mardi 28 septembre 2021

Tournez manèges électoraux !

cheval de manège en bois bleu

Il me faudrait relire Tocqueville, Benjamin Constant ou Joseph de Maistre et quelques autres, pour extraire de la fange politique le procédé social qui déverse autant d'écume sale sur l'estran de la campagne électorale. Comment les gens se déterminent-ils en faveur du plus médiocre d'entre eux, s'il est bruyant, au seul moment de sa ruse ? J'avais retenu mes doigts d'écrire sur la pré-campagne actuelle tant cela m'agaçait, parce que j'en redoutais l'excès de colère qui n'est jamais un gage de qualité de l'article, mais là, franchement il faut le dire :
Ou sommes-nous rendus de voir dans les lucarnes bleues l'hystérique Sandrine Rousseau, chantre du woke et de la déconstruction, faire main-basse sur le parti écologiste, en capacité d'entrer dans une coalition de gouvernement si son eurodéputé Yannick Jadot le représente à l'élection présidentielle ? Il est pour les intransigeants et les khmers verts un écologiste gestionnaire ou dit autrement, un collaborateur de l'Etat capitaliste. Ses chances sont faibles. L'intégrisme le plus sec conduirait-il au succès dans un pays malade de sa démocratie représentative ? On le saura demain.

Dans le genre provocateur, que fait Zemmour collé-serré à sa pulpeuse assistante de la Cour des Comptes au bain de mer de la Seyne éponyme ? Devant trois cents personnes massées sur le sable pour mitrailler du portable la célébrité médiatique du mois ! Il porte plainte parce que Paris-Match veut faire des sous sur un cliché "volé" dans l'espace public. Est-ce manière d'envoyer l'exploit d'huissier à son épouse ? C'est leur affaire et celle des jaloux !
Les thèmes agités par Eric Zemmour sont dans le lit (c'est involontaire) du courant de la droite dure, ce qui ne le disqualifie pas, surtout sur Royal-Artillerie. Le problème est que depuis que je l'entends - et ça a commencé dans le ping pong Zig et Puce d'On n'est pas couché avec Eric Naulleau - je n'ai jamais rien appris que je ne savais déjà, comme tous les royalistes un peu plus intéressés par l'histoire que ne l'est la majorité de leurs concitoyens. Reconnaissons-lui le génie de vivre de ces évidences, approximatives souvent. Les lauriers que l'on tresse à sa connaissance des mœurs sociales et politiques de l'ancien temps m'ont toujours laissé dubitatif, au point de croire qu'il est convenu dans le microcosme parisien que toute critique du polémiste doit commencer par l'encenser. Il a ouvert sa carrière judiciaire en proclamant que les prisons étaient bourrées de noirs et d'arabes. Qui en doutait jusqu'à ce qu'il lance ce pétard mouillé ? Personne ! Pour ma part, je ne l'écoute plus mais on m'y force, puisqu'il fabrique de l'audience juteuse pour les chaînes d'information. Quatre millions de téléspectateurs au débat de BFMTV ! La caisse tinte ! Quoiqu'il en soit et comme laissé en commentaire sur le blogue de Christian Vanneste, Zemmour est le révélateur argentique de la classe politique “professionnelle”. Trempés dans le bain, ils s'y reclassent chacun en fonction des “progrès” qu’ils annoncent ! Je pense que son utilité dans le processus électoral se limitera à faire jaillir la vérité sur les fonds de commerce respectifs. Mais lui, personnellement, ne pourra décoller sa silhouette du mur des protestations. quoique bien sûr je puisse me tromper. Certains d'ailleurs, l'oreille collée au progrès de la mine qu'il creuse, voient dans sa démarche le dynamitage contrôlé du parti ramolli des Républicains, qui se partagerait entre les durs à cuire comme Wauquiez, Retailleau, Ciotti, Morano abandonnés par Fillon, et les centristes dégénérés de la veine Juppé en recherche de maroquins. A raison, il dénonce le poison d'un centre compatible qui a infecté un parti jadis carré, droit dans ses bottes et gaullien. D'où son expression de chochottes cernant de près les ondulations de la camarilla Jacob aux manettes.

Les thèmes prégnants d'angoisse que sont l'identité française évanescente, l'insécurité, l'immigration de masse incontrôlée, l'islamisation rampante, le laxisme supposé des juges, la corrosion idéologique du système éducatif public ne sont pas si nouveaux qu'ils ne puissent être traités par un homme politique du sérail, par un homme politique ayant l'expérience de l'appareil d'Etat, par un homme politique testé et approuvé pour ses résultats, sans qu'il soit besoin absolument d'y convoquer un éditorialiste prolixe qui se nourrit littéralement des scandales qu'il croit révéler. A preuve Michel Barnier, candidat à l'investiture des Républicains.

Outre qu'il présente bien - et d'une certaine façon, on reviendrait au style grand chef catholique portant beau à la Jacques Chirac - celui que d'aucuns moquaient en l'appelant « l'Endive de Savoie » a plutôt bien réussi le largage d'amarres de la Grande Bretagne, ou plus justement dit depuis la trahison australienne, le largage de la Perfide Albion. Les difficultés dans lesquelles se débat aujourd'hui le cabinet Johnson par la rupture de la continuité économique avec le continent désormais "isolé", avaient été anticipées par le Conseiller Barnier qui, s'il en avait convaincu les négociateurs britanniques dépéchés à Bruxelles, ne pouvait surmonter l'hubris sécessioniste des agités du bocal ayant succédé à Theresa May à Londres. Il a reconnu explicitement que les gens missionnés pour aboutir étaient de niveau et qualité exceptionnels, laissant comprendre qu'il n'en était pas de même des ministres de Sa Gracieuse Majesté. C'est dans cette énorme négociation (son service à Bruxelles était staffé de trois cents analystes) que Michel Barnier a révélé son niveau de capacité et sa carrure politique. L'affaire bouclée, il est rentré en France pour faire profiter son pays de ce qu'il avait vu à Bruxelles au cours de ses mandats européens. Le microcosme le disait européiste, technocratique de par les fonctions exercées, il s'est bien trompé.

Mieux placé que beaucoup pour déceler tous les manquements à l'esprit des institutions et assez affûté pour en deviner les remèdes, il a surpris son monde en dénonçant les politiques européennes dans les secteurs sensibles que sont l'immigration et la justice. Hurlements ! Même le clown Farage a remis le nez rouge pour dénoncer le coming out eurosceptique de Barnier ! Qu'en est-il au fond ? Si ça vous intéresse, vous pouvez continuer... ou passer directement au suivant de la liste, Valérie Pécresse.

C'est un long article du Guardian que l'on peut lire ici en dialecte local et dont nous extrairons l'essentiel ci-dessous, qui cerne la personnalité et les intentions politiques de Michel Barnier. Le pivot en est un bouquin à paraître en anglais le 30 septembre chez Polity Press, titré My Secret Brexit Diary, A Glorious Illusion. Son original français sera disponible à la même date chez Gallimard sous le titre La grande illusion - Journal secret du Brexit - 2016-2020 (clic).

On peut résumer le "programme Barnier" à trois choses : contrôle effectif de l'immigration ; retour à la souveraineté juridique ; patriotisme et socialisme gaullien en économie. C'est une position que l'on a connue il y a longtemps, chez les gaullistes sociaux de la veine Capitant. Accessoirement, René Capitant, leader des gaullistes de gauche, est né à La Tronche en Isère, Michel Barnier aussi, comme d'ailleurs l'actuel Premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure. Dans son journal intime (diary), il explique que le Brexit est un avertissement solennel aux institutions européennes. La technostructure bruxelloise vit dans dans sa bulle et nourrit un complexe de supériorité, convaincue qu'elle a toujours raison. Pas d'écoute, pas de changement de pied. Les peuples roincent, la caravanne passe. Il n'est pas fédéraliste, dit-il, mais un patriote gaulliste fier d'être européen. Aussi veut-il rapatrier certains éléments de souveraineté indûment dévolus aux institutions européennes, en cessant par exemple la suzeraineté de la Cour européenne de Justice sur les cours françaises, idem pour la CEDH. Il a le souci de rééquilibrer l'influence captée par l'Allemagne dans les affaires européennes, ce qui de notre avis est un vœu pieux tant que l'économie française n'aura pas été réparée. On ne voit aucun chancelier allemand faire des grâces demain à une économie de gitans. Sur l'immigration il est très clair (ça va choquer) : moratoire sur l'entrée d'étrangers sans motifs et sur le regroupement familial jusqu'au résultat d'un référendum. On parle même d'un opt-out ou bouclier constitutionnel permettant à la France d'édicter ses propres règles en matière d'immigration à l'abri des injonctions des cours européennes. C'est du lourd, mais pas plus lourd que le programme du RPR de 1990 après leur échec à la présidentielle de 1988 contre Mitterrand ! Programme chiraquien que Zemmour lui-aussi brandit comme sauf-conduit ! Certes, on ne voyait pas Barnier comme ça, mais toutes ces années passées à Bruxelles l'ont apparemment convaincu qu'il n'y avait rien de plus à "négocier" que de mettre la technostructure au défi. Le référendum est l'arme fatale (depuis 2005) et à Bruxelles, ils le savent et se sentent menacés.

Ses contempteurs en France crient au suicide politique dès lors qu'il se défroque de la bure de soie bleue quand justement son prestige vient tout entier de ses fonctions à l'Union européenne ; mais peu lui chaut, et s'il est plus connu au Royaume-Uni qu'en France, il ne désespère pas d'y sculpter sa statue. Pour lui le Brexit fut une erreur magistrale portée par la nostalgie d'un empire enfui et l'incapacité du peuple anglais à faire face au monde nouveau ; et de citer Le Roi Lear au début de son journal : « Ô Lear, Lear, Lear ! Frappe cette porte qui laisse entrer ta démence et échapper ta chère raison ! » Pourtant s'il relève le sentiment profond des peuples d'Europe d'avoir été floués par la globalisation et le libéralisme à outrance - il évoque les Gilets Jaunes - il proclame que la réponse n'est pas dans un Brexit ou un Frexit mais dans la réforme des règles économiques au triple niveau européen, national et régional. Et de dénoncer dans la foulée l'autocratie d'Emmanuel Macron qui n'embrasse rien plus que du vent. Apparemment il déteste cordialement Emmanuel Macron. Macron l'incantateur dont on se moque à Bruxelles dès qu'il a le dos tourné. Macron seul devant lui-même au miroir, comme Hollande dans le bouquin de Lhomme et Davet ! L'affaire des sous-marins australiens est le parfait aboutissement de son arrogance et de son autisme ! Et les coquecigrues diplomatiques comme les familiarités déplacées envers ses compères en mondialisme signalent l'immaturité du jeune chef d'Etat qui finira par douter de son destin.

