autrui comme son propre "déclassement", sans attribuer au complot, aux réseaux, aux magouilles en tout genre, cette promotion dont il est exclu.
Ce dossier est excellent. Il ouvre aussi de biais la question de la pertinence d'une stratégie d'aubaine couvée par certaines chapelles royalistes qui se positionnent à l'affût du désastre. Quoiqu'il en soit l'époque présente nous gâte. Les sages de Sion, la Tricontinentale sont avantageusement débordés dans l'esprit revendicatif du citoyen par les gnomes de Bruxelles qui, depuis l'euro, ont remisé sur l'étagère des accessoires de jardin, ceux de Zurich !
Une mention spéciale sur l'article de Patrick Longuet lisant L'avenir du référendum de Rouvillois. Parlant de la Vè République :
"Que reste-t-il de ce régime qui, bien que républicain, restaurait malgré tout l'autorité de l'Etat et ce faisant, pouvait prétendre rendre son rang à la France ? Pratiquement rien. "Attila" de la république gaullienne, Jacques Chirac aura pour ainsi détruit un par un les attributs institutionnels du pouvoir d'Etat". Suit une démonstration impeccable.
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Les Parisiens peuvent feuilleter le numéro 19 et l'acquérir pour 5 euros dans quelques librairies de la place comme France Livre (5è), L'Ecume des Pages, Tschann, L'Age d'Homme (6è), Duquesne Diffusion (7è) ou Le Divan (15è). En province aussi, mais nous n'avons pas encore la liste.
En cas d'absolue nécessité, volez-le, c'est carrément indispensable à votre survie intellectuelle pour s'extraire de la crasse idéologique qui nous étouffe en tous détails. Veillez à le revendre après, en adressant le produit de cession à la rédaction, ceci vous évitant les flammes de l'enfer lors du Jugement dernier des royalistes. Les autres n'atteindront pas le Tribunal, c'est sûr !
Pour le sommaire détaillé du numéro 19 cliquez ... ici, sinon le voici ci-dessous :
POLITIQUE
* Liberté pour tous
* Pipi citoyen
* Les casseurs de la république
SPIRITUALITE
* Devenir de la religion civile américaine
SOCIETE
* Retour des steppes
PLACE ROYALE
* Les Français contre l'histoire
DOSSIER
* Fantasmes du complot
NOS HUMANITES
* Augustin et Pelage
BANDES DESSINEES
LECTURES CRITIQUES
POUR/CONTRE
* Pour une restauration du politique
* A la recherche du conservatisme
MUSIQUE
jeudi 1 juin 2006
Pouvoir fort ?
La fréquentation des forums royalistes permet de croiser toutes les sensibilités, du survivaliste mérovéen rassuré en secret par le Da Vinci Code jusqu'au royaliste social-démocrate qui veut simplement couronner la Cinquième république. Tous ont leur "chance". Dans l'état d'affaissement de la Nation et de putréfaction de l'Etat qui l'écrase, bien malin qui affirmerait déjà que son pronostic ne soit pas le bon.
Après tout, pérenniser la fonction présidentielle actuelle qui embrasse plus de pouvoirs que jamais aucun chef d'état n'en eut en France avant et après le Premier Empire, en titularisant le chargé d'affaires en viager, est du domaine du possible dès que la dérive démagogique actuelle se sera brisée sur le défaut de patience populaire.
De même, surgirait-il d'un passé très ancien le porte-étendard d'une dynastie réputée hâtivement perdue, qu'il mettrait d'accord les maisons royales pour en finir avec leur guérilla stérile et disparaître à leur tour dans les profondeurs de l'usurpation. Le choc d'une légitimité antique retrouvée paverait la voie d'une restauration des rois primitifs, auréolés de leur fonction sacrificielle et de leur gloire intacte. Notons qu'au deux extrêmes du spectre, on trouve des constitutionnalistes, le roi-président ici, le roi régnant (un peu fainéant) et ne gouvernant pas, là.
Si chacun des royalistes a donc sa "chance", il en est un qui peut-être se fourvoie : c'est le partisan du pouvoir fort. La confusion est assez répandue que la fonction royale d'un souverain permanent incarne un pouvoir fort. Et pourtant l'histoire montre que les "tyrans" de la monarchie furent déposés sans qu'ils aient pu ou su actionner les instruments qui auraient forcés leur maintien. L'émeute populaire déposa Louis XVI monarque absolu ; une seconde déposa facilement Louis XVI monarque constitutionnel ; bien plus tard, une autre émeute déposa en trois jours un Charles X plutôt autoritaire.
"La légitimité du Roi naît du besoin du peuple". C'est l'attelage Roi-Nation qui tient la monarchie. Dès que l'un doute de l'autre, il y a rupture. Et comme dans les affaires de couple, ces ruptures sont irrémédiables et le plus souvent violentes. La Nation se méfiait tant de Louis XVI qu'elle le mit en résidence surveillée aux Tuileries. Varennes déclencha le divorce. Le roi Charles X se méfiait de la Nation qu'il provoqua par des ordonnances peu "politiques". Une simple émeute mal réprimée par omission de d'assurer des comploteurs, le convainquit d'abandonner.
Par contre, la monarchie citoyenne qui lui succéda survécut à des émeutes continuelles, les réprimant avec tact jusqu'à l'erreur finale d'avoir méjugé une émeute ouvrière en émeute populacière. Pourquoi tint-elle 17 ans au milieu de cette effervescence ? Parce que l'attelage Roi-Nation n'était ni revendiqué ni nécessaire. On était entré dans l'époque de l'intérêt général "bien compris", c'est-à-dire celui de la bourgeoisie libérale, celui de la haute banque et des compagnies de chemins de fer. Le roi était devenu secrétaire perpétuel de la classe industrielle et financière, il avait perdu l'aura sacrificielle de droit divin et la Nation était vue par lui et ses conseils comme un réservoir de main d'oeuvre et un marché. Il ne se voulait d'ailleurs que le roi des Français, sachant l'autre étage hors de portée. La Nation de son point de vue, ne l'acceptait que comme l'Adjudant-major de l'administration, chargé de la représenter autour des tables des conseils d'administration. Quand elle ne le jugea plus fiable, elle le démit.