Relever l'Etat gaullien est le projet de Michel Barnier. Enfin un candidat qui s'occuperait du domaine régalien ! Mais dans le panier de crabes des Républicains, ils sont trois. Le fanfaron du Nord Xavier Bertrand et la minaudeuse Valérie Pécresse, tout deux ayant bruyamment claqué la porte du parti repris en main par Laurent Wauquiez. Ils ont chacun leur petite liste de mesures indispensables à notre bonheur, quand on se demande pourquoi ces chevaux de retour feront demain ce qu'ils ne voulurent jamais faire avant-hier. En quoi l'expérience parcellaire d'une présidence de région étroitement encadrée par l'Etat central, prédisposerait à gouverner tout un pays, chez lui et à l'international ? On voit bien le trafic d'indulgences qu'ils acceptent dans leur région respective et leur relativement faible influence dès qu'il s'agit de projets d'ampleur. A part mouche du coche, que fait Bertrand dans l'emploi ? Que vaut Pécresse dans le Grand Paris ? Seule une gourde comme Anne Hidalgo, archétype du médiocre demi-habile la bouche pleine de slogans sur tréteaux, pourrait répondre qu'ils sont prêts à entrer au Château, comme elle, dans toute sa gloire d'Andalouse ! Par un fait exprès, ces deux peintres ont les faveurs de l'opinion à droite et l'assureur est aujourd'hui donné gagnant au premier tour de manège du Congrès des Républicains le quatre décembre prochain. C'est perdu d'avance pour eux au mois d'avril parce que ces deux politiciens de division 2 ne font pas la toise ; on va s'en apercevoir dès qu'on aura chargé la chaudière de la campagne officielle pour monter en pression. Leur logiciel électoral est ancien dans un ronron ennuyeux, et ne percutera ni les primo-électeurs ni les abstentionistes qui ont déjà tout entendu. Et de vous à moi, le petit gros tout gris, parfaitement définitif, n'a-t-on pas déjà donné ? Reste les deux "extrêmes".

Jean-Luc Mélenchon n'imprime plus autant qu'avant au-delà du carré d'ultra-gauche. S'il est encore un tribun de talent sur lequel coulent les lustres, ses incantations fatiguent parfois et ses promesses toujours parfaitement démontrées sont jugées inapplicables au bon sens ! Les gens (comme il dit) approchent ses propositions du quotidien de leurs soucis et ça ne matche pas. Le dernier échange sur BFMTV avec ou contre Zemmour a accru la perplexité de ceux des électeurs susceptibles de s'intéresser à une offre de gauche-gauche, mais la "créolisation" les a achevés ! Il faut dire qu'après Chavez, Maduro, Castro et Bolivar, la hotte est pleine. On est en France quand même ! A quoi s'attend donc la favorite ? Marine Le Pen, envoyez les torches et la fumée !

Normalisée, dédiabolisée, presque banalisée, elle subit avant même d'être dans le poste, la décrédibilisation de François Normal Ier finissant son mandat en ectoplasme. Sans la brutalité des propositions du Front national, le parti épuré n'a plus aucune saveur. L'électeur populaire aux idées simples ne retrouve plus son enthousiasme dans le nouveau projet aseptisé qu'il ne comprend pas. Comme le disait Robert Ménard récemment, le défi politique n'est pas affronté par le Rassemblement national actuel. Ses idées sont majoritaires dans l'opinion, autour de 70% sur pratiquement tous les sujets couverts par la protestation, mais le parti rénové n'arrive pas à convertir cette mauvaise humeur électorale en sièges. Ce but ne fut jamais atteint dans le passé, sauf par le subterfuge du scrutin proportionnel que François Mitterrand avait décrété pour faire pièce au RPR/UDF. La normalisation mariniste devait y aider, mais toutes les élections intermédiaires ont été perdues. Le RN ne colle pas aux attentes de l'électorat flottant, celui des gros bataillons qui font la bascule. Reste Macron et son attelage de rennes courant la province à jeter des cadeaux. Nous l'aurons donc voulu !

A choisir à froid lequel des huit candidats en lice ferait le moins mauvais président de la République, ce serait sans conteste Michel Barnier. Mais il ne gagnera pas parce qu'il faut casser la vitre des écrans pour vaincre et accepter une alchimie électorale pas toujours reluisante. C'est dans ces circonstances qu'on touche du doigt l'ardente obligation pour la nation française de sortir du piège par le haut en arrachant la pointe de pyramide à l'affairisme des partis politiques pour atténuer le vice d'impermanence au sommet de l'Etat. Au lieu de quoi, nous aurons l'habile ou le malin pour cinq ans de plus !


Michel Barnier
Michel Barnier

dimanche 26 septembre 2021

«La mer qu’on escalade comme un mur tombé»

Le vieux patriote Algérie française que je suis resté, même pas pied-noir, lit presque chaque jour en ligne le journal d'Alger Liberté. Kamel Daoud y laisse souvent un article, toujours superbement écrit, atrocement désespéré. Parlant des Harraga qui risquent leur vie pour traverser la mer, il a une phrase magnifique que j'ai mise en titre de ce billet.
Les Harraga, ou qu'on les appelle autrement ailleurs, tapissent le fond de la Méditerranée. Ils sont la honte d'un Etat mal géré, à tout le moins ingérable et qui d'un cynisme absolu laisse fuir tous les mécontents abandonnés à leur sort ! Soixante ans bientôt d'auto-gestion pour en arriver là ! L'Algérie, qui avait tout pour elle et une rente pétrolière qui servait de caution internationale à tout emprunt de développment, s'enfonce dans une misère noire provoquée par les pouvoirs successifs. Le désordre intérieur, le futur impossible font fuir sa jeunesse par la seule frontière ouverte que sont ses plages. L'article est d'une tristesse immense. Je n'ai pas obtenu le copyright de la rédaction du journal et je publie donc l'article dans la rubrique plaisir du texte sous protocole "entame + lien actif vers la source".


jeune harraga


Le Pays se vide à cause du vide


Comment fabriquer du sens en Algérie ? Donner du sens au fait d’y rester, vivre, prendre racines et maison. Le religieux ? Il accorde, coûteusement, du sens à la patience, à la résignation, à la défaite sublimée. L’Au-delà est ce qu’on cherche à habiter et vivre quand on n’a pas de vie et de foyer “ici”. C’est une victoire par la mort, pas par la vie. Le paradis est, toujours, le contrepoids de nos échecs et de nos déserts. Il faisait rêver les plus âgés, il fait aujourd’hui rêver même les plus jeunes, et c’est une tragédie, un déboisement du monde, une falsification du réel. Le paradis, on peut y croire et l’espérer, mais chercher à en déménager au plus vite prouve surtout l’échec à habiter le monde et à le construire. Le religieux est un choix, mais un pays est un effort. Alors, qui peut donner du sens ? La mer ? La mer qu’on escalade comme un mur tombé, la mer qui promet un autre paradis, lui aussi peuplé de nos échecs inversés, de nos espoirs transférés ? La mer, c’est un peu la mort avec l’Europe en guise de paradis. Un gilet orange, une chaloupe, un moteur doublé d’un cœur en colère, une boussole, et voilà la vie débordant de sens et de risques et d’écumes, redevenue palpitante, belle et terrible, chargée d’illusions essentielles et de déceptions utiles......
→ → l'article complet sur Liberté en cliquant ici ; sa conclusion est terrible*.


URL en clair : https://www.liberte-algerie.com/actualite/le-pays-se-vide-a-cause-du-vide-365482 ;
cet article de Kamel Daoud est entré en archives fermées RA pour prévenir son éventuel retrait des écrans par la censure algérienne.



Kamel Daoud
Kamel Daoud est un écrivain algérien de cinquante ans, prix Goncourt 2015. Comme ses compatriotes Boualem Sansal ou Salim Bachi, il est très réservé sur la religion islamique et les scories sociétales qu'elle charrie, y voyant un facteur d'affaissement de l'Algérie indépendante ; l'autre étant bien sûr la corruption mentale et matérielle du parti issu de la guerre de libération qui a métastasé en une bureaucratie envahissante et imbécile. Il recherche les ressorts qui animent la société algérienne et en nourrit son pessimisme. Quasiment extra-lucide dans son analyse des peuples algériens, il fait avancer la cause du Réel face à l'épopée construite sur le sable d'un roman inachevé de science-fiction qu'est celui récité par tous les pouvoirs à Alger depuis 1962. Dans son genre, Kamel Daoud est un patriote sincère, en souffrance.


Pour se changer les idées, le blues du Djurdjura avec... Idir.




Tant de pluie tout à coup sur nos fronts Sur nos champs, nos maisons Un déluge ici, l’orage en cette saison Quelle en est la raison ? Est-ce pour noyer nos parjures ? Ou laver nos blessures ? Est-ce pour des moissons, des terreaux plus fertiles ? Est-ce pour les détruire ? Pourquoi cette pluie, pourquoi ? Est-ce un message, est-ce un cri du ciel ? J’ai froid, mon pays, j’ai froid As-tu perdu les rayons de ton soleil ? Pourquoi cette pluie, pourquoi ? Est-ce un bienfait, est-ce pour nous punir ? J’ai froid, mon pays, j’ai froid Faut-il le fêter ou bien le maudire ? J’ai cherché dans le livre qui sait Au creux de ses versets J’y ai lu "cherche les réponses à ta question, Cherche le trait d’union" Une mendiante sur mon chemin : "Que fais-tu dans la rue ?" "Mes fils et mon mari sont partis un matin, Aucun n’est revenu" Pourquoi cette pluie, pourquoi Cette eau, ces nuages qui nous étonnent ? Elle dit : "cette pluie, tu vois Ce sont des pleurs pour les yeux des hommes" "C’est pour vous donner des larmes Depuis trop longtemps elles ont séché Les hommes n’oublient pas les armes Quand ils ne savent plus pleurer" Coule pluie, coule sur nos fronts.

jeudi 23 septembre 2021

Abrégé de stratégie navale en zone Indo-Pacifique

mappemonde

La carte géographique ci-dessus est celle que les petits Chinois ont devant eux en classe pour leur ouvrir l'esprit au vaste monde. C'est celle qui illustre le mieux le concept d'empire du milieu. Les petits Japonais doivent avoir la leur légèrement décalée vers la ligne de changement de date. On comprend donc leur engouement plus tard à découvrir le sous-continent d'extrême-Occident qu'est l'Europe de l'Ouest. Le top de l'exotisme, le voyage d'une vie, l'Ushuaïa du luxe ! La France de Louis Vuitton étant le clou du tour !

C'est cette carte que Joe Biden a affiché dans son garage à Wilmington (Del.). Messieurs Hollande et Le Drian voulaient la même, mais les Huns du Califat prirent Tombouctou pour y couper la musique, les cheveux et des mains, les obligeant à ressortir celle du méridien de Paris. Les chancelleries bruissent encore du surprenant strike que fait sur le Pacifique-nord le président le plus vieux que les Etats-Unis aient jamais élu : nucléariser la marine royale australienne pour l'associer à parité de capacités interopérables dans une guerre annoncée contre la Chine populaire dès sa première attaque... si d'aventure les hommes de Xi Jinping se maintiennent assez longtemps au pouvoir à Pékin.

Jusqu'à l'arrivée du gouvernement de Scott Morrison, l'Australie alignait ses pions au sein du jeu d'échecs asiatique. L'Australie s'insérait en Asie du Sud-Est pour des raisons de bonne gestion économique, la Chine et l'ASEAN faisant l'essentiel de son commerce extérieur. Jusqu'à même concéder un bail emphytéotique de 99 ans à la corporation chinoise Landbridge Group pour gérer le port de Darwin (NT) ! Ce port est un maillon d'une route de la soie vers l'Océan indien. Il est spécialisé dans l'exportation de cheptel vif (vers l'Indonésie) et de vrac minier, l'importation d'hydrocarbures et de marchandises diverses dont les automobiles. Cela n'empêche nullement les Etats-Unis de maintenir une demi-brigade de fusiliers-marins à quelques encâblures des docks chinois.
Tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes jusqu'à ce que la Chine populaire réalise que son levier commercial devenait très puissant (la Chine absorbant bientôt la moitié du commerce extérieur australien) et que les tuition fees de dizaines de milliers d'étudiants célestes de plus en plus sensibles aux thèses du Parti communiste chinois (17 milliards d'euros selon Libération) permettaient d'intervenir dans le contenu des cours universitaires et dans la politique étrangère des Aussies. L'administration Obama-Biden avait fait des reproches au gouvernement fédéral australien pour son laisser-faire ; celle de Trump avait haussé le ton, jusqu'à ce qu'arrive à la barre au mois d'août 2018 qui voulait en découdre : Scott Morrison, sous vos applaudissements ! Les Chinois ont manœuvré comme des abrutis dans la séquence des loups combattants en ne négociant rien, donnant au nouveau cabinet australien tous les motifs de les contrer ! C'est là qu'intervient le changement de pied dans la marine de guerre ; un "complot" vieux de dix-huit mois maintenant, destiné à surprendre... la Chine ? Et ce fut la France qui prit le boulet dans le buffet !

Alors que les sous-marins anaérobies français étaient la meilleure option non-nucléaire en zone dénucléarisée pour défendre efficacement tous les parages du continent australien, et donc de rester forts mais chez soi, les sous-marins nucléaires américains allongeront la capacité offensive jusque sur les atterrages de la République populaire de Chine. Cela fait une différence énorme. L'Australie, qui sert aux Américains d'antenne Echelon et de base-arrière logistique depuis toujours, est à nouveau happée dans la guerre annoncée (du moins par les Etats-Unis) comme elle le fut au Vietnam, en Irak et en Afghanistan et cette fois encore, contre ses intérêts propres. Elle rompt en plus l'accord anti-nucléaire austral en acceptant d'assembler et maintenir chez elle des propulseurs atomiques à l'uranium enrichi au grade militaire. La Nouvelle-Zélande a déjà dénoncé ce revirement, et la nouvelle donne insulte les micro-nations de l'océan qui voient la première puissance du Pacifique-sud emprunter une voie interdite par elle-même après les derniers essais nucléaires français de Mururoa. Pour mémoire, les propulseurs atomiques miniaturisés des Barracuda français tournent à l'uranium enrichi au grade de 20% au lieu de 80% pour les américains.

Ce revirement annonce-t-il la nucléarisation de l'énergie électrique ? Si l'Australie veut décarboner sa consommation d'énergie, disposant de ressources importantes en uranium, son meilleur choix est la centrale nucléaire de dernière génération, au grand dam du cousin néo-zélandais. Ce serait donc un 180° qui retentira comme un coup de tonnerre à travers tout le Pacifique-sud. Nul n'en voit encore les conséquences qui seront de longue mèche, à coup sûr.

Après le pacte Aukus, on ne peut dire encore comment vont se ranger ou se reclasser par rapport à la Chine populaire les puissances sur zone. Elles sont trois en division 1, de l'ouest à l'est, l'Inde, l'Indonésie et le Japon. Elles sont six en division 2 : la Malaisie, la Thaïlande, les Philippines, le Vietnam, Taïwan (ROC) et la Corée du Sud. Et il ne faudra pas se fier aux déclarations des uns et des autres mais surveiller leurs démarches factuelles. L'entrée de l'Australie (qui manœuvrait déjà dans le cadre du QUAD) au sein de la stratégie des détroits accroît la pression conflictuelle, d'autant que sont annoncés les premiers sous-marins nucléaires en prêt-bail pour former ses équipages. Djakarta a signalé la hausse du risque de prolifération et de surarmement, mais au seuil d'une condamnation émise par Djakarta, les pêcheurs industriels chinois continuent à pénétrer dans les eaux de l'archipel des Natuna, ce qui est proprement stupide de la part du PCC, aveuglé par la "ligne en neuf traits" de Tchang Kaï-chek (qui en comportait onze).

carte de la mer de Chine par la ROC en 1947
Carte de la Mer de Chine du Sud publiée par la République de Chine en 1947


Commençons par la Chine. La future première économie du monde est à la merci d'une interruption des flux marchands dont elle vit, flux dont les routes peuvent être coupées assez facilement au niveau des approches océaniques. Une grande puissance doit forcément être "océanique". En cas de crise intense, les Chinois doivent être en capacité de forcer un blocus en Mer du Japon ou à travers la ligne des Ryukyu pour rejoindre l'Océan pacifique nord et organiser la protection des convois marchands, sinon forcer le passage à travers les Philippines, de même qu'ils doivent pouvoir traverser l'archipel indonésien pour atteindre l'Océan indien si le couloir de Malacca leur est fermé. Dans ces circonstances, il ne s'agirait pas de nautisme mais de guerre navale à outrance. On comprend son insistance à capter toute la Mer de Chine méridionale pour en faire un lac intérieur sûr où déployer leurs ressources logistiques en arrière des fronts. On comprend surtout son impatience à recouvrer Taïwan dont la côte opposée ouvre sur l'océan. Tout ceci explique sa fébrilité à disposer au plus vite de deux escadres modernes puissamment armées, capables de faire réfléchir ses contempteurs principaux que sont les Etats-Unis et le Japon. Malgré les cadences effrénées dans ses chantiers navals, elle n'y est pas encore parvenue et tout laisse à penser que la flotte américaine du Pacifique va être renforcée par l'administration Biden.
Le défi qu'affronte la Chine populaire en périphérie des mers de Chine n'est pas la différence des tonnages ou le nombre de missiles embarqués mais sa capacité à faire combattre l'escadre engagée dans les trois dimensions sur une durée suffisant à atteindre ses objectifs. C'est loin d'être simple car elle ne dispose d'aucun historique de guerre navale alors que le Japon et les Etats-Unis sont des experts en la matière pour avoir combattu l'un contre l'autre sur le plus vaste théâtre d'opérations imaginable, l'Océan pacifique. On comprend que les Etats-Unis veuillent péréniser ce gap à travers des manœuvres fréquentes en coalition pour maintenir matériel et équipages au top niveau. Mais ce n'est pas parfait non plus chez eux, à voir les avaries répétées en mer. Quoiqu'il en soit aujourd'hui, au vu des escadres engagées, la bataille navale annoncée sera... "fabuleuse". Dommage que l'Australie ait décidé de ne pas engager nos sous-marins Shortfin Barracuda classe Attack pour les faire entrer dans l'histoire ! Continuons la revue :

L'Indonésie est un empire flottant de milliers d'îles de toutes tailles (la mère des thalassocraties) peuplées de deux cent soixante-dix millions d'habitants, qui ferme la Mer de Chine méridionale. Cet espace est invincible rapidement, sauf dans la durée et musulman ! Sa cousine la Malaisie ou plutôt la fédération des neufs sultanats malais, surveille en tenaille la partie sud de la Mer de Chine et la sortie par le détroit de Malacca vers l'Océan indien. Comme l'Indonésie, elle est une jungle invincible. Elle a de plus assimilé une diaspora chinoise qui tient à haut niveau son économie et qui se méfie des communistes chinois comme de la peste. A sa pointe sud, le plus gros port du monde, Singapour, est indépendant et chinois.
Jusqu'à présent le monde malais, bien que très attentif, n'est pas monté en pression plus que de raison. Avec la guerre froide sino-américaine, le QUAD et l'Aukus, pactes extérieurs à lui, la tentation va être grande à Djakarta comme à Kuala-Lumpur de réarmer sérieusement pour ne pas subir les dommages collatéraux de la bataille de Taïwan annoncée. Y placera-t-on nos sous-marins Attack* ? Un peu chers peut-être.

Naval Group Malaysia a fourni deux sous-marins Scorpène et travaille sur des frégates légères furtives (LCS) avec la Malaisie.


Les Philippines ? c'est Cairn Info qui en parle le mieux. Nous n'allons pas réécrire l'article de Quentin Chanal Stratégie maritime – Entre espoirs et vestiges : la marine philippine en changeant les virgules comme s'y complaisent certains. C'est à lire en cliquant sur le titre. Il conclut le dossier comme suit : « La marine philippine va rajeunir et gagner en polyvalence, mais la stratégie navale du gouvernement semble se borner à la protection des côtes, de la population et de l’ordre public. Comme depuis des années, et probablement pour l’avenir à long terme : plutôt que de préparer sa marine à une confrontation avec le rival chinois, Rodrigo Duterté a choisi de s’en faire un allié, allant jusqu’à demander son aide pour lutter contre l’explosion de la piraterie dans les eaux philippines. Il ne reste alors plus guère de raison d’investir le maigre budget militaire philippin dans une force de haute mer comme le souhaitent les responsables de la marine… Laquelle serait de toute façon déclassée par ses rivales régionales, qui ont presque toutes entamé une modernisation à marche forcée de leurs moyens navals. Alors que le pays est au cœur de plusieurs transitions simultanées (sociopolitique, économique, diplomatique), il semble clair que ce n’est pas par la force de son arme navale qu’il entend s’imposer sur l’échiquier régional d’aujourd’hui et de demain.» Il n'empêche que la pêche armée chinoise continue son harcèlement des îles littorales, ce qui a conduit la France à proposer de doter le pays d'une flotte submersible correspondant à son empreinte maritime sur zone, bien dans la ligne du double jeu du président Duterte. Les gracieusetés américaines pourraient nous y favoriser.