Après la parenthèse populaire de la Seconde République qui donna trois ans de vraie liberté facilement récupérée par les "gens qui comptent", cette organisation oligarchique assez bien ficelée, franchira sans heurts majeurs le Second Empire et permettra - il faut le reconnaître - la révolution industrielle qui remettra la France au tout premier rang des nations européennes.
L'épopée s'achèvera sur le désastre de Sedan, le régime se fracassant sur un dessein hégémonique parfaitement articulé sur la force des armes, dessein qu'il sous-estimait parce qu'il n'était à ses yeux que l'avatar impossible à l'époque moderne d'un saint Empire révolu. La locomotive à vapeur n'avait pas complètement ringardisé les chevaliers teutoniques. L'empereur écrasé par le projet prussien, sachant qu'il n'avait plus depuis longtemps de connexion avec la Nation, jettera l'éponge immédiatement.
Les républiques qui suivront alterneront pouvoir fort et faible, et la tendance sera toujours de rappeler un pouvoir fort quand les choses allaient mal, dans l'espoir diffus de renouveler le pacte "roi-nation" : Pétain, De Gaulle, Chirac et maintenant Villiers (c'est la seconde nécessaire d'humour).
Aux nationalistes qui rejoignent la cause royaliste ne faut-il pas préciser que le roi de France n'est pas un homme fort ?
Le roi participe d'un complexe politique, affectif et sacré qui en font un personnage unique, et certainement pas un tyran de rencontre ou un brigand beslusconien. La définition de ses pouvoirs, même en allant jusqu'à l'absolutisme (étymologique), pourrait bien réunir l'exécutif et le législatif dans son Conseil qu'ils seraient limités dans leur aire d'application. Plus ils seront absolus, régaliens, durcis, moins ils seront larges et moins ils descendront les strates de l'organisation politique du pays. Le paradoxe n'est-il pas que l'autorité forte du monarque concentre ses pouvoirs sur l'essentiel en laissant l'océan du subalterne s'organiser de soi-même. "Le roi en ses conseils, le peuple en ses états".
A noter à ce moment que si les pouvoirs exécutifs et législatifs sont confondus dans la même main, le pouvoir judiciaire s'en échappera sauf à franchir alors le seuil de la dictature au sommet de l'Etat ; mais au sommet seulement. La main de justice que détient le roi, préside et protège l'Institution et garantit son impartialité. C'est tout. C'est le Code qui s'applique universellement.
Ainsi dans l'hypothèse la plus "virile" d'un roi omnipotent - ce qui est pure conjecture -, il est peu de chances de voir réprimer durement les émeutes populaires à Clichy ou Toulouse, déporter les immigrés surnuméraires dans le Var, dépouiller les étrangers des prestations sociales, concentrer les gays en camps ardéchois, abolir l'avortement au Puy-en-Velay, ou envoyer Besancenot aux Kerguelen, toutes mesures criées de première nécessité par les partisans de "l'homme fort".
Le roi et son Conseil n'ont pas à courir les feux automobiles de la Saint-Jean, les marais à moustiques, les chaînes de montage de climatiseurs ou les sucreries betteravières. Le quotidien est remis aux organes régionaux et locaux.
Le roi témoigne du pacte national dans des manifestations traditionnelles ou des occasions graves, et cela suffit déjà. Pour le reste il travaille dans le souci permanent du bien commun sachant que la société ne doit servir qu'à préserver les intérêts particuliers de chacun. Le gouvernement central s'attachera à nommer au niveau de la haute fonction publique des personnes intègres et capables, jouant de l'exemple donné à l'intention des pouvoirs territoriaux qui les regardent.
La dignité retrouvée d'évidence en haut permettrait sans doute aucun de se défaire en bas des tribuns de préaux et forts braillards de tribune dont nous avons fait cent fois le tour, au point de savoir aujourd'hui qu'ils sont creux comme le plâtre des statues à l'érection desquelles ils cotisent de leur vivant.
Finalement pour que le pays retrouve confiance en lui et dignité, il suffit qu'elles descendent d'en haut.
Aux étages de contact Etat-Nation, les choix seront démocratiques et la fonction publique de proximité retrouvera ses marques propres, hors desquelles l'électoralisme démagogique l'a tirée pour sa perte, étant devenue aujourd'hui l'ennemi intérieur. Toute la Nation sera convoquée au patriotisme et les énergies personnelles seront mobilisées pour la guerre économique mondiale, par tous moyens et d'abord celui de la promotion sociale et de la récompense au mérite et au succès.
En contrepartie de quoi sera appliqué le décret proposé par Boiffils de Massanne ...... en 1869 :
"Les dignités, places et emplois publics ont été jusqu'ici la plaie de la France ; leur nombre et leurs avantages doivent être réduits au strict nécessaire tellement qu'ils ne puissent tenter la capacité de personne ; ce sera un travail occupant le moins possible de citoyens avec une rémunération juste mais modique".
Et le déficit public sera déjà réglé. Si l'on interdit en outre aux agents de l'Etat d'être aussi son législateur, on aura produit la vraie séparation des pouvoirs et renouvelé le fonds des initiatives.
Rien de vraiment dictatorial dans tout cela.
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