La Thailande commande le golfe éponyme et s'ouvre sur la Mer d'Adaman. Sa Royal Navy est une force navale littorale axée sur la police des eaux territoriales contre tous les trafics, et ils sont nombreux, et la surveillance de ses approches. Diverses problématiques intérieures ont privé la marine thaïe d'un rehaussement du tonnage et des systèmes d'armes. Par contre elle s'intéresse au concept de guerre maritime hybride (HMW) beaucoup moins coûteux et tout aussi efficace selon ses promoteurs qu'une ligne d'escadre. Ce concept, créé par le colonel des Marines Frank Hoffman en 2007, articule la riposte du faible au fort par des moyens conventionnels dissimulés en attaquant la cible dans plusieurs secteurs simultanément. C'est la méthode qui fut choisie par le Kremlin pour phagocyter la Crimée au nez et à la barbe des Ukrainiens. Appliqué aux crises navales, le HMW nous ramène à l'époque de la course à brevet, voire à la piraterie. Dans les faits, on surarme de petites plateformes furtives que l'on lance sur la cible, en saturant les réseaux de communications et en procédant à une déception ailleurs. On sait que les grands vaisseaux qui font l'orgueil des flottes océaniques sont à la merci d'un speedboat furtif armé d'Exocets, voire d'un chalutier cachant dans ses entrailles deux tubes lance-torpilles. ou tout autre vecteur inventé pour James Bond. Mais c'est bien la mise en conférence de plusieurs techniques simultanées qui garantit le succès. La Royal Thai Navy travaille sur cette option et limite, ce faisant, ses ambitions maritimes à la défense de ses intérêts de continuité. Ce choix permet aussi de mieux déceler les intentions d'opérations asymétriques de l'ancien sultanat malais annexé en 1902 et toujours turbulent.

Le Vietnam est dans la même situation que Taïwan, à portée immédiate de la Fureur. L'esprit de Plan a privilégié la mer afin que le pays devienne une réelle puissance maritime en Mer de Chine méridionale pour limiter au possible l'espace laissé à la Chine populaire dans la zone d'intérêts vietnamiens. Flotte marchande, flotte de pêche, caboteurs de transport, navires d'exploitation minière, tourisme balnéaire et forcément la marine de guerre qui va bien. L'économie martitime du Vietnam contribue aujourd'hui au tiers de son produit intérieur brut, pas mal.
Sa stratégie, à défaut de pouvoir faire confiance au grand frère chinois, est de tisser des liens avec les autres au sein de l'ASEAN, de bombarder les institutions internationales de ses revendications fondées sur le droit de la mer et de se montrer acueillant vis à vis des Etats-Unis avec lesquels le Vietnam participe à des manœuvres navales. Il compte aussi défendre absolument les îles lui appartenant pour que le prix de leur conquête soit dissuasif. Ils savent faire. Comme la Thaïlande, le Vietnam est concerné par ses intérêts propres et aura peu d'appétit à converger vers une coalition anti-chine, surtout à des motifs moraux ou... démocratiques. Et comme tous les riverains de la Mer de Chine méridionale, le Vietnam s'adonne au double jeu.

Pour le Japon et l'archipel des Senkaku menacé par Pékin, nous prions le lecteur de retourner à nos articles :

- J'irai mourir aux Senkaku du 14/09/2012
- Le facteur américain du 26/10/2012, et accessoirement :
- Le phare d'Agincourt du 20/10/2012.

Les Senkaku sont la ligne d'intrusion en avant des RyuKyu qui sont, elles, les portes de l'Océan pacifique. Leur valeur stratégique est notable dans la mise en œuvre d'un endiguement de la Chine populaire qui se trouve ainsi repoussée vers la Mer du Japon, en tenaille entre la Corée du Sud et l'empire nippon. Sauf à conquérir Taïwan ! L'autre issue étant le détroit de Malacca au sud, impraticable en cas de guerre. Pour terminer ce tour d'horizon, disons que le Japon contribuera à l'endiguement dans un renfort efficace de la VIIè Flotte US car il dispose de bâtiments modernes et d'équipages entraînés. Le soleil rayonnant est revenu sur ses navires d'autodéfense.

En deux mots, la Corée du Sud n'entrera peut-être pas en guerre contre la Chine qu'elle considère comme sa génitrice civilisationnelle. Son unique obsession est la Corée du Nord et tout son agacement s'adresse au Japon, qui peine à reconnaître tout le mal qu'il lui fit. On pourrait y voir des manifestations d'ampleur contre la nouvelle guerre froide de Joe Biden, si la Chine populaire modérait ses provocations maritimes, ce qui n'est pas demain la veille.

Nous avons gardé l'Inde pour la fin. Le géant indien commande son "propre" océan ! Comme tous les grands Etats du monde il a besoin de sécuriser les flux marchands qui sont le sang de son économie. La géographie du sous-continent, avec les hautes montagnes de la chaîne himalayenne au nord et à l'est, et un voisin hostile à l'ouest, le Pakistan, oblige l'économie indienne à respirer par ses huit mille kilomètres de côtes. La protection d'un trafic marchand si important l'oblige à déployer une flotte de guerre de bon niveau et d'un tonnage respectable. La Chine a la même obligation stratégique. On ne parlera pas de Ceylan dans les griffes des corporations chinoises, ni du collier de perles chinois qui va des Paracels à Djibouti, ce serait trop long.

Océan indien

La menace permanente pakistanaise oblige l'Inde à modéliser des plans d'attaque pour bloquer tout renfort au niveau des grands ports comme Karachi avec sa base navale, celle d'Ormara et plus loin le port rapide (chinois) de Gwadar, ce qui signifie des capacités amphibies. A l'est, le Myanmar est l'allié objectif des Chinois qui pourraient y disposer rapidement d'une base navale. L'Etat précaire de la paix armée avec la Chine populaire au Ladakh exige de l'amirauté indienne le déploiement de moyens pour contrer en même temps la Chine et le Pakistan, très capables de se coaliser contre elle ; auquel cas il lui faudrait bloquer le détroit de Malacca pour rompre les liaisons maritimes chinoises au débouché de la Mer de Chine méridionnale. A noter qu'on parle ici de trois puissances nucléaires !
On comprend mieux l'intérêt pour l'Inde de participer aux manœuvres du QUAD (Quadrilateral Security Dialogue) dans l'Océan indien avec les Etats-Unis, le Japon et l'Australie. La nouvelle du pacte Aukus la renforce directement. Tout ceci nous indique que les capacités de construction navale sont primordiales pour l'Inde mais qu'elle doive aussi recourir aux importations de technologies étrangères (russe, française) puisque la menace s'accroît. Elle participe aussi à la course aux bases navales sur tout l'Océan indien concurremment à la Chine. La France lui a ouvert les siennes.

Est-ce bien utile de parler de la France et du Royaume-Uni dans le schmilblick ? Ces deux pays lointains (voir la carte recentrée en tête d'article) cultivent un tropisme impérial jugé exotique voire "comique" par la plupart des acteurs de la zone indo-pacifique. Dans l'esprit des élites informées, la Grande Bretagne est un championnat de foot à nul autre pareil, et le destin des possessions françaises parsemant l'espace maritime austral est à terme une indépendance douce, sans violence. Peut-être que le résultat du troisième et dernier référendum proposant à la Nouvelle Calédonie de voler de ses propres ailes en sera pour eux la confirmation. Ceci pour nous dire que la posture global player tant de Macron que de Boris Johnson est d'une grande vanité, surtout avec les moyens étiques disponibles sur zone.


Pour fixer les idées, Global Firepower classe cent quarante pays du monde par puissance militaire sur un indice de puissance conventionnelle calculé en son sein sur 50 critères pour les trois armes, dont ils ne dévoilent pas le détail, mais on sait que l'index mesure en fait les capacités d'agressivité. Voici ceux de la zone Indo-Pacifique (avec l'index de référence -> 0,0000 c'est le maximum théorique):

1er/ Etats-Unis d'Amérique (0.0718)
2ème/ Fédération de Russie (0.0791)
3ème/ République populaire de Chine (0.0854)
4ème/ Union indienne (0.1207)
5ème/ Japon (0.1599)
6ème/ Corée du Sud (0.1612)
10ème/ Pakistan (0.2073)
16ème/ Indonésie (0.2684)
19ème/ Australie (0.3378) (on touche du doigt le souci australien)
22ème/ République de Chine (Taïwan) (0.4154)
24ème/ Vietnam (0.4189)
26ème/ Thaïlande (0.4427)
28ème/ Corée du Nord (0.4673)
44ème/ Fédération de Malaisie (0.7451)
48ème/ Philippines (0.8219)
Pour mémoire, la France est classée 7ème sur 140 pays avec un index de 0.1681 comparable à celui de la Corée du Sud, et le Royaume uni est 8ème/140 avec 0.1997 à peine mieux que le Pakistan.


Conclusion pour nous

Dans son discours à l'Assemblée générale de l'ONU du 21 septembre 2021, Joe Biden a célébré les alliances qui renforcent la politique américaine. Il n'est pas question de partenaires, moins encore de co-décisions partagées. La conversation téléphonique d'apaisement entre Biden et Macron a débouché sur un approfondissement des questions de coopération bilatérale, et a évoqué le renforcement du pilier européen de l'Alliance atlantique, ce qui ne peut-être dans l'esprit de Biden que l'augmentation des budgets militaires européens. On se doute que tout développement des relations sera contrôlé par le Pentagone dans un schéma de subordination. Nous ne sommes pas pris au sérieux. Rien de changé ! Il est plus que temps que la France joue le match dans des crampons à sa pointure plutôt que de courir dans des galoches en 45 quand on fait un petit 41. Nous irons plus loin bien chaussés.
Utilisons les alliances à notre profit - et l'Alliance atlantique par exemple en propose beaucoup - et cessons de nous prétendre exportateurs de valeurs, lumières, foutaises et vessies ! Braquer les Etats-Unis ne nous apportera rien, nous coucher devant eux non plus. Innovons, fabriquons et commerçons sérieusement sans morgue ni arrogance, en évitant de nous proposer comme la meilleure alternative aux ambitions de l'Oncle Sam !
Sachons raison garder la tête froide. E la nave va !

mercredi 22 septembre 2021

Summertime VII (7/7)

 

Baigneuse

L'été finit ce soir. On va mettre une petite laine et repasser par la plage. Vous allez voir, c'est jeune, c'est frais :




Dans la séquence Summertime de Royal-Artillerie il y a forcément un écran sportif, du shuffle classique venant du temps béni où les libertés basses et sans masque ne se discutaient même pas, avant les talibans quoi !




Enfin ! le tube de l'été que personne n'a vu venir, qui est pourtant en odeur de synthé ou de schnouf. Prévenez la folle à barbe dans son château-cage que le grand remplacement est terminé. Voici la version karaoké que M. Macron aurait dû écouter avant d'aller à Marseille :




Un petit slow-paillotte pour la route (clic) ? Et on démonte !

lundi 20 septembre 2021

Aukus, et maintenant ?

La diplomatie française est chauffée à blanc par la trahison de Scott Morrison et les chancelleries occidentales et russe attendent la réaction de Paris qu'on annonce musclée. Le fait est que les propos lénifiants du Département d'Etat et de la Maison Blanche vis à vis de la France (qui, selon eux fait son caprice) a de quoi ulcérer l'Elysée, autant qu'en suinte un indéniable mépris à notre endroit. De leur point de vue, l'allié historique, difficile parfois mais toujours revenu, a besoin de deux mois pour retrouver ses esprits, après quoi on reprendra le bizness comme avant ! Ils nous considèrent comme quantité négligeable dans le grand jeu qui s'ouvre en Asie. Dit en passant, le Canada et la Nouvelle-Zélande sont remontés comme des pendules. Notre pouvoir de nuisance en Europe occidentale est surévalué, comme d'ailleurs le poids européen dans le gouvernement de la crise mondiale vers laquelle courent les Etats-Unis. Ont-ils tort ? Oui et non.

Osborne Naval shipyard
- Un des halls du chantier naval d'Osborne à Adélaïde -


La France est présente dans la zone indo-pacifique depuis très longtemps. Réunion, îles éparses du canal de Mozambique, Nouvelle Calédonie et Loyautés, îles de la Société, Marquises et Clipperton, en gros. Même avec un million six cent mille ressortissants, cela ne fait pas de la France une "puissance". A noter que le destin de la Nouvelle Calédonie va se jouer lors du troisième et dernier référendum constitutionnel de décembre prochain. Ce n'est sans doute pas sur cette zone d'intérêts que la France va pouvoir manifester sa mauvaise humeur, sauf si nous détectons des agitateurs australiens en Nouvelle Calédonie comme ce fut le cas lors des émeutes canaques des années 80. En fait, par delà les proclamations vengeresses, nous n'avons pas les moyens de ruer longtemps. La seule fente dans le mur des réalités serait d'acquérir une autonomie stratégique à quelques-uns dans une zone d'intérêts américains, où les nôtres seraient découplés de ceux des Etats-Unis. Le problème est que nous sommes seuls et sans le sou !

L'OTAN demeure et manœuvre encore sous commandement intégré mais le lien transatlantique de confiance est rompu. D'autres que nous le disent. L'esprit atlantique s'est évanoui. Je n'aurais jamais cru que pareille chose advienne du fait des Américains, même si la dérive des continents était palpable depuis Obama. C'est acté maintenant ! A défaut d'imaginer le grand renversement d'alliances qui entrerait dans l'histoire - les vieux gaullistes en frémissent d'avance - nous pourrions retrouver une place d'équilibre dans le monde non-aligné en endossant le rôle d'Etat modérateur que nous avons joué dans le passé, aussi longtemps que nous conserverons notre siège permanent au Conseil de Sécurité des Nations-Unies. Résonne encore dans ma tête les applaudissements déclenchés à New-York par le discours de Dominique de Villepin devant le Conseil un certain jour de février 2003, à destination des menteurs hystériques du Département d'Etat et du Pentagone qui cherchaient par tous moyens à en découdre avec l'Irak pétrolier de Saddam Hussein. C'est sans doute plus dans cette enceinte onusienne que nous devrions réagir qu'au sein des institutions européennes, malgré le bon discours sur l'état de l'Union 2021 d'Ursula von der Leyen au parlement de Strasbourg, qui exige la prise en charge par l'Europe de son propre destin en approfondissant une Europe de la défense. Nous savons que les pays d'Europe de l'Est et quelques autres défendront bec et ongles le lien atlantique avec le primat américain aussi longtemps que la Russie nous menacera, en vrai ou dans leurs têtes. Cette course à l'indépendance polémologique européenne nous épuisera, d'autant plus que l'humiliation que nous venons de subir de la part du monde anglo-saxon amoindrit le semblant d'autorité stratégique que nous parvenions à instrumentaliser jusqu'ici, sans convaincre vraiment, même notre partenaire le plus proche, l'Allemagne. Celle-ci renouera-t-elle après le 26 septembre avec le pacifisme schrödrien qui la sortirait des embarras militaires ? Et dit plus simplement encore, une Europe guerrière sans l'Allemagne et le Royaume-Uni ne fera peur à personne. Justement, il apparaît que le "1O" a choisi le grand large au sein du concept échevelé de Global Britain. Tant que Boris Jonhson sera aux affaires, il sera inutile d'essayer, d'autant qu'avec le scoop Aukus il a éprouvé une joie rare à humilier la nation de Michel Barnier.

Alors essayons autre chose. Ruser un peu. Les Etats-Unis ont des alliés que nous serions bien inspirés de ne pas ménager systématiquement désormais, et des adversaires qui pourraient profiter parfois de notre indulgence. Si à l'occasion nous entraînons quelques autres pays derrière nous, Canada, Afrique de l'Ouest, Amérique latine, pays arabes, Indonésie, voire Nouvelle Zélande, Russie etc... l'effet pourrait être notable et même parfois bloquant par le jeu des majorités. Mais attention, nous n'arriverons à rien si nous ne réparons pas notre valeureux pays criblé de dettes et de déficits qui nous entravent. Pour être pugnaces, il faut être sérieux et le montrer. De fait, notre faiblesse est structurelle, en nous-mêmes, et il ne sert à rien de tonner contre lui ou l'autre si nous n'avons plus les moyens d'être craints. Commençons demain matin à réformer notre système de prestations sociales et la gabegie incroyable de nos dépenses publiques. Alors pourrions-nous par exemple commencer l'exploitation de nodules polymétalliques dans notre zone économique exclusive et construire une flotte du Pacifique de pêche et de guerre pour sécuriser les routes maritimes, réguler les mines profondes et la pêche industrielle, afin qu'on commence à nous voir ! Une "puissance" doit se voir. On me dit dans l'oreillette que M. Macron a sorti l'arrosoir des campagnes électorales et que la dépense publique etc... faut oublier ! Faut oublier aussi le satellite de renseignement américain au Sahel.

Entretemps le gouvernement australien s'échigne à dénoncer des insuffisances dans le programme "Attack" sans qu'il soit possible de savoir précisément lesquelles. L'éternelle histoire de la rage et du chien ! Et la presse australienne est déjà passée à autre chose, même dans l'Advertiser d'Adélaïde !

Il n'y a plus qu'à tirer l'échelle !



Ce matin en Australie...

Dans la presse australienne de ce lundi 20 septembre 2021, le coulage du contrat français avec Naval Group ne fait plus les gros titres même si quelques éditoriaux et commentaires persistent ci et là. Outre le saut technologique que représente le pacte Aukus, c'est l'explosion du prix du programme Attack qui fut le plus souvent mentionné la semaine passée. Signé en fanfare pour 50 milliards de dollars australiens en 2016, le prix avait atteint 89 milliards de dollars australiens au printemps 2021 ; mais nul ne fait semblant d'ignorer que le programme nucléaire sera bien plus cher encore, même s'il entre dans une augmentation du pourcentage de Pib dédié au réarmement du pays décidé par le cabinet Morrison.
Peu d'informations factuelles sur les conséquences locales de la rupture de contrat mais 7News.com informe que 350 ouvriers enrôlés dans le programme Attack vont être réembauchés dans d'autres chantiers navals de l'Etat (ASC) et plus spécialement dans la mise à niveau des vieux sous-marins de la classe Collins et celle des destroyers de la classe Hobart.

Voici une courte revue :

The Sydney Morning Herald :
Australia has already sunk $2.4 billion into the Naval Group agreement to supply 12 conventionally powered submarines. On top of the construction cost, the boats were expected to cost $145 billion for maintenance over their life cycle. It would have been Australia’s largest military acquisition, but the move to nuclear-powered submarines will be even more expensive. (la suite)

The Canberra Times :
C'est fini: can the Australia-France relationship be salvaged after scrapping the sub deal ? (la suite)

The Advertiser :
Massive story submarines deal hid. Opinion: The subs deal was a momentous – but what it overshadowed was huge too. (la suite)

The Age :
This time France and President Macron – dudded by Morrison, US President Joe Biden and British PM Boris Johnson – have a much more clear-cut reason to feel aggrieved. Emmanuel Macron has good reason to feel angry and deceived by Australia And the French President’s fury has to be taken seriously. With the imminent retirement of German Chancellor Angela Merkel and Britain’s Brexit departure, the putative leadership of Europe is about to pass to Macron and France. The European Union is among the world’s largest trading blocs and represents one of the world’s largest economies. The bloc is also Australia’s second-largest trading partner and second-largest source of investment. (la suite)

Brisbane Times :
Australia may have trashed a relationship it honours every Anzac Day on the Somme. For the rest of the world, it was a little like watching an old war movie. The Anglo bloc, standing together, resolute: the US, with junior partners Britain and Australia. No matter that Australia had just binned a multibillion-dollar defence contract with a major regional ally which happens also to be one of the world’s leading democracies. And deigned to give them scarcely a word of warning. The world’s cameras later caught the stupefaction, fury and depth of emotion of the French, feeling “stabbed in the back” by the Aussies. As a result, for Australia, a bilateral relationship of trust and confidence, paid homage to every year on Anzac Day in the Somme and northern France, may have been durably compromised. (la suite)

The New Daily :
View From The Hill: For Morrison, AUKUS is all about the deal, never mind the niceties. Scott Morrison, whose COVID face masks have the Australian flag emblazoned on them, likes to talk about “the Australian way” of doing things and Australian values. But it is not “the Australian way” to secretly plan, over a very long time, to deceive a close friend of this country, and then to treat them in a most humiliating and disdainful manner. That does not align with “Australian values” of honesty and fair dealing. (la suite)

dimanche 19 septembre 2021

Existent-elles encore ?

actrice afghane
Après le lâcher de belphégors devant l'université de Kaboul, tout le monde a noté que les premières mesures du nouveau pouvoir afghan, avant même l'installation de son gouvernement provisoire, a été de confiner les femmes chez elles, comme si tout son combat idéologique trouvait là son aboutissement. Cette sociopathie est plus ou moins prononcée selon les provinces, et Kaboul tente de la freiner en attendant l'ouverture des vannes à cash des institutions internationales. Avant pas longtemps, des ONG proches du pouvoir nous adresseront des reportages sur la famine en campagne qui touche les enfants afghans (comme au Biafra) afin de débloquer l'aide étrangère, même si les libertés individuelles des femmes restent niées. Elles méritent que l'on tienne bon en serrant le volant des vannes. Pour le moment elles ont quitté les rues où on les bat, et se sont réfugiées sur les réseaux sociaux tant que les talibans n'en comprennent pas la gestion. Espérons que la Chine ne va pas les y aider. Quand même pas !

Ce billet bizarre - vous avez dit bizarre ? est donc un hommage aux femmes admirables d'Afghanistan que j'ai vues dans ma lucarne bleue provoquer les mollahs pipi-de-chat dans les rues des grandes villes, avec un courage d'approche qui force le respect. Jusqu'à hier, elles avaient pratiqué la boxe, le criquet, le football, la scène et même le charme. Elles sont les vraies féministes, qui déclassent au rang d'hystériques nos remèdes à l'amour hurlant ici sur les plateaux télévisés pour défendre des femmes qui ne veulent pas d'elles et préfèrent... les hommes.
Tiens, les avez-vous entendues cette fois nos hures en cartons bouillis défendre les Afghanes menacées par la barbarie islamique ? C'est compliqué, chère Médème, il ne faut pas désespérer le peuple en cave des cités et finir lapidées. Non mais, quand même ! Et que dirait Tariq, le grand urinateur, et tous les autres de l'intersectionnalité décoloniale ?

Pour marquer le coup sur le terrain des libertés du second sexe, plutôt que du catch féminin, trop brutal, voici un quintet qui a largement débordé la parité pour notre plus grand bonheur. Kitty, Daisy & Lewis (merci, mon filleul), ce groupe anglais a défoncé les charts ! Comme quoi l'inclusion a du bon, même si le guitariste reste hors-concours. Ils ont tous les trois les mêmes dents parce qu'ils sont frère et sœurs. Et jouent de n'importe quel instrument, à tel point qu'on ne sait jamais qui va faire quoi dans le morceau d'après. La prise la plus improbable est celle de Say You'll Be Mine dans le dress-code des années 50. Je suppose que les renforts à la guitare-basse et à la contrebasse sont les parents. Notez que la voix acide de Lewis arrive à s'extraire du souffle puissant de ses sœurs. Sinon, l'escale de Kaboul a été retirée de leur tournée 2022 en Asie. La bio du groupe est en pied de page (original anglais seulement, désolé). Allez-y au casque, elles le méritent !




Biographie de Kitty, Daisy & Lewis mise en ligne sur Musicianbio.org:

Three siblings from North London, Kitty, Daisy & Lewis possess set the UK roots rock scene on its ear using their infectious energy and authentic method of rockabilly, vintage country, and first-generation rhythm & blues — not forgetting the fact how the youngest person in the trio hadn’t yet reached her teens if they released their first single in 2005. Kitty Durham, Lewis Durham, and Daisy Durham had been born right into a musical family members — their dad, Graeme Durham, can be a guitarist who’s also a high engineer at among London’s leading record learning services, The Exchange, while their mom, Ingrid Weiss, performed drums using the pioneering post-punk music group The Raincoats. In 2002, while going to a day rockabilly gig hosted by Big Steve as well as the Arlenes using their parents, Lewis was asked to sit along with the music group on banjo, while Kitty hopped behind the drum package and kept period. Next time Big Steve performed in the Durhams’ regional pub, Lewis and Kitty had been once again raised to the level, while Daisy became a member of in on accordion, and the youngsters decided it had been time to create a music group of their personal. Wanting to complete their audio, Graeme was drafted being a tempo guitarist and Ingrid used upright bass to become listed on the family members combo. As the children started displaying a larger range of skill — Lewis has guitar, lap metal, and piano combined with the banjo, while Kitty holders percussion, harmonica, ukulele, and electric guitar and Daisy sings and has piano aswell as drums — they truly became an act to view over the U.K. Americana circuit, and started recording their very own material. Lewis come up with a makeshift studio room in their house using classic analog recording equipment, and in 2005, the youngsters released their initial one, “Honolulu Rock and roll” with Kitty 12 years, Lewis 14, and Daisy the oldest at 16. Another one, “Mean Son of the Gun” strike shops a calendar year later ; it had been released being a 7″45rpm and in a limited-edition 10″78rpm pressing. In 2008, Kitty, Daisy & Lewis released their eponymous full-length debut record, featuring the one “INCREASING the United States”. The trio’s sophomore work, "Smoking cigarettes in Heaven" (preceded with the one “I’m Therefore Sorry”/”I Am Going Back again”), was slated for discharge in-may of 2011. In 2015, the trio came back with Kitty, Daisy & Lewis the 3rd featuring production in the Clash’s Mick Jones (19.09.2020).

Ils ont un site web, misérable, mais bon, ça les vend (clic) ! Cadeau Bonux : du rock-garage à trois fois rien sauf une grosse bague, pris avec les moyens du bord : Polly Put The Kettle On.

Y a plus qu'à mourir en rêvant aux belles Afghanes qui rêvent de scène, de podium, de gaîté, de bonheur, qui rêvent de nous !

vendredi 17 septembre 2021

AUKUS

SNA britannique
La Chine populaire n'a pas eu à attendre longtemps la réponse américaine aux insultes de sa presse officieuse (Global Times) sur la sortie compliquée d'Afghanistan, insultes rehaussées de celles peu diplomatiques du ministère chinois des affaires étrangères qui avait pourtant bien profité de la pax americana pour faire du business dans les mines afghanes. Elle prend en pleine gueule l'AUKUS !

Ce qui aurait pu être une coopération industrielle quasiment ordinaire entre deux Etats de l'Océan pacifique avec le renfort des compétences anglaises dans la navale en général, les moteurs atomiques Rolls Royce et spécialement la missilerie, a muté en un pacte de confinement dans ses eaux historiques d'un empire jamais nommé par Joe Biden, au motif limpide de la liberté de navigation pour un commerce pacifique dans une zone sûre. Couplé avec les exercices des quatre escadres du QUAD dans l'Océan indien (pour le contrôle du couloir de Malacca), le pacte Aukus, qui est bien plus large que la seule construction navale, interdira à M. Xi Jinping de manœuvrer à sa guise au-delà de la ligne insulaire japonaise puisqu'il devra concentrer ses forces sur la détection de sous-marins furtifs surarmés dans les mers de Chine méridionale et orientale. Evidemment, deux autres noms n'ont pas été prononcés que tout le monde a entendus : les Philippines et Taïwan, deux Etats "alliés" en fenêtre de l'océan, plus qu'agacés par l'agressivité chinoise en continu dans leurs eaux et dans leur espace aérien. Boris Johnson pour sa part a précisé aux Communes que le pacte n'était pas dirigé contre la Chine, suscitant des éternuements sur les bancs de la majorité. Mais l'investissement de la Grande Bretagne en Australie signifie aussi aux Européens un transport du barycentre stratégique anglais vers la zone indo-pacifique pour faire pièce à la Chine qui la nargue depuis Hong Kong.

Le plus spectaculaire des dispositions du pacte AUKUS est la nucléarisation de la propulsion des futurs sous-marins australiens afin d'éliminer les soutages et d'améliorer la furtivité. Comme l'a signalé le premier ministre Morrison, le changement de pied est la conséquence d'un rehaussement stratégique australien au vu de l'insécurité grandissante dans la zone indo-pacifique. Il ne dit pas que jusque là, l'Australie se limitait à défendre ses propres atterrages et les nations de l'ancien empire allemand du Pacifique. Mais la Chine populaire et ses sociétés minières sont intervenues dans sa zone d'intérêt, allant jusqu'à acheter le gouvernement des Salomon, en même temps qu'une agressivité sans bornes se déchaînait contre l'Australie à tous motifs dès qu'elle est mise en cause (5G, pandémie, drois humains...). La Chine n'a pas hésité à interrompre ses achats de vins, charbon, cuivre, blé, orge etc... menaçant in fine de faire de l'Australie son ennemie (sic) ! Cette hostilité hors de saison a conduit l'Australie à remonter sa présence au sein du QUAD sur la ligne d'attente des Ryūkyū et d'aligner la technologie de ses capacités navales sur celles de VIIè Flotte US. L'hystérie chinoise vient de renforcer le camp opposé. Et Global Times de promettre l'enfer "sans merci" (resic) à qui viendrait dans ses eaux.



Le contrat nucléaire de construction navale du pacte de défense termine abruptement le contrat français de cinquante-six milliards d'euros devenu obsolète, qui programmait la mise en chantier de douze sous-marins conventionnels "Attack" de Naval Group à Cherbourg pour mettre à la mer une flotte submersible en 2050. La menace n'attendra pas si longtemps, mais le hic est que le groupe français pouvait parfaitement livrer ces submersibles Attack en propulsion nucléaire puisque dérivés de la classe Barracuda. Le désappointement somme toute mesuré des ministères français de la Défense et des Affaires étrangères laisse comprendre qu'il va y avoir une forme de compensation de la part des Etats-Unis (cf. Blinken), sinon qu'ils s'en foutent, sans nous dire quand même que le contrat de mise en fabrication n'était toujours pas signé en bonne et due forme, même si une coopération industrielle était amorcée dans les bureaux d'études - cent vingt familles australiennes vivent à Cherbourg et des familles françaises à Adélaïde, qui vont faire leurs valises. Une certaine méfiance s'était même glissée entre les partenaires, qui avait nécessité la répétition d'assurances par la partie française en termes de délais, coûts et compensations industrielles.
Cette rupture de cap du gouvernement de Canberra est un manque à gagner pour nous, pas une perte sèche. Mais on dit qu'aucune mise en chantier n'est prévue aujourd'hui sur le site spécialisé cherbourgeois même si des négociations sont en cours avec l'Indonésie et les Philippines. Nonobstant, le carnet de commandes chez Naval Group n'est pas plat, mais c'est une autre question. Reste le défaut de renseignement côté français. Le contrat du siècle aurait dû être surveillé comme le lait sur le feu, pour apprendre que Scott Morrison nous trahissait dès le mois de mars à Washington. Le directeur général de la DGSE, Bernard Émié, est à saquer, si ce n'est déjà fait. On reviendra sur les motifs des uns et des autres.

Pressé par l'horloge (biologique), Joe Biden a donc rapidement basculé la zone d'effort des Etats-Unis depuis le grand Moyen-Orient vers le Pacifique. Les conséquences sur le sac de nœuds judéo-persico-arabiaque ne vont pas tarder à émerger, mais dans quel domaine serons-nous donc surpris est un mystère encore. Par contre, il a décidé, toujours sans la nommer, de s'occuper personnellement de la Chine populaire dont le personnel politique a eu des mots malheureux à son endroit. Les génies de Zhongnanhaï ont oublié ou jamais appris que le vieil acteur de western qu'était Donald Reagan avait crevé l'Union soviétique comme un ballon de foire en la gonflant par une course effrénée à la technologie ruineuse de la guerre des étoiles. Quel défi occidental d'ampleur l'Empire du Milieu va-t-il devoir affronter pour que ses dirigeants ne perdent pas la face ? Sera-ce dans le domaine des drones sous-marins pilotés par satellite, dans les microprocesseurs de nouvelle génération, dans la guerre cybernétique, dans les sciences quantiques appliquées, les boucliers anti-missiles étanches ou les croiseurs spatiaux ? Sinon tout cela à la fois ?
Si les dirigeants chinois étaient assez intelligents pour comprendre qu'il ne sert à rien de se proclamer la première puissance mondiale et le devenir lors de l'anniversaire de la République populaire au 1er octobre 2049, ils réduiraient la pression en chaudière et mettraient le chadburn sur "En-Avant-Lente". Ils collaboreraient avec leurs voisins de manière honnête, ils cesseraient le pillage industriel et technologique, ils lâcheraient la bride à Taïwan parce qu'ils n'ont jamais gouverné auparavant cette île que l'empire mandchou a perdue, mais surtout parce que le peuple taïwanais est fondamentalement hostile à l'anschluss communiste*. Et ils favoriseraient la liberté de créativité individuelle d'une race qui n'en manque pas. C'est faire seppuku, d'accord ! Mais le peuple extraordinaitre des Hans célestes le vaut bien !

(*) Les autorités taïwanaises, qui n'ont pas plus entendu que les autres le nom de Taïwan dans les trois discours présentant l'AUKUS (en vidéo), ont chaleureusement remercié Américains et Australiens qui, dans leur conseil annuel (AUSMIN) de ce vendredi, viennent de resserrer leurs liens avec elles (source).

mercredi 15 septembre 2021

Retour au Reich !

Olaf Scholz
Les élections fédérales allemandes auront lieu le 26 septembre 2021 afin de renouveler le Bundestag. À l'issue de ces élections débutera la XXè législature de la RFA qui travaillera à former une coalition de gouvernement. Le favori est l'actuel ministre socialiste des Finances fédérales Olaf Scholz (SPD) devant Armin Laschet de la CDU. Mais nous venons ici aujourd'hui non pour le pronostic électoral (il y a un million d'analyses disponibles) mais pour le bilan d'Angela Merkel, chancelière à Berlin depuis presque seize ans.

Angela Merkel, ancien cadre moyen du KPD d'Allemagne de l'Est, est le prodige qui a achevé la rédemption de l'Allemagne d'après-guerre, après deux révolutions intérieures que furent la réunification à marche forcée du chancelier Kohl et les lois Hartz d'assainissement des comptes sociaux du chancelier Schröder. Reprenant le lourd flambeau de ses prédecesseurs, elle aura porté l'Allemagne au rang politique que lui autorise son économie, la première d'Europe et de loin, économie adossée à des comptes publics dans le bleu et une balance commerciale structurellement excédentaire sans exportation d'hydrocarbures. Mais d'autres pays de l'Europe sérieuse y parviennent aussi (Danemark, Irlande, Suède, Suisse), et même l'Italie rieuse ! Les pays pétroliers (Russie, Pays-Bas, Norvège) sont un cas à part.

Ce majorat indiscutable de l'Allemagne a permis à Angela Merkel de placer à la tête de la Commission européenne, une femme politique (qui encombrait le gouvernement par son dilettantisme) Ursula von der Leyen, et d'avoir le dernier mot au Conseil. Rien ne se fera plus en Europe sans le consentement explicite de la Chancellerie du Reich. A preuve s'il en fallait, l'achèvement du gazoduc germano-russe Nord-Stream 2, vilipendé par la Pologne, la Slovaquie, l'Ukraine et les Etats-Unis, à nul effet.

Il est difficile de trier dans les déclarations d'Olaf Scholz celles qui relèvent des propos de campagne et celles qui révèlent ses convictions. Mais au dernier débat à trois, il a clairement exprimé son engagement atlantique et européen, comme pour signifier au parti Die Linke qu'il lui faudrait, pour entrer dans une coalition gouvernementale, franchir les fourches caudines de l'OTAN et d'une Europe fédéralisée. C'est par l'Europe qu'il faut commencer.

UE

Depuis le départ des Britanniques, les pays de l'Union européenne ont accepté que l'Allemagne soit leur pays leader, n'en déplaise à la France en haillons Armani. La politique de consensus d'Angela Merkel, qui a permis de rebâtir la puissance allemande, va s'avérer décalée face aux défis du moment que sont la crise sanitaire, le dérèglement climatique, le réchauffement planétaire et l'affrontement géopolitique à quatre : Etats-Unis - Europe - Russie - Chine populaire. Des décisions doivent être prises par l'Allemagne au sein des institutions européennes, et il sera intéressant de voir comment le nouveau chancelier gèrera l'opposition d'une France déclassée dans ce rôle par tous ses voisins (source), laquelle va prendre la présidence tournante du Conseil au 1er janvier 2022, en pleine campagne électorale de M. Macron (on a fait plus simple). Quel que soit le chancelier à Berlin, ce sera difficile pour nous, tant nous sommes moqués pour la gabegie éhontée que nos gouvernements successifs ont déployé sur ce que le monde considère comme le plus beau pays du monde. Le Miquet à la houppe de l'Elysée va à Bruxelles collectionner les vents. Mon petit doigt me dit que Sa Suffisance ne s'y attend pas ! Venons-en à la question atlantique.

OTAN

La situation de crise au sein de l'OTAN n'a pas évolué et Angela Merkel n'a pas profité des objurgations de Donald Trump pour détendre voire rompre la laisse. Pragmatiques, les Allemands considèrent que le volet militaire (NATO) de l'organisation reste l'outil le plus efficace à tenir à distance tout adversaire éventuel. La chimère afghane ayant cessé - l'Allemagne y avait beaucoup investi - le nouveau chancelier sera tenté de ramener l'Alliance sur ses bases d'Europe occidentale (Baltique, Mer du Nord, Manche, Atlantique) tout en protégeant son dialogue spécial avec le Kremlin et la Chine populaire. C'est peu dire que le tropisme post-colonial français l'indisposera, comme l'a montré Angela Merkel en refusant sèchement de contribuer en hommes à la force Takouba au Sahel. Pour elle, ce n'était qu'un second pied dans le même sable mouvant ! Il faut dire que les centaines d'instructeurs teutons au Mali ont dû lui faire remonter l'info : il n'existera pas d'armée africaine capable de vaincre à la fois le Djihad et les rebelles.
Le Kremlin acceptera-t-il les bornes que posera le nouveau chancelier ? Il y a va de son intérêt au moment où s'effrite la popularité de Vladimir Poutine que les Russes ont trop vu, en même temps qu'il s'enlise en Syrie et au Donbass. Le commerce est-européen avec l'atout gazier et le développement de l'enclave de Kaliningrad est la bonne ouverture. Le comprend-il ? A mon avis, non.

L'autre souci allemand est Washington, mais Joe Biden a bien vu la ligne rouge du Nord-Stream 2. L'Allemagne activant son influence européenne peut créer beaucoup de problèmes en sous-main aux Etats-Unis, mais les analyses manquent outre-Atlantique pour s'en persuader, et la Chine a envahi tout le temps de cerveau disponible.
Le plus triste est de voir la France en remorque maintenant de son principal concurrent mais quarante ans de bêtises et de lâcheté ne pouvaient nous hisser bien haut. Nous ne pouvons que nous en prendre au système politique de couardise et précautions auquel nous avons partout laissé la main. Pierre Laval se tord de rire dans sa tombe.

lundi 13 septembre 2021

Et tu remercieras la source mère...

Black Monday : Nouvelles de Hong Kong

Depuis cette rentrée scolaire les discours de tonton président Xi sont d'application dans les écoles primaires de Hong Kong, en mandarin. Sa parole étant constitutionnalisée et la cité des parfums étant désormais intégrée au système continental, ce n'est que justice, même si l'obligation pour les écoliers de remercier les autorités cantonaises pour la fourniture d'eau potable* signale un trauma psycolonial indélébile derrière cette reconnaissance débile. La municipalité va-t-elle ériger des fontaines publiques à l'effigie de Xi Jinping coulée dans la fonte ?
Pour l'anecdote, un version pour enfants de la nouvelle loi de sécurité nationale a été publiée à Hong Kong à destination des bambins de quatre ans et plus. Il n'est jamais trop tôt pour faire des chauvins. Qu'importe ! Nous ne nous sommes pas levé ce matin pour critiquer la normalisation de l'instruction publique, mais pour évoquer l'évolution des mœurs économiques du territoire après sa reprise en main par le Parti communiste chinois.

Hong Kong Reservoir

Nota (*): Hong Kong n'a jamais eu de ressources hydriques autonomes autres que l'eau de pluie et ruissellement que le gouvernement anglais recueillait dans les grands réservoirs comme ceux de Pok Fu Lam (en photo). Le développement de la colonie au XXè siècle obligea à acheter de l'eau douce au Guandong à prix d'or. Il faut y ajouter désormais le remerciement de la fourniture. Une usine française de dessalement de l'eau de mer est programmée sur huit hectares à Tseung Kwan O.


La crise politique et sanitaire a fortement impacté le commerce touristique, mais les charters japonais et coréens avaient déjà diminué en effectifs à cause de la hausse du prix local des produits de luxe internationaux. Le génie propre à la race cantonaise surmontera cette dépression, nul n'en doute, sauf transfusion démographique d'ampleur. Le monde des affaires, quant à lui, ne montre pas de signes d'essoufflement plus grands que ceux observés ailleurs dans la région. Par contre l'état d'esprit des boards a changé. Hong Kong fut de tous temps un havre de paix et de certitudes pour la communauté économique internationale, de par sa position ancrée au flanc de la Chine immense et par l'environnement juridique stable qu'offrait la règle britannique. Ce second atout fut le motif retenu par les négociateurs de Deng Xiaoping pour accorder au grand port revenu dans le giron chinois un régime transitoire spécial de cinquante ans. Au terme de quoi, la province du Guandong et l'ancienne colonie anglaise aurait atteint la parité qui ouvrirait sans effort la complète sinisation de l'enclave. On n'a pas fait la moitié du chemin que le pouvoir chinois, emporté par son hybris impérial, n'a pu retenir son impatience à voir Hong Kong s'étouffer enfin de ses libertés obscènes et de ses revendications anti-patriotiques. C'est chose faite. La fuite des dissidents les arrange. Le "plan" exige obéissance et profil bas dans un contexte du contrôle social. Le pouvoir va donc acheter les opérateurs économiques d'une façon ou de l'autre.

Les administrateurs des compagnies étrangères savent désormais qu'ils opèrent sur un territoire "chinois" avec les mêmes risques que leurs homologues du continent, qu'ils soient à Shenzhen, Canton, Shanghaï, Nankin, Tianjin, Pékin ou Changchun, surtout depuis la reprise en main des cadres des partis locaux et la lutte contre toute opposition interne sous couvert d'anticorruption. Pis encore pour les compagnies internationales, l'économie chinoise est de plus en plus dirigée le long de la pyramide des pouvoirs politiques, purgés et renforcés du retour des commissaires politiques en usine. La Chine populaire est redevenue maoïste mais avec d'immenses ressources et projets de développement qui attirent toujours les investisseurs extérieurs. Sauf que !
Les phosphorants étrangers doivent serrer de près la politique quotidienne du gouvernement de Pékin désormais capable de biffer d'un trait un pan entier de son économie à tout motif légitime ou politique. Le principe d'auto-financement de la promotion immobilière par le procédé de la vente sur plans est devenu illégal du jour au lendemain, mettant en faillite le conglomérat Evergrande. Quid de l'extraction de crypto-monnaies interdite sans préavis ? Plus grave, le secteur de l'enseignement privé qui pèse des milliards d'euros en Chine populaire s'est vu transformé du samedi au lundi en réseau d'associations à but non lucratif ! Toutes les valeurs éducatives ont largement dévissé en bourse. Pareil pour la Tech : le souci du pouvoir politique de contenir ces nouveaux pouvoirs extérieurs à lui au-dessous du sien a conduit à de sévères corrections du secteur, que ce soit chez Alibaba avec la séquestration de Ma Yun, Tencent (multi-services numériques), DiDi (Uber chinois coté au NYSE) ou la joint-venture Alibaba-Ant Alipay (paiements par QR code sur mobile). S'ajoute donc à la prospective ordinaire d'une entreprise en progression sur son marché, l'anticipation par son décideur de virages politiques impromptus qui lui échappent complètement.

Hong Kong est entrée dans ce club sportif de l'économie chinoise contrôlée. Les risques y sont nouveaux et doubles : d'une part les projets de développement des activités industrielles ou tertiaires devront entrer au chausse-pied dans les plans économiques de la province visée, ce qui périme le logiciel antérieur de libre pratique adossé à la corruption municipale ; d'autre part, les dirigeants s(er)ont personnellement surveillés par des agents du pouvoir, quand ce ne sont pas de proches collaborateurs qui auront été recrutés par le renseignement général local sans possibilité de refuser.

Quelques compagnies internationales, plus sensibles que d'autres au changement de leur environnement légal et productif, ont fait mouvement vers Singapour, d'autres y renforcent leurs effectifs et les comptes de leur succursale, mais dans l'ensemble c'est la formule du Sit And Wait qui est appliquée par les sièges sociaux. Les plus prudents sortiront leur famille du territoire malgré le bon niveau d'éducation proposé aux enfants par les lycées étrangers, et la plupart apprendront des réflexes déjà connus de leurs anciens qui vaquaient en pays communiste : deux passeports de voyage pour éviter l'analyse des tampons de passage ou visas, un billet d'avion "open", une certaine retenue dans la socialization, un soupçon de méfiance à connaître une timide. Bien sûr, nos cadres moyens pleins d'avenir pourront descendre au pub après leur journée et lever une envoûtante hétaïre, mais ils seront bien avisés de parler au comptoir de leur dernier trekking au Népal plutôt que du bordel chinois à la Foire de Yiwu. Un bataillon d'entraîneuses d'Etat a certainement investi les pubs de Central pour astiquer le colosse.

Les petits entrepreneurs et autres boutiquiers malins continueront de propérer autant que la situation de l'économie locale le permettra, mais ils se verront appliquer des normes parfois différentes des normes anglaises, qui leur seront opposées maintenant par des inspecteurs continentaux formés à l'autorité sans discussion. Reste que la diplomatie de l'otage, telle qu'on la voit s'exercer sur les ressortissants canadiens ou australiens en Chine continentale, a des effets imprévisibles et que n'importe qui peut être sélectionné par les Affaires étrangères pour jouer le rôle de gage !

Entretemps, la police a confisqué jeudi dernier le matériel didactique du June 4th Museum à Mong Kok. Rappeler le massacre de Tian an Men dans un quartier populaire de la ville faisait tache ! Accusés la veille de collusion avec l'étranger, les dirigeants de la Hong Kong Alliance in Support of Patriotic Democratic Movements of China qui géraient le musée ont été embastillés, le refus de fournir la liste de leurs adhérents ayant aggravé leur cas sous le régime de la loi de sécurité nationale (source). Il est révolu le temps où, comme à Londres, Berlin ou Paris, nous parlions librement de tout, de politique, de politiciens, de filles, d'affaires et de voitures, sans observer quelles oreilles pouvaient nous entendre.
Nos expatriés ont un certain courage à se maintenir en zone contrôlée, même si Hong Kong reste malgré tout le plus beau port d'atterrissage des finances vagabondes de toute l'Asie du Sud-est !


samedi 11 septembre 2021

Business as usual

PM afghan
La conscience internationale se réveille en même temps que s'installent aux commandes les talibans. Et de constater que les portefeuilles du gouvernement provisoire de Kaboul sont confiés à des Pachtounes ayant dirigé le pays jusqu'en 2001, avec une mention spéciale pour celui de l'Intérieur qui est donné au chef du réseau indépendant Haqqani, lequel est considéré comme un fondé de pouvoir d'al-Qaïda. Le Premier ministre Akhund (en image), qui était déjà conseiller politique de Mollah Omar dans le premier gouvernement de 1996, dispose d'une légitimité religieuse ancrée au berceau taliban de Kandahar mais d'aucun emploi à la guerre (source), ce qui ne fait pas d'ombre aux commandants provinciaux. Il se trouve être le plus petit commun dénominateur des diverses factions qui s'observent à la Rehbar-e-Shura (conseil de surveillance). S'ils sont malins, et rien encore ne permet d'en douter, les dirigeants devraient convoquer une Loya Jirga qui approuverait un gouvernement d'union nationale (ou presque) incluant les ethnies non-pachtounes afin de demander à l'ONU sa reconnaissance. Alors tourneront les robinets de l'aide internationale qui jusqu'ici couvrait 40% des dépenses publiques du pays. Et le tour sera joué. Pour le dire quand même, un rétablissement de la monarchie pachtoune (elle a un héritier) serait un atout considérable sur la scène internationale, mais c'est plutôt le modèle iranien de théocratie hégémonique qui semble avoir les faveurs des vainqueurs.

D'aucun s'offusquent que ce gouvernement transitoire édicte déjà des instructions bridant la liberté comme l'autorisation préalable de manifester dans la rue. C'est ignorer les lois françaises. D'autres dénoncent des morts dans pareilles manifestations non autorisées. Il nous faut leur fournir des LBD40 ! Les derniers observateurs sont attentifs au décrets à venir réinstituant la charia dans tous les domaines de la société. Mais c'est le programme annoncé par les Talibans depuis vingt-cinq ans (prise de Kaboul le 27 septembre 1996), qui ne semble pas avoir levé de fortes oppositions dans le peuple majoritaire pachtoune, à voir la rapidité de contrôle du pays. Il n'y a de fait aucune surprise ! Elle viendrait plutôt du côté de la Coalition pour son défaut d'anticipation. Mais nous en avons déjà parlé.

Sauf tuerie de masse dans une province hors d'atteinte des dirigeants de Kaboul, et sous condition de reconnaissance du prochain gouvernement afghan (inclusif comme disait Yves Le Drian) avec deux femmes âgées dans des postes de secrétaires d'Etat, les affaires vont reprendre entre la communauté internationale, Etats-Unis compris, et l'Emirat islamique d'Afghanistan, quoiqu'en dise ce pauvre Josep Borrell qui enfile les éléments de langage comme des perles de culture. Mais pourquoi avoir choisi ce con au poste diplomatique européen ? A dire vrai, en ce vingtième anniversaire des attaques séoudiennes sur New-York, nous sommes au seuil d'une collaboration entre les services de renseignement afghans et américains pour confiner al-Qaïda et détruire l'Etat islamique Khorasan. Rien ne dit d'ailleurs que l'ISI pakistanaise ne soit pas déjà entrée dans cette coalition de l'ombre, car l'effervescence nouvelle dans les FATAs et les camps de réfugiés afghans archi-pleins commencent à déstabiliser le pouvoir à Islamabad.

Restera ensuite la façon talibane d'appliquer en toute hypocrisie les directives gouvernementales aux provinces, ce qui dans le système fédératif afghan n'est pas donné d'avance. On l'a déjà vu à Hérat. Mais nécessité faisant loi, les besoins dramatiques de fonds étrangers pour nourrir une population à moitié dénutrie et relancer les utilités de base avant l'hiver primeront les considérations coraniques. C'est le seul levier dont dispose la communauté internationale pour relativement protéger la population d'exactions révolutionnaires. Espérons que la Chine populaire ne le bloquera pas, pour le simple plaisir d'exposer son incontournable pouvoir de nuisance et affirmer sa suzeraineté sur un pays prometteur.

Entretemps, sauvons les femmes afghanes et les lévriers !

